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Bakchich en Amérique Latine

Publié le 19 octobre 2011 par Vivresansargent

Il est des voyages qui laissent des traces.

J’ai une vingtaine d’années au moment des faits. C’est mon premier grand voyage en solitaire. Après la démission de l’entreprise paternel et quelques mois d’enfer passés à travailler comme un robot sur les lignes de montage de l’usine Valéo, pour mettre des sous de côté, j’aspire au grand air. Je veux du vent, du temps, des champs et des enfants. Le projet est de partir en Equateur (où je suis déjà allé deux ans plus tôt) pour proposer mes services à une association qui s’évertue à arracher de la rue les enfants qui y vivent.

Pour des raisons économiques, j’ai choisi d’atterrir à Bogota et de traverser la Colombie et l’Equateur en bus. Ma destination est Guayaquil, ville du sud-ouest de l’Equateur.

V’la pour la mise en situation du truc (si tu as son truc!). C’est important la mise en situasse. Si t’as pas le décodeur, pas la peine de t’abonner à Canal ! Si t’as pas le ticket, pas la peine de faire la queue, patate ! J’ai voulu faire court, précis, concis, clair, surtout pas un truc pas clair et encore moins un truc pourri de chez Leclerc. J’ai fais comme on m’a dit à l’école (bac + 11, docteur ès mises en situation). Y’en a qui en rajoute des tonnes avant même d’avoir commencé (ça, ça s’apprend à l’école des polissons, pardon…des politiciens).

Trèfle, euh…bref, comme disait Renaud quand il était drôle : « ça suffa comme çi ! »

V’la l’histoire :

Il était une fois (j’te vois ricaner avec mon début d’histoire, c’est pourtant comme ça qu’on commence une histoire enflé ! J’l'ai appris à l’école!). Je reprends. Il était une fois…moi. Je me lève et me bouscule. Il est tôt le matin, je bois le café qui va bien. On trinque avec nos bols, ma belle de l’époque et moi. On fais briller nos dents. On quitte l’appartement. Les manteaux sont fermés hauts, et les cœurs sont à la même hauteur, un peu serrés aussi. Nous arrivons devant la gare d’Angers. Je vois au loin une multitude, composée de ma maman, mon frère et mon pote Arnaud, qui nous attend. On se claque une bise, la brise hivernale fait clac et l’on fume un clop. On échange quelques mots. La maman a la voix qui fait « comme si tout allait bien mais en fait c’est même pas vrai d’abord ». Le frangin me dit de faire bien attention, l’ami reste silencieux et la belle, est belle. Je mets mon sac sur le dos et je me dirige vers l’entrée principale de la gare. Contrairement à ce que l’on pourrait lire dans un roman de gare (pas mieux), je pars et me retourne sans cesse (pourquoi partir sans se retourner, c’est con). Je suis bientôt seul. Nous sommes un mardi, ou peut être un jeudi, au pire nous sommes un samedi, on s’en fout. Il est environ 08h42 quand le train pour Paris s’élance.

Le voyage est rapide (une heure trente minutes en TGV passe aussi vite qu’une heure trente minutes à pied, sauf qu’on est en TGV!). Je soumets le pavé parisien à mes pas. Je plonge sous Paris. Je glisse le long du très long tapis roulant (et rigolo) que l’on est obligé (ou pas, si on veut pas rigoler un peu) de prendre quand on va à Roissy Charles de Gaule, pour quitter la France par les airs (Pour avoir le nom de la station, débrouilles toi, j’suis pas dans le tourisme!).

Passeport (pas ce porc), rayon x, passeport (« non monsieur, pas ce port ! »), café, banquette (de veau), lettre fermée de ma belle dans la poche intérieure de mon blouson, salle d’embarquement, re-banquette, café, sandwich et enfin… embarquement. Il est 16h00 et des seaux (j’avais pas de brouettes) quand je décolle direction Bogota, qui se trouve (comme tu le sais banane !), être la capitale de la Colombie, en Amérique latine ou en Amérique du sud ou plus simplement, là-bas (comme dirait Jean-Jacques).

