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Critique : Hymne de Lydie Salvayre

Par Juloobs

« Dans de grandes oeuvres d’art, le monstrueux des temps modernes prend conscience de soi« 

Peter Sloterdijk, cité par Lydie Salvayre (p.38)

Quatrième de couv’ : Le matin du 18 août 1969, à Woodstock, Jimi Hendrix joua un hymne américain d’une puissance quasiment insoutenable.

Parce qu’il avait du sang noir et du sang cherokee mélangé de sang blanc, parce qu’il était donc toute l’Amérique, parce que la guerre au Vietnam soulevait en lui un violent mouvement de refus que toute une jeunesse partageait, parce que sa guitare était sa lady électrique, sa passion, sa maison, sa faim, sa force et qu’il en jouait avec génie, Jimi Hendrix fit de cette interprétation un événement.

Revenant sur ce moment inoubliable, Lydie Salvayre tire les fils de la biographie pour réécrire la légende de Jimi, sa beauté, sa démesure, mais aussi sa part sombre, ses failles et la brutalité du système dont il était captif et qui finirait un jour par le briser.

Sur l’auteur : Lydie Salvayre a écrit une quinzaine ouvrages dont la plupart sont traduits à l’étranger dans une vingtaine de langues. Elle a obtenu le Prix Novembre pour La Compagnie des spectres.

Critique : Hymne de Lydie Salvayre

Hymne est un livre percutant qui est plus qu’une biographie romancée. Au-delà du concert de louanges et de la révérence assumées par Lydie Salvayre, ce « roman est écrit dans une langue précise, inspirée et captivante. Il n’est pourtant pas simple de réecrire la Légende…

Résultant d’un travail de documentation que l’on imagine vertigineux, Lydie Salvayre tente de percer dans Hymne la timidité maladive d’Hendrix, les raisons de son amour indéfectible pour la musique, ses attitudes scéniques explicites, d’expliquer sa solitude et surtout le pourquoi et le sens profond de cet hymne américain bafoué en août 1969 alors même que Woodstock  et l’Amérique s’éveillent.

Pour Lydie Salvayre, l’élan de folie qui caractérise la musique d’Hendrix s’explique par les origines de Jimi (indien, noir et blanc), l’absence d’équilibre familial, l’échec de mai 68, les troupes américaines qui s’enlisent au Vietnam, la xénophobie, « l’esprit » de la beat generation. C’est une somme de violences qui sont libérées avec rage par la guitare électrique d’Hendrix le 18 août 1969 à Woodstock.

Lydie Salvayre l’exprime ainsi : « Par le seul moyen de sa musique qui brassa dans un même choeur le sanglot des Indiens Cherokee chassés de leurs sauvages solitudes, la nostalgie des esclaves noirs qui chantaient le blues dans les champs de coton, les fureurs électriques du rock’n'roll moderne et les sons si nouveaux du free jazz,

par le seul moyen de sa musique, il rameuta, en trois minutes quarante-trois, le troupeau des Amériques qui faisaient l’Amérique et qui hurlèrent à la mort de se voir ainsi regroupées. »

Critique : Hymne de Lydie Salvayre

Hymne tente aussi d’expliquer pourquoi Hendrix, star planétaire à 27 ans était aussi épuisé. C’est peut-être parce qu’il en avait (déjà) assez de lutter contre l’establishment, que sa vie soit rythmée par les contrats, par les tournées, par certains de ses titres phares (Hey Joe, Purple Haze), par la dictature de l’argent, par cette obligation de faire le grand écart entre la scène et le quotidien, l’extravagance et le banal.

Durant 27 ans, la musique d’Hendrix, sa passion par la recherche musicale et sa volonté d’explorer de nouveaux territoires harmoniques ont eu raison d’innombrables épreuves.



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