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Déjà de Nicolas Bertrand

Par Venise19 @VeniseLandry
Déjà de Nicolas Bertrand« Enfin », je transmets mes impressions sur « Déjà » !
Un roman qui parle principalement de la mort qui rôde est une gageure, de décrépitude qui s’éternise, un défi. Dans un premier roman, je parlerais d'un acte intrépide. Nicolas Bertrand l’a commis, sans compromis.
Roland, un bon vivant mène une vie des plus actives « Pressé de vivre, entêté, s’imaginant capable de mener de front plusieurs vies parallèles, celle d’amant, de père, de travailleur, de syndicaliste et dorénavant d’étudiant » (p. 25). La seule menace qui pèserait sur sa vie serait de vouloir tout englober goulument au risque de négliger l’amour de sa vie, sa femme. Une vie, même ordinaire, goûte bon, et cet hyperactif l’apprendra le jour où la sienne sera menacée par une mystérieuse maladie qui lui tombera dessus sans crier gare.
Nous entrons à petits pas dans cette histoire. Le dénouement pourrait se raconter en un paragraphe mais ce serait, à mon avis, manquer le principal ; la manière dont elle est traitée. Ce qui arrive à cet homme, et par ricochet à sa femme, Nicolas Bertrand nous le présente comme un objet tenu loin des yeux de l’émotion. Ce décalage émet un espace silencieux entre le moment où le destin foudroie et les réactions humaines qui en découlent. Et tout au long du récit, toujours ce décalage de temps, tenu d’une manière constante par l’auteur, comme une respiration régulière.
Qui dit maladie, et encore plus si mystérieuse, dit médecine. Le corps médical se penchera sur le corps souffrant de Roland avec passion ... et sans aucune compassion. Les yeux des médecins pétilleront de convoitise devant le haut potentiel de ce cobaye. Roland, acceptera-t-il ces traitements hasardeux qu’on lui proposera pour faire avancer la science ? Comment réagira sa femme devant le bouleversement total de sa vie de jeune mère ? Et comment réagiront père-mère, frère et sœurs ?
L’histoire d’amour entre Roland et sa femme se superpose au drame de cette maladie choisissant un être sans égard au mérite. J’ai admiré comme un joyau qui brille dans la pénombre cette démonstration de fidélité d'une femme vaillante, malgré la constance du pire au lieu du meilleur. J’ai été émue de ce tête à tête avec cette valeur, la fidélité, d’autant plus émouvante à mes yeux que dénudée de son mélodrame ou sa férocité passionnelle. J’ai entendu le souffle de la fidélité dans le silence de l’amour inconditionnel de cette femme face à son homme.
Autant le regard porté sur le couple glorifie, autant il raille le lien familial. On aurait affaire à des scènes presque drôles entre les parents, frères et sœurs si la circonstance ne nous tirait pas tant vers le bas.
J’ai trouvé de grandes qualités à ce récit, la constance du ton et celle du temps. On entend les heures, les semaines, les mois battre les tempes du temps. Et quoi de plus à propos quand on aborde la question de la maladie qui menace le temps dont on dispose sur la Terre.

Déjà de Nicolas Bertrand - Collection Hamac, 204 pages.

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