Dans l’avion, je suis excité comme une jouvencelle qui va à son premier bal sachant qu’elle en reviendra femme. Je regarde les trois films proposés par la compagnie d’une traite, je lis la lettre de ma belle, je la lis encore et encore et encore et, j’ai peur. Où vais-je, que fais-je, dans quelle étagère, comme dirait l’autre.

Après 12 heures de vol, l’oiseau aux ailles d’acier (j’ai lu de nombreux grands romanciers) amorce sa descente. J’ai pas dormi depuis 24 heures mais le jeûne de sommeil ne fait que commencer! Mes pieds dans leur enfer que l’on nomme chaussure sont à 5 sur l’échelle grighhhhtunf (fameuse échelle de 1 à 10 jugeant de l’état général des pieds du voyageur).

L’ami Colombien de Magali (mon contact à Guayaquil) doit m’attendre à l’aéroport de Bogota, comme convenu. Le hic c’est que l’avion a presque 2 heures de retard. J’espère qu’il m’aura attendu. Avant de le retrouver, direction la douane. Je fais la queue, je pense à mes pieds. L’homme devant moi est cerné par deux gros sacs de sport qu’il porte à l’aide de ses mains (pas bête). Quand il ouvre ses deux énormes bagages, des dizaines de paquets de café montrent le bout de leurs oreilles (y’a pas que le nez dans la vie!). Je suis pas douanier mais je trouve ça pour le moins cocasse! Le café et sa forte odeur masque beaucoup d’autres odeurs.Et devine quoi! (essaye! Vas-y! Allez quoi, c’est dans tes cordes!). Et bien, les douaniers tiquent figure-toi, certains triquent, d’autres trinquent! Quel cirque! On me change de file et le sportif est « invité » à suivre un moustachu, apparemment pas très sportif…(le moustachu, grand fou!)

Le temps passe et les questions du douanier me font suer. Je lui dis gentillement que l’on m’attend, que l’avion est arrivé en retard et que le temps presse, ce à quoi il répond par une autre question, le malin. Je dois signaler ici que je me suis procuré un document (bricolages administratifs) signifiant mon statut de séminariste (ou un truc dans l’genre). Trucage me permettant d’obtenir un visa plus long que celui que l’on donne aux touristes. J’ai l’intention de rester un an en Equateur. Le douanier douane (du verbe douaner), c’est normal, il est là pour ça (Il sera là aussi pour ça 2, le retour). Je mens sur mon sort et je m’en sors.

Là-haut, dans le hall des arrivées, il n’y a personne. Les boules. Je file au bureau de change. L’on me tapote l’épaule, je fais volte face, un homme me lance: »Eres Nicolas? » C’est mon homme. Je respire. La première chose qu’il me dit est de retirer la chaîne (en or qui brille) que je porte autour du cou depuis mes 18 ans. J’obtempère et le suis dans son véhicule. L’on traverse la ville à vive allure. Je lutte pour maintenir la conversation, je comprends peu ce qu’il me dit, je suis fatigué. Quand on arrive (en ville) au terminal de bus la trentième heure sans sommeil est fêtée! Rien de grandiloquent, crois-moi: un casse-dalle, un coca, un banc. Le tout offert par mon ami. Il est agréable, un homme bon. Au pied du bus, un groupe d’hommes et de femmes, chargés comme des poneys, attend d’embarquer. Mon guide parle avec un homme. Il me fait signe de le rejoindre. A nouveau j’obtempère, pas chiant. Il fait les présentations. Il s’avère, me dit-il, que ce voyageur va également à Guayaquil. On fera le voyage ensemble. C’est bon, réconfortant. J’achète, ravi. Mon guide (t’as remarqué tyran, que je ne me rappelle plus son prénom!) a consacré toute sa sainte journée pour moi, parfait inconnu. Au moment de se saluer, ma gratitude est non feinte. Chapeau bas l’ami. Il pourrait choper le melon le gars. Il m’inspire, je lui baiserai bien les bottes, moi qui aime le cuir (pas mal hein! J’donne des cours le samedi entre 10h et 11h). Le bus démarre, je flotte entre deux mondes, je plane…

