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Sarkozy a parlé « de tout ce qui n'est pas dans l'actualité»

Publié le 14 octobre 2011 par Juan
Sarkozy a parlé « de tout ce qui n'est pas dans l'actualité»  Après la Creuse, voici Chaumont, la ville de Luc Chatel. Sarkozy racontait n'importe quoi et beaucoup plus encore. Il espérait, cette fois-ci, que les médias parleraient un peu de sa visite provinciale et oublieraient un peu la primaire socialiste.
Il lança donc quelques formules grandioses.
Récupérer Shalit
Quand les vaches sont maigres, on se satisfait de peu. Nicolas Sarkozy, rapporte l'accrédité du Figaro à l'Elysée, s'est auto-félicité de la libération du soldat franco-israélien Shalit:  « En 2007 j'avais dit que je ferais tout pour que soient libérées les infirmières bulgares, Ingrid Betancourt, et Gilad Shalit. La boucle est bouclée ».Comme le rappele Charles Jaigu, la diplomatie française n'est pour rien dans la libération d'Ingrid Betancourt (qui avait fait grand brui à l'époque) ni dans celle de Gilad Shalit. Ce dernier a été échangé contre 1000 prisonniers palestiniens, pour la plus grande satisfaction du Hamas. Nicolas Sarkozy n'a rien fait, même si Alain Juppé a expliqué que la France s'était « fortement engagé(e) pour convaincre les deux parties de parvenir à cet accord ». En arrivant à l'Elysée, il misait sur son rapprochement avec la Syrie pour débloquer, notamment, la situation de l'otage. Depuis, Bachar el-Assad a révélé combien il pouvait être sanguinaire contre son peuple, ... sans que la France n'ait tiré un quelconque profit diplomatique de ses courbettes sarkozyennes.
Mercredi matin, Alain Juppé expliquait sur France info que la France condamnait fermement la répression en cours en Syrie. Il avait rencontré, lundi, des représentants du Conseil National Syrien, un organisme qui regroupe quelques opposants au dictateur el-Assad. Mais il ajoutait que la situation syrienne était différente du cas libyen, pour justifier l'absence d'intervention militaire occidentale. Pire, le Conseil de Sécurité avait encore refusé, il y a 8 jours, toute sanction contre Damas, à cause du veto de la Chine et de la Russie.

