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Blue valentine (2010) de Derek Cianfrance

Publié le 12 octobre 2011 par Flow

Blue valentine.

(réalisé par Derek Cianfrance)

Autopsie du grand Amour.

 

 

Ce film était en projet depuis une dizaine d'années. Michelle Williams était engagé depuis six ans, Ryan Gosling depuis quatre. Ils ont vécu tout deux un mois dans la maison de leurs personnages afin de se préparer aux rôles... Tout ça montre combien les gens qui ont fait ce film se sont engagés pour le réussir. Et le moins que l'on puisse dire c'est que ça a payé.

 

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Dean et Cindy forment un couple marié comme il en existe tant. Ensemble depuis des années et parents d'une petite fille, ils pourraient être heureux. Mais ce n'est pas (plus) le cas. Leur union est au bord du gouffre malgré leurs tentatives (sincères) d'éviter le naufrage...

Lorsqu'un film est aussi réussi que celui-ci, il n'y a pas trente-six façons de le critiquer. Je vais donc énumérer une par une les raisons qui font de Blue Valentine une des plus belles réussites de ces dernières années.

- Ryan Gosling et Michelle Williams. C'est la raison la plus évidente. Ils portent le long-métrage sur leurs épaules avec une maestria rare. On s'attache tout de suite à leur devenir. Ils forment à l'écran un couple authentique, on y croit dur comme fer. Il est clair qu'ils se sont impliqués au-delà de ce qu'on leur demandait. Tout simplement un des plus beaux couples de cinéma qu'on ait eu la chance de voir. Leur alchimie culmine dans la magnifique scène de l'hôtel où ils se livrent entièrement (littéralement) à la caméra. Il y avait un moment que je n'avais vu une telle scène, intimiste et lourde de sens. Revenons sur leurs personnages. Cindy sent bien que son mariage touche à sa fin. Mais elle laisse faire car elle n'en a pas forcément envie mais surtout car elle a toujours laissé les évènements et le hasard dicter sa conduite (sauf dans l'éprouvante scène de l'avortement). Elle peut apparaître antipathique mais elle n'en reste pas moins humaine et attachante dans ses silences et sa tristesse. Il n'est pas étonnant que Dean l'ait séduite facilement. Il est son opposé. Vagabond, un brin chien fou et sans attaches, il ne se laisse pas dicter sa conduite, ni par les autres, ni par le poids des évènements. D'où son incapacité à supporter ce qu'il se passe. Sa femme apathique le fait souffrir. Et on a mal pour lui. Ils ne peuvent plus communiquer. On voit bien qu'il fait tout pour y parvenir mais ce sera toujours insuffisant (la scène de l'hôtel encore). On ressent réellement sa peine, son impuissance. Et tout ça grâce à un Gosling époustouflant et méconnaissable. Le Dean du passé ressemble plus à ce que fait l'acteur d'habitude (on pense à N'oublies jamais) mais la version du présent est fantastique. L'acteur apparaît vieilli, fatigué et véritablement au bord du gouffre. Une prestation géniale.

- Une réalisation qui épouse les sentiments et les corps. La caméra de Derek Cianfrance est parfaite. Sans les deux interprètes, pas certain que le film aurait été une si belle réussite. Mais sans le réalisateur, il est évident que non. Il sait épouser les corps, le désir (ou plutôt l'absence de désir) qui s'en dégage. Il a réussi à être pudique, à maintenir une distance et en même temps être très intimiste. Je laisse ce sujet à des plus compétents, ne maîtrisant que moyennement ce qui touche à la réalisation. Mais vous avez saisi l'essentiel.

- L'emploi intelligent des conventions. La structure narrative est maligne. On a deux lignes temporelles qui se superposent comme si elles n'en formaient qu'une. La première (le passé) brasse tous les clichés de la comédie romantique. On a la chanson du couple, la déclaration enflammée (ici sur un pont), la scène de drague improbable dans la rue. Tout y est. Mais tout est détourné dans la seconde ligne temporelle. C'est comme si le film était la suite de ceux qu'on voit d'habitude. On aperçoit l'envers du décor. Et tous les rouages habituels ne signifient plus qu'une seule chose: l'amertume (la chanson par exemple).

- Authentique amertume. Rarement dans un film, la mélancolie n'a paru si vraie, si sincère. Grâce à tout ce que je viens de décrire, notre implication n'en est que renforcé. On ressent vraiment la tristesse, la profonde amertume de la fin de la relation. C'est un film qui donne le cafard.

- Autopsie du grand Amour. Enfin, le film montre de manière froide, clinique les différentes étapes de la mort d'un couple. Disparition de l'amour, du désir sexuel puis la naissance d'un sentiment d'emprisonnement et enfin les regrets et l'amertume. Cette opération culmine avec la scène finale éblouissante. Une autopsie pas vraiment pessimiste mais sacrément déprimante.

Un film parfait. Un coup de cœur instantané (depuis supplanté par Drive). Deux acteurs qui se livrent comme jamais, une authenticité rare, un réalisateur inspiré et une structure intéressante. Une trouvaille que je conseille. Bien-sûr comme le médecin de Gosling à la fin du tournage, je vous invite à voir une comédie juste après (lui a choisi Crazy, stupid, love). Il vaut mieux.

Note:

Pastèque royale


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