Je suis en confiance, j’ai un ami. La situation est idéale pour commettre une erreur. Devine quoi! Je la commets! Je me sépare de ma banane (pas de commentaires) qui me cisaille le bide depuis trop longtemps, tellement elle est pleine de choses importantes et je la fixe sur l’appui-tête du siège de devant, face à moi mais…loin de moi. On papote, on rigole, je me détends. La situation est parfaite pour commettre une deuxième erreur que, comme dirait France, évidement, je commets: Je m’endors.

Une groseille euh… un cassis (Je suis au sommet! On dit:Femme qui rit, femme au lit. Avec ça, je fais le job. je suis tranquille pour la semaine!) me réveille quand ma tête heurte la vitre. Que vois-je, oh ami lecteur que vois-je! Mon super pote de voisin se fait bouffer les doigts par la fermeture éclaire de ma banane! L’enfoiré!

« J’voulais savoir l’heure » qu’il me dit, le balèze. Je tremble de colère ou de peur, je suis perdu. Je gueule dans le bus un truc du genre: »hfhfiiorpf,ndhhhhh’llojdjjdhhh ! jhfjfklllkm^! ty! « (J’n'étais pas bilingue au moment des faits et c’est ce à quoi devait ressembler ma tirade!)

Je me lève (cette fois c’est lui que je bouscule) et je change de place. J’en cherche une qui soit loin du malfrat et surtout une de libre (c’est mieux pour les 30 heures de voyage qu’ils nous restent). Je trouve mon bonheur. Il n’y a que le chauffeur qui chauffe (il a son permis de chauffer) les autres me dévisagent (pas sûr qu’il se demande mon âge). Je fais profil bas et m’assois.

Je prends possession de ce siège vide en le remplissant de moi. Il déborde. Je sue, je pue, je mue. Je passe de l’état de jeune homme à celui de jeune zombie. Je dois faire peur. J’ai faim. Je lutte contre le sommeil car à présent, je ne suis plus du tout, mais alors plus du tout en confiance. Chacun de mes yeux dit merde à l’autre, mes pieds sont passés à 7,5 sur l’échelle grighhhhtunf! Mon cerveau ressemble à un cerf qui aurait eu un veau comme père! Pourtant je plonge malgré moi régulièrement dans le sommeil (pas question d’utiliser les bras de Morphée comme image, je laisse ça aux écrivains!). L’état désastreux des routes m’aide à rester éveillé et surtout, surtout une autre chose :la musique!

Comment ça la musique! (du moins c’est ce que tu devrais te dire à ce moment du récit si t’étais pas si… toi!) En Amérique Latine, les chauffeurs de bus aiment à diffuser de la musique pendant le voyage. Le notre (de chauffeur, pas le cuisinier qui n’a rien à faire dans cette histoire!) s’avère être un mélomane. Nous avons droit à un flot ininterrompu d’un vacarme sans nom. Le son est pourri, vraiment pourri! Je dois préciser un détail qui, je crois, à son importance. Il n’y a qu’une enceinte pour arroser tout le bus et elle est…juste au-dessus de moi. C’est sûrement pour ça que ce siège était resté inoccupé! Entre les trous, les bosses, la faim, les virages, le stress et les coups de trompette, je dors très peu. Après une quinzaine d’heures le bus stoppe. Nous sommes arrivés à la frontière sud de la Colombie. La frontière, ici, est dessinée naturellement par une rivière. D’un côté la Colombie de l’autre, l’Equateur (une frontière quoi!). Si j’avais su à ce moment là ce qui m’attendais, j’aurais pas v’nu!

