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Des ONG et une coalition d’investisseurs dont Aviva veulent moraliser la City

Publié le 29 septembre 2011 par Tulipe2009
Des ONG et une coalition d’investisseurs dont Aviva veulent moraliser la City


Des ONG et une coalition d’investisseurs dont Aviva veulent moraliser la City
Des ONG et une coalition d’investisseurs dont Aviva veulent moraliser la City



Un grand gestionnaire d’actifs, Paul Abberley, à la tête d’Aviva Investors London, souhaite modifier certaines mauvaises habitudes de la City. Mais, il a conscience de se battre contre des moulins à vents...

Il a constaté que la plupart des investisseurs se soucient comme d’une guigne des dommages sociaux ou environnementaux commis par certaines entreprises cotées en Bourse. Devenir leur actionnaire reviendrait à donner un blanc seing à leurs dirigeants. Son appel à un plus grand dicernement ne semble pas une évidence, malgré le fait que l’industrie financière ait vu sa réputation entachée avec la crise.
Il déplore que ces carences répondent à une certaine logique, dans la mesure où de nombreux investisseurs raisonnent avec un horizon de six semaines, parfois en totale contradiction avec les intérêts de leurs clients, comme les adhérents de caisses de retraite. Rien ne pourra empêcher selon lui un investisseur de renoncer à des opportunités de profit.
A ce titre, l’interview récente par la BBC d’un trader indépendant, aux propos caricaturaux, illustre le chemin qui reste à parcourir. Selon lui, Goldman Sachs et l'appât du gain dirigent la planète. Cette vidéo a fait couler beaucoup d’encre, certains la considérant comme une farce.

Paul Abberley estime que seuls les ONG et les hommes politiques peuvent pousser la finance de marché à se réformer. Mais, les hommes politiques raisonnent eux aussi selon lui à court terme, englués dans un calendrier électoral. De même, il regrette que rares sont les membres du monde associatif à maîtriser les rouages des marchés financiers, ce qui restreint leur force de frappe, voire les réduit au silence.
De son côté, l’assureur britannique Aviva a tenté de réagir en posant des questions aux sociétés dans lesquelles elle souhaite investir. Sans réponse de leur part, Aviva Investors déclare se montrer intransigeante et peut monter au créneau, comme dans l’affaire Vedanta. Sur 600 entreprises interrogées sur certains points de leur disclosure en 2010, le gestionnaire d’actifs a décidé dans 90 cas de s’abstenir ou de voter contre à l’assemblée générale.
L’action isolée étant vouée à l’échec, un collectif s’est constitué autour d’Aviva Investors. Le Collectif sur le reporting développement durable a appelé la semaine dernière les États membres des Nations Unies à mettre en place un cadre politique mondial, exigeant des sociétés cotées et des grandes entreprises privées qu'elles intègrent les informations relatives au développement durable dans leur rapport annuel et dans leur comptabilité. Ou bien qu’elles expliquent pourquoi elles ne peuvent pas le faire.
L’obligation d’information sur la politique RSE de l’entreprise vise à susciter le débat au sein des conseils d’administration des sociétés cotées et à permettre aux actionnaires de dialoguer en connaissance de cause avec la société. Le cadre suggéré pour ces débats est le Pacte mondial des Nations unies.
Dans ce cadre, le reporting serait effectué selon le principe comply or explain, qui oblige l’entreprise à se conformer aux règles ou à expliquer pourquoi elle y a dérogé. Le collectif appelle les États membres de l’ONU à adopter ce cadre politique mondial lors de la Conférence des Nations Unies sur le développement durable (sommet de la Terre 2012), qui se tiendra en juin 2012 à Rio de Janeiro.
Pour Georg Kell, directeur exécutif du Pacte mondial des Nations unies, les entreprises doivent intégrer le développement durable dans leurs stratégies de long terme et communiquer sur l'avancée de leurs projets. « C'est seulement quand les investisseurs ont à leur disposition des informations pertinentes qu'ils peuvent évaluer une société par rapport à ses pairs, et décider ou non d'y consacrer du capital»
Ce collectif, baptisé Corporate Sustainability Reporting Coalition, englobe non seulement des établissements financiers, mais aussi des ONG, comme la Fondation Ethos en Suisse et la Church of Sweden. Le Ceres, Pax World Management et Triodos Investment Management, qui font figure de pionnier dans la finance durable, y participent également. Avec quelques représentants Français comme CA Cheuvreux et le Fonds de réserve pour les retraites. Cette coalition est loin d’être ridicule, puisque l’encours d’actifs sous gestion confiés à ses membres s’élève à 1.600 milliards de dollars.

