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Sanglants rêves

Publié le 31 octobre 2011 par Lonewolf

Des mares de sang, voilà dans quoi je marchais. Non pas des mares, une rivière de sang qui stagnait en flaques. Des torrents, ou bien un filet. Je crois que j’ai perdu la notion en même temps que j’ai perdu l’esprit. L’odeur métallique, le goût qu’on sent dans la bouche comme lorsqu’on suçote une plaie qui a saignée. Et dans cet océan de sang, le bruit, un mélange de frottements, de chuintements, de crissements. Une nuée d’insecte, ou bien un grand rapace, à moins que ça ne soit les ailes d’un avion venant me sauver. Ce qui m’effraie le plus c’est de ne rien voir, enfin si, on peut voir la noirceur du rien non?

Pourquoi je suis sorti ce soir? Soirée d’Halloween, venez nombreux, frissons garantis… J’aurais dû comprendre, une queue de plusieurs heures devant le bâtiment et aucune foule autour, comme si la porte s’ouvrait sur un autre monde et que les gens disparaissaient. C’est surement ça d’ailleurs, je suis dans un autre monde. Mais où sont ceux qui m’ont précédé? En fait je crois ne pas vouloir savoir d’où provient ce sang. Pourquoi je n’arrive pas à hurler? Pourquoi je me sens las, si las tout d’un coup?

Je regarde mes mains, tiens le sang a dû couler sur moi, je lève les yeux, rien ne goutte, ou bien est-ce une pluie de sang que je sens sur ma peau qui semble me piquer comme des milliers d’épingles. Mais quand donc j’ai perdu la vue, et pourquoi je n’entends plus rien? Mais qu’est-ce que je viens de sentir sur mon bras. Tiens je suis si fatigué que je n’arrive même plus à lever le bras. L’odeur de soufre et de charogne a quitté mon nez depuis quand? Je reconnais que l’attraction est réussie, mais comment ont-ils pu réaliser une telle illusion? Surement le nuage que l’on traverse au départ, cette brume si piquante, si rouge, si froide, et pourtant qui semble enflammer les moindres parcelles de peau. Je me suis toujours demandé à quoi on pouvait savoir qu’on est drogué, je crois que je le suis. Du moins ce n’est pas normal de s’endormir alors que l’horreur est totale. Tout à l’heure encore je marchais, ou bien le décor avançait il seul? Ces monceaux de corps, ces chairs déchiquetées, ces membres arrachés, tellement réaliste, tellement fou que je n’ai que vaguement senti un haut le cœur en passant tout à côté.

Une lumière, pourtant je ne vois plus rien depuis longtemps déjà, tiens une autre pièce, circulaire, lumineuse, un puits de chaleur, un four solaire peut être? Je vais me faire griller maintenant, brûlé par les rayons du soleil salvateur, purificateur, finalement ça serait peut-être un mal pour un bien.

Je suis au centre, mes sens me reviennent, j’entends à nouveau, qu’est-ce que ce bruit étrange, est ce que je l’entends ou bien ces vibrations se répercutent dans mon corps, dans mes os, dans les moindres tissus de mon être. J’en viens presque à appeler à la délivrance, je ne suis qu’une boule de souffrance, une enveloppe vide et pourtant sensible dans ses moindres parties. Le plus étrange maintenant c’est que j’ai l’impression de voir mais que je ne peux pas bouger la tête, peut-être la drogue agit elle comme un paralysant. Pourquoi alors ne m’a-t-elle pas anesthésiée, je serais tellement mieux…

Je vois que les murs sont brillants, la lumière se reflète, je m’approche et je sens quelque chose qui ne va pas, ce sont des miroirs, d’horribles miroirs déformants, enfin déforment ils? Surement, je ne suis pas rentré habillé ainsi dans cette attraction, et puis je n’étais pas couvert de ce liquide, surement des effets spéciaux encore. Je comprends enfin pourquoi ma tête ne peut pas bouger, le rictus écarlate qui se dessine sur ma gorge en une ouverture béante, si je bouge trop j’ai peur qu’elle ne finisse de se séparer de mon corps. L’orbite vide qui me contemple, les traces de becs, était-ce les bruits d’ailes? Et pourquoi manque-t-il à mon côté droit comme une part de moi-même? Bien sûr, voilà pourquoi mon bras ne me répond plus, qu’est-ce que j’en ai fait? Pourtant maman m’a toujours dis de ne pas égarer mes affaires, j’aurais dû l’écouter je crois. Je tombe à genoux, c’est normal mes jambes dépourvues de peau et dont les traces de lacérations font penser à un fauve qui aurait joué avec moi ne peuvent plus me tenir. Je m’effondre, si j’avais encore mes yeux les larmes couleraient sur mes joues ensanglantées.

Mon hurlement a transpercé la nuit comme une lame s’enfonçant dans un corps traversant les chairs, déchiquetant les tendons, brisant les os. Je me lève encore en hurlant, traversant la pièce je me rue sur le miroir qui orne la porte du placard. J’en pleure presque de soulagement, j’ai toujours dix ans, je suis en vie, je suis entier, j’ai mes mains, mes bras, mes yeux, je ne suis pas couvert de sang. Je tombe à genoux dans une prière silencieuse. Plus jamais je ne regarderais de films d’horreurs un soir comme celui-ci. Halloween devrait être un jour pour s’amuser pas pour mourir de peur. Et alors que mon cœur qui s’est emballé lentement semble revenir à la normale, dehors j’entends des hurlements, des cris inhumains, suis-je vraiment réveillé?

Ce texte est une participation originale au concours organisé par la page Facebook “Des mains et des plumes”

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