Tout le monde descend (seul mon air n’est plus décent). Tandis que le bus est pris en charge par des hommes armés et en uniforme qui ressemblent à s’y méprendre à des soldats, la quarantaine de passagers que nous sommes, traversons le petit pont de bois (je hais cette chanson) à la file Sioux (bien différente de la file Comanches). Je suis le seul blanc-bec. Même au milieu des autochtones, on ne voit que moi. Je n’ai rien à me reprocher mais je suis anxieux. On m’a tellement mis en garde contre tous les dangers qui menacent le voyageur que j’ai peur. J’ai peur que l’on trouve un paquet de poudre dans mes effets qu’un passeur aurait pu glissé dans mon sac pendant mon sommeil. Et ce n’est qu’un exemple parmi d’autres. On m’a mis également en garde contre certains douaniers aux dents longues. On m’a mis en garde contre un million de trucs, en fait.

On arrive dans les locaux équatoriens. Un seul douanier douane (tu connais ce verbe maintenant!). Un passager, un coup de tampon, un passager, un coup de tampon. Petite rengaine. Personne ne parle. Le tampon règne. C’est bientôt mon tour d’être tamponné.

Je souris, je présente mon passeport. Il le prend, il lit le document qui fait de moi un fervent catholique. Il me regarde. Ce moment dure une éternité. Je souris. Il ne sourit pas. Il me tend le papier et me dit : »Ce document n’est pas valable. Sortez de la file! »

Je viens de prendre un coup de boule Zizounesque! Les bras ballants, je regarde les autres passagers. Le « poc » du tampon résonne à nouveau. Eux passent. Je trépasse.

A ce moment du voyage, je suis saoulé. Je ne suis plus en pleine possession de mes moyens. Je suis perdu loin de chez moi, je n’ai aucune expérience de ces moments là. Je suis démuni. Je suis à la merci du monde. Ce monde me tape sur l’épaule. Un homme se présente à moi. Il me demande ce qu’il m’arrive et je le lui dis. Il se propose (gentillement) de m’aider. Je suis si fatigué. Tous les voyants sont au rouge et ma sirène intérieure me vrille les tympans. Je n’ai pas le choix, je le sais. J’accepte son aide. Je sens que ça va être pénible.

Il me dit que le mieux est de retourner en Colombie pour voir si on peut faire quelque chose pour ce document. Au trot nous traversons la rivière. Haletant, nous entrons dans un minuscule bureau derrière lequel se trouve un non moins minuscule fonctionnaire. Mon comparse et lui jactent à tout rompre. Inutile de vous dire que je ne comprends rien (M….e, je viens de le faire!) Je lui tends le papelard dans le coin duquel un photomaton de ma face de gringo est collé. Il écrit trois mots au bas du papier, se lève (et bouscule sa chaise), se dirige vers une photocopieuse à rouleau, qui marche avec de l’alcool. Il glisse le document et tourne la manivelle. La photo bloque. Il arrache la photo. Une fois la photocopie réalisée, il agrafe la photo et me rend le document. Ça sent l’alcool.

Mon comparse m’attrape le bras, j’attrape mon sac à dos et ma gorge attrape froid. Cette fois, nous partons au galop (tant pis si t’aimes pas les images animales!). Il continu de baragouiner, le cul-terreux. Je le suis, groggy. Le gros Guy (si je lui donne un prénom plus latino, je ne peux plus faire mon jeux de mot, patate!) me dit que tout va s’arranger. Je le maudit.

Le cœur battant la chamade, je m’approche à nouveau de mon bourreau, planqué derrière son guichet. Une fois encore il me refuse l’accès à son pays. Je tente une négociation, en vain. « Sortez de la file! » éructe-t-il, le satané!

Il ne reste qu’une poignée de voyageurs, une poignée de « poc ». La panique me prend, que