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"Les coeurs en skaï mauve" de Sacha Sperling

Par Angelalitterature
Pour La Cause Littéraire.


Les coeurs en skaï mauve de Sacha Sperling, chez Fayard, 245 pages, 18€90.
Deux ans après son premier roman, Sacha Sperling revient avec un roman des plus prometteurs. Pour ce deuxième roman, il change d’inspirateur.  Mes illusions donnent sur la cour était un titre emprunté à une chanson de Gainsbourg. Cette fois-ci Les cœurs en skaï mauve est emprunté au roman 37°2 le matin de Philippe Djian :« … elle m’a fait penser à une fleur étrange munie d’antennes translucides et d’un cœur en skaï mauve et je connaissais pas beaucoup de filles qui pouvaient porter une minijupe de cette couleur-là avec autant d’insouciance ».Jim et Lou sont jeunes. Jim travaille au Globe Movies. Lou ne s’entend pas avec sa mère. A la suite d’une engueulade avec cette dernière, Jim décide d’emmener la jeune Baby Lou, « celle qui est très jolie pour qu’on l’appelle seulement pas son prénom », avec lui. Ils partent alors. Lou et sa mère se quittent, un goût amer dans la bouche.La première de couverture, avec son Motel et sa Cadillac, nous laisse prévoir un voyage aux Etats-Unis. Or, rien de tel. Jim et Lou habitent bien à Paris.Sacha Sperling réussit à perdre son lecteur entre la réelle vie de ses personnages, et celle qu’ils s’inventent : un road-trip à l’américaine. A la lecture de leurs frasques, on imagine Lou et Jim au volant d’une Cadillac, roulant dans des paysages déserts, qui nous font voyager de l’autre côté de l’Atlantique. Mais en rien tout cela ne correspond à la vie de ce jeune couple. Ils sont au volant d’une voiture des plus banales, roulant dans Paris, sa banlieue et son périphérique. Rien de très mirifique. Et pourtant, leur jeunesse, leur insouciance et le talent de Sacha Sperling nous font oublier qu’ils se trouvent dans cette sombre capitale.« Jim est un cow-boy qui flotte au-dessus des périphériques ».Sacha Sperling nous enchante dans ce deuxième roman, de par sa capacité à brouiller les pistes des paysages et des lieux. Sa plume est toujours aussi acérée, et un brin désobligeante, depuis Mes illusions donnent sur la cour. Des phrases courtes, des chapitres courts, des pages qui se tournent vite. Un style bien particulier.« C’est le silence dans le McDo. Les serveurs ont disparu dans les cuisines. Leurs voix résonnent comme l’écho lointain et rassurant d’une radio. Jim tient toujours fermement le poignet de Lou. Il est en sueur, haletant, les yeux exorbités. Comme un enfant qui se réveille d’un cauchemar et qui ne découvre rien d’autre que les ténèbres du mauvais rêve d’où il s’est échappé. Le clown ne parle plus. Le dommage est fait. C’est drôle comme il a l’air plus effrayé qu’elle. Les zones les plus sombres. D’ailleurs à bien y regarder, il semblerait même qu’elle sourit. Comme c’est bizarre. Et sa première réaction n’est pas de se mettre à pleurer. Elle ne lui file pas une gifle à lui retourner le cerveau. Elle sourit simplement et elle dit : Pour les vendeurs, je ne peux rien faire, je suis trop jolie pour qu’on ne me regarde pas. Viens, on se casse, et je te jure quand dans dix minutes, tu seras très content de me voir faire la pute » (page 151).Myriam Thibault

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