Lutter contre les Bolchéviks
A l'Elysée, jeudi matin, on s'agaçait encore du dernier succès des primaires socialistes. Le débat d'une heure et quarante-cinq minutes entre Martine Aubry et François Hollande a attiré 5,9 millions de téléspectateurs sur France 2, un score quasi-historique pour la chaîne publique en ces temps d'audience atone. Nicolas Sarkozy s'était montré en couple dans un restaurant de la rue d'Auteuil, dans le 16ème arrondissement, à quelques pas du quartier sécurisé de Montmorency où habite Carla Bruni. « Voyez ce sucre : il paraît solide. On le plonge dans l'eau. Voyez ce qu'il en reste. Voilà, c'est ça Hollande ». C'est un propos que l'on prête à Sarkozy depuis que François Hollande caracolait en tête d'obscurs sondages primaires. Serait-ce le signe d'une inquiétude ? Faudrait-il que l'on compare Nicolas Sarkozy à du Canada Dry ?
Mais le candidat était reparti sur les routes de France. Après la Creuse, mardi, voici la Champagne-Ardenne, jeudi. Sarkozy s'agace parce qu'on ne l'écoute plus. Même Juppé s'est ému que les journaux télévisés n'aient pas retransmis une image du déplacement présidentiel dans la Creuse. Il faut dire que la parole présidentielle, quand elle ne concerne pas l'actualité politique, est sans limite ni plafond sur les ondes radiophoniques et télévisuelles.
En reculant au plus tard l'annonce officielle de sa candidature, le Monarque se réserve ainsi une prise de parole médiatique sans contrainte, à l'inverse de tous les autres candidats déjà déclarés. L'un de ses ministres « les plus proches » a dévoilé ce qui semble être la feuille de route présidentielle, mercredi dernier après le conseil des ministres: G20 en novembre, « En décembre, ce sont déjà les vacances » puis « en janvier, le président fera sa tournée des voeux », et donc, ensuite, février sera le mois idéal pour lancer la campagne. Ni trop tôt, ni trop tard. D'ici là, il faut meubler, se montrer et faire croire qu'on travaille à la gestion du pays.
A l'UMP, on a décidé de « passer à l'offensive ». Notre confrère Variae a publié cette incroyable lettre de Jean-François Copé livrant les éléments de langage à ses militants et relais du camp présidentiel. Le même Copé a expliqué ce jeudi que l'UMP allait critiquer point par point le programme socialiste « dès la semaine prochaine ». Il était temps. Le programme est en ligne depuis le mois de mars dernier. Copé a aussi promis de publier le programme de l'UMP pour l'élection présidentielle dès le mois de novembre. Il était temps, Nicolas Sarkozy avait refusé de le dévoiler fin août. Le chef de clan ne voulait pas se sentir « lié » par des engagements aussi tôt dans la campagne. Le succès des primaires socialistes l'a fait changer d'avis. Jean-François Copé n'avait pas d'autre choix, à part caricaturer Montebourg en Bolchévik (sic!), que d'accélérer ce calendrier.
Ce mercredi, Ziad Takieddine, un proche de Jean-François Copé, était encore entendu par les juges van Ruymbeke sur son rôle dans le contrat de vente de frégates Sawari II à l'Arabie Saoudite et d'éventuelles rétro-commissions en faveur de la campagne d'Edouard Balladur.
Sillonner ... Chaumont
Nicolas Sarkozy, lui, a continué de sillonner la France. Il inaugure à tire-larigot, pour se montrer et livrer ses bons mots.
Ce jeudi, il visitait un musée itinérant, le Centre Pompidou, en escale à Chaumont avec une quinzaine de tableaux (Dubuffet, Kupka, Klein, Braque, Matisse, etc). La ville de Chaumont n'avait pas été choisi par hasard. Le maire s'appelle Luc Chatel, le ministre de l'Education nationale. En attendant son Monarque, Chatel expliqua aux journalistes qu'il n'avait pas regardé le débat des primaires socialistes car il jouait au foot avec le Variétés Club de France. Ce match était d'ailleurs organisé en faveur de l'association « Plus de Vie » de ... Bernadette Chirac.
Sarkozy est arrivé avec une demi-heure de retard. Il avait potassé son sujet. Il a fait sourire les journalistes présents et presque gêné les employés du musée: « Léger, c’est cher ? Klein, plus que Léger ? Moins que Matisse ? »  Nicolas Sarkozy ne cessait de demander combien coûtaient les oeuvres présentées. Le fric, c'est chic !
Le Monarque s'est affiché au milieu de quelques élèves d'un collège local, fort opportunément invités au musée pour l'occasion. La photo était belle comme un cliché de campagne de proximité... Une demi-heure plus tard, il était accueilli dans un gymnase pour une table ronde sur « l'accès et le partage de la culture ». Les 500 militants de l'UMP qui l'attendaient applaudirent sans surprise. Le candidat Sarkozy avait quelques grandes déclarations à faire sur l'importance de la culture : « La culture n'est pas superficiel, ce n'est pas une cerise sur le gâteau, c'est un fondement. » Ou encore: « Le Beaubourg mobile n'est ni de gauche, ni de droite ». Mais la meilleure des pensées du jour fut celle-ci, en conclusion de cette inutile visite: « On a parlé de tout ce qui n'est pas dans l'actualité, donc on a parlé de tout ce qui est important ».
Il avait aussi de grandes idées: « Je rêve que le musée d'Orsay envisage une implantation en Normandie ». Ou encore: « Pourquoi ne pas filmer les pièces de théâtre-Opéra, et les mettre à disposition des 5.000 lycées de France ? »
Il était enfin très content de lui-même, même si son auto-bilan était ... faux: « Depuis que nous avons décidé la gratuité des musées pour les 18/25 ans, 2,7 millions de visiteurs en plus ». C'est faux. La gratuité a été annoncée en mars 2009. Depuis 2009, le nombre de visiteurs de musée est resté stable, à 26 millions, d'après les propres communiqués officiels. Autre mensonge, sur Hadopi, quand le Monarque explique que le piratage sur internet aurait diminué d'un tiers depuis la mise en œuvre. En fait, par définition, personne n'en sait rien, pas même l'Hadopi. 
Enfin, Sarkozy était quand même en campagne. Outre les appels du pied au milieu culturel, le candidat tacla, encore une fois, certaines propositions des candidats socialistes. Ainsi contre Martine Aubry: «J'ai vu qu'on demandait une augmentation de 50% du budget de la Culture. Pourquoi pas 100%, 150%? Ça n'a pas de sens. Ce qui a du sens, ce sont les projets, les initiatives»... Et contre François Hollande: « L'avenir des jeunes, ce n'est pas des faux emplois mais de nouvelles activités ».
Ensuite, Nicolas Sarkozy est rentré à Paris. Il rencontra des « jeunes entrepreneurs » avec Eric Besson, son ministre de l'industrie. Voilà pour la partie officielle. D'après iTélé, il rencontra Dominique de Villepin, venu l'interroger sur sa situation personnelle. 
Villepin est « débranché », comme Borloo qui s'était montré la veille à l'Elysée aux côtés de Sarkozy.
Sarkozy est prêt. Et nous aussi.

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