Selon le collectif, ce cadre politique international doit se baser sur deux principes clés majeurs :
1. Transparence – Les États membres de l’ONU doivent mettre en place une réglementation nationale obligeant à l’intégration des problématiques pertinentes en matière de développement durable dans le rapport annuel et la comptabilité ;
2. Responsabilisation – Les États membres de l’ONU doivent proposer des mécanismes efficaces pour que les investisseurs puissent demander des comptes aux entreprises sur la qualité des informations publiées, avec par exemple un vote consultatif lors de leur assemblée générale.
Paul Abberley, Directeur général d’Aviva Investors Londres, se place dans une logique d’investisseur à long terme :
"Nous pensons que tous les conseils d’administration devraient tenir compte de l’orientation durable de la société dont ils ont la gouvernance. Cela devrait non seulement augmenter la rentabilité à long terme et les rendements pour les investisseurs, mais également améliorer la qualité des places boursières, renforcer la stabilité macrofinancière et contribuer de manière significative à la vie des personnes sur lesquelles l'activité de l'entreprise a un impact. C’est pourquoi nous appelons les États membres des Nations Unies à s'engager à mettre au point des politiques en matière de reporting de développement durable pour les entreprises. Les marchés évoluent au gré des informations qui leur sont fournies. Si ces informations ne concernent que le court terme et sont incomplètes, nos marchés ne pourront adopter une approche exhaustive et à long terme"
De même, Ernst Ligteringen, Directeur général de la Global Reporting Initiative (GRI), les sociétés pionnières ont prouvé l’avantage qu’il y avait à publier les informations relatives au développement durable.
« La question qu’il faut poser maintenant est : pourquoi ne publiez-vous pas ces informations ? Les États membres ont ici l'occasion d’ouvrir la voie d'une économie mondiale durable en demandant à toutes les grandes entreprises de communiquer sur l’impact du développement durable, soit dans le cadre d’un rapport sur le développement durable, soit en intégrant ces informations aux données financières. Si elles ne le font pas, elles devront expliquer leur silence.»

La qualité du reporting devrait même devenir un nouveau critère d'admission à la cote. Au niveau mondial, certaines places boursières sont en avance sur la diffusion des informations environnementales, sociales et de gouvernance (ESG) par les sociétés cotées, notamment Euronext Paris et le Tokyo Stock Exchange. A l’opposé, d’autres places de marché font pale figure: l’Australian Stock Exchange, le NASDAQ GS, le Korea Exchange, le Santiago Stock Exchange et le Philippine Stock Exchange.
James Zhan, directeur de la division des investissements et des entreprises de la CNUCED et organisateur de l'initiative Bourses de valeurs durables du Forum mondial de l'investissement l'année dernière, a d’ailleurs déclaré qu’:
«Il n'est pas rare que les grandes entreprises publient des données ESG de bonne qualité, mais ces informations manquent de comparabilité et d'utilité. Cette action témoigne de l'intérêt fort des marchés pour un reporting ESG standardisé et de l'attention croissante portée au développement durable. Les bourses peuvent jouer un rôle important en rationalisant leurs pratiques à l'échelon national et en participant aux efforts internationaux pour l'harmonisation de la communication des informations ESG.»
Ces réflexions menées notamment diverses parties prenantes se multiplient. Diane-Laure Arjaliès, professeur assistant à HEC, interrogée dans le Monde de l’Economie du 26 septembre dernier, estime en effet que les acteurs non financiers - acteurs publics, ONG, société civile, entreprises, etc. – doivent prendre une plus grande part à la réflexion qui est actuellement menée par les tenants de l'ISR au sein du monde financier. Elle conclue même « Après le Grenelle de l'environnement, il serait peut-être souhaitable d’envisager un Grenelle de la finance responsable?»
Pour aller plus loin :
Les 24 signataires du courrier représentent un encours total de 1.600 milliards USD et regroupent les investisseurs suivants (plus quatre prestataires de services) :
Allianz Global Investors Investments Europe, AP7, Australian Council of Super Investors, Aviva Investors, BC Investment Management Corporation (bcIMC), Church of Sweden, Dexia Asset Management, Environment Agency Active Pension Fund, EQAO, Ethos Foundation, Fonds de réserve pour les retraites - FRR, Mn Services N.V., NEI Investments, North East Scotland Pension Fund, Pax World Management LLC, RCM une entreprise du groupe Allianz Global Investors, SNS Asset Management, Solaris Investment Management, Sparinvest, "TD Asset Management (TD Asset Management Inc., TDAM USA Inc.)", The Co-operative Asset Management, Trillium Asset Management, Triodos Investment Management B.V. et VIP (Vereinigung Institutionelle Privatanleger) eV.

Les quatre prestataires de services signataires de l'appel sont : Ceres, Ethix SRI Advisors, Fondation Guilé et Illac Ltd.
Communiqué de presse d’Aviva Investors du 21/09/2011, font j'ai repris de larges extraits.
Investor led coalition calls for un declaration requiring companies to integrate material sustainability issues into reporting
http://www.avivainvestors.com/media-centre/xml_027101.html
Aviva chief attacks City for failure on sustainability. The Guardian. 04.02.2011
http://www.guardian.co.uk/sustainable-business/aviva-chief-city-failure-sustainability
Discussion paper. International Integrated Reporting Committee (IIRC).
Integrated Reports will meet the needs of a broad range of stakeholders.
http://www.kpmg.com/CH/en/Library/Articles-Publications/Documents/Audit/pub_2011_IIRC-towards-integrated-reporting_EN.pdf

Partenariat entre Aviva et Save The Children.

India: Aviva launches Mobile Learning Centers with Save the Children to bring underprivileged children closer to education 05/09/2011
http://www.webwire.com/ViewPressRel.asp?aId=144979
72 entreprises font pression sur Bruxelles pour une politique climatique plus ambitieuse. 21/06/2011
http://ong-entreprise.blogspot.com/2011/06/72-entreprises-font-pression-sur.html
Des sociétés de gestion « engagées » selon le Label ISR Novethic 2011 le 27 septembre dernier
Les 4 sociétés de gestion récompensées pour des fonds actions : De Pury Pictet Turrettini (Guilé Emerging Markets Engagement Fund, Guilé European Engagement Fund), Edmond de Rothschild AM (EdR Tricolore Rendement), Henderson GI (Horizon Industries of the Future) et Phitrust Active Investors (Euro Active Investor)
La mention « engagement », qui récompense des fonds dont la politique est d’influencer les stratégies des entreprises pour qu’elles améliorent leurs pratiques Environnementales, Sociales et de Gouvernance (ESG), a été attribuée à cinq fonds en 2011 contre un seul en 2010. Les candidats sont de plus en plus nombreux mais beaucoup de stratégies d’engagement étant relativement récentes, la visibilité sur le résultat de ces démarches manque encore trop souvent.
Les catastrophes industrielles doivent faire progresser l’ISR. Cercle les Echos. 5/07/2011
http://lecercle.lesechos.fr/entreprises-marches/finance-marches/221136243/catastrophes-industrielles-doivent-faire-progresser-is
L’article 225 de la loi Grenelle 2. Le blog de Jean-Pierre Bompard. 26/09/2011
http://alternatives-economiques.fr/blogs/bompard/archives/14

Principes pour l’investissement responsible (PRI)
Les Principes pour l’investissement responsable, une initiative volontaire d’investisseurs réunis par l’UNEP Finance Initivative (UNEP FI) et le Pacte Mondial des Nations Unies, ont été établis afin d’aider les investisseurs à accomplir au mieux leurs objectifs d’investissement de long-terme auprès de marchés responsables, avec une analyse approfondie des questions environnementales, sociales et de gouvernance d’entreprise (ESG).
L’initiative compte déjà 870 signatures de 45 pays, avec plus de 25 trillions de dollars d’actifs sous gestion.
www.unpri.org
UN Global Compact
Lancé en 2000, le Pacte Mondial des Nations Unies assemble les entreprises et les organismes des Nations Unies, le monde du travail et la société civile autour de dix principes universels relatifs aux droits de l'homme, aux normes du travail et à l'environnement, et la lutte contre la corruption. S'appuyant sur le pouvoir de l'action collective, le Pacte Mondial incite les entreprises dans le monde entier à conduire leurs activités en respectant Les Dix Principes énoncés dans le Pacte, et d’encourager les actions à l’appui des grands objectifs des Nations Unies. Avec plus de 6.000 entreprises partenaires et de centaines d’autres acteurs répartis dans plus de 165 pays, il s’agit de la principale initiative mondiale d’entreprises citoyennes. www.unglobalcompact.org
La CNUCED
Depuis sa création en 1964, la CNUCED
(Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement)est devenue progressivement une institution compétente, fondée sur le savoir, dont les travaux visent à orienter le débat et la réflexion actuels sur la politique générale du développement. La CNUCED accueille notamment un groupe de travail intergouvernemental d’experts des normes internationales de comptabilité et de publication (ISAR). Depuis plus de 25 ans, l’ISAR constitue le point central au sein du système des Nations Unies pour les problématiques de transparence et de comptabilité. Avec l’ISAR, la CNUCED s’attache à promouvoir les bonnes pratiques internationales en matière de rapport financier et d´informations sur la gouvernance d´entreprise, et d’accompagner les pays développés dans le renforcement de leurs capacités techniques dans ces domaines. La CNUCED est également à l’origine de la publication du Rapport sur l’investissement dans le monde, la plus large base de données sur les tendances de l´investissement étranger direct (IED) aux niveaux mondial, régional et national, et accueille le Forum mondial de l'investissement, une plateforme unique dédiée aux discussions et actions pour exploiter les investissements internationaux comme des outils de croissance et de développement.www.unctad-worldinvestmentforum.org

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