Magazine Culture

Tous mes amis sont des super héros / Andrew Kaufman

Par Bibliomanu
Tous mes amis sont des super héros / Andrew KaufmanJe vous vois venir. De loin. Houlà oui, de très loin même. Je vois bien ce que vous devez penser. Ma petite voix me souffle la même chose. Je me serais penché sur ce livre sous le seul prétexte que l'on y parle de super héros, et qu'en tant que super héros, ce titre là a comme qui dirait résonné d'une façon toute particulière. Ce n'est pas le cas. Enfin pas vraiment. Pas seulement, ok ? Disons qu'avant tout, c'est la couverture qui a littéralement fait en sorte que je me jette sur le livre. Parce que sinon, franchement, si c'était vraiment une question de super héros, y'a belle lurette que je vous aurais parlé de Comment je suis devenu super héros, d'Un jour je serai invincible ou bien même, tant qu'on y est, de La vie sexuelle des super héros.Y'a belle lurette qu'à cette occasion, j'en aurai profité de trouver là des prétextes détournés pour parler de moi, afin de me soustraire aux stipulations édictées par la FSHW, la Fédération des Super Héros du Web qui, je le rappelle, conseille d'éviter de parler de soi sous peine de voir sa vie privée mise à mal d'une façon ou d'une autre. Je ne dis pas que je n'ai pas un petit pincement au cœur en voyant un titre me rappelant ma propre condition mais là n'est vraiment pas le propos. Car avec Tous mes amis sont des super héros, vous allez voir, on parle beaucoup d'eux effectivement, mais pour mieux parler de l'Homme. Et de l'amour aussi. Surtout.
L'amour. Le mot est lâché. Vous me direz, en parler dans les romans, ce n'est pas ce qu'on appelle une nouveauté, c'est même d'un banal. C'est si commun. Mais l'évoquer se décline de tant de manières différentes, au point de susciter en nous des réactions qui le sont tout autant. Et l'approche d'Andrew Kaufman s'avère aussi drôle que touchante sans jamais laisser le lecteur indifférent.
« Un roman élégant et d'une incroyable drôlerie sur les affres de l'amour, où les super héros sont des êtres humains pathétiques, faibles, amoureux : des êtres humains plus-que-normaux ». En lisant cette mention sur la quatrième de couverture, j'ai presque été tenté de raccroché du costume car dans cette phrase, il y a toute l'essence du livre, sa – comme dirait l'autre – substantifique moelle. Sauf... sauf que j'ai quand même quelques petites choses à rajouter...
Si ce roman est effectivement élégant, il est aussi bien barré, bien barré et poétique en même temps. Oui, je sais, se révéler ainsi quand il est question de super héros, c'est un peu surprenant, mais c'est ainsi.
Tom n'est pas un super héros, c'est un gars normal même les êtres aux supers pouvoirs qui l'entouent, si nombreux, le considèrent comme un type vraiment épatant eu égard à sa normalité, justement. Depuis quelques mois, Tom est marié à Super-Perfectionniste. Ils auraient pu couler un amour paisible, se complaire dans leur bonheur mais voilà, Super-Hypno, jaloux, en a décidé autrement en faisant en sorte que Tom devienne totalement invisible aux yeux de Super-Perfectionniste. Et tandis que cette invisibilité prend des airs de manque puis d'oubli, la jeune femme décide de s'envoler pour vivre à Vancouver. Tom devine, sait, que s'il ne parvient pas à se faire voir d'elle au terme de ce voyage ponctué de flashbacks, c'en sera définitivement fini de leur histoire.
Je suis tenté de vous raconter toutes les pépites dont fourmillent ce roman , de vous décrire les uns après les autres tous les super héros que l'on rencontre, de Super Télé-Girl qui laisse couler des larmes en forme de télé, en passant par Super-Je-change-d'humeur-à-la-vitesse-du-son, Super-Je-tente-ma-chance, pour finir par Super-Pantoufle qui parvient à transformer chaque jour en dimanche à la maison, voire au lit... Eux et tant d'autres, si vivants, drôles et, oui, si humains.
Il y a de très belles scènes dans ce roman, dont certaines rappellent un certain Boris Vian, une douce folie aussi ainsi qu'une dose d'absurde, de cet absurde qui n'égare jamais le lecteur en route pour la simple et bonne raison qu'il se nourrit de ce que nous sommes, passions, maladresses et doutes compris.
« Tom se remémora l'affreux appartement en sous-sol où il habitait à l'époque. Le pire, c'était le linoléum de la cuisine, tout rayé de traces de talons et de brûlures de cigarettes ; blanc à l'origine, il était devenu d'un gris perpétuellement sale.
Super-Perfectionniste ne pouvait pas supporter ça. Un mercredi, cinq jours après leur premier rendez-vous officiel, elle était arrivée avec deux seaux de peinture pour sol, bleu vif, et deux rouleaux.
« Excellente idée », avait dit Tom.
Ils s'étaient mis au travail immédiatement. Ils avaient commencé à l'endroit où le lino jouxtait la moquette. Ils travaillaient à reculons, à toute vitesse, recouvrant chacun la surface devant eux, puis reculant de quelques pas pour peindre à nouveau. Très vite, leurs pieds avaient heurté le mur du fond. Ils s'étaient retrouvés coincés, entourés de peinture fraîche. Tom avait relevé les yeux, Super-Perfectionniste avait souri.
« C'est malin ! Qu'est-ce qu'on fait maintenant ? » avait demandé Tom.
Et Super-Perfectionniste l'avait embrassé (à la perfection). » 
Maintenant il ne me reste plus qu'à faire lire Tous mes amis sont des super héros au compadre Gilles qui ne me croit pas quand je lui dis qu'on peut-être un super héros sans cape, sans même savoir voler. Et avec mes Super-gros-sabots – va falloir que je songe à les enlever d'ailleurs – avec mes Super-gros-sabots donc, je lui dirai : « Et l'amour, ça donne pas des ailes, peut-être ? ». Mmhh...
Tous mes amis sont des super héros, Andrew Kaufman, traduit de l'anglais (Canada) par Anna Roen, Naïve, 111 p.

Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Bibliomanu 690 partages Voir son profil
Voir son blog

l'auteur n'a pas encore renseigné son compte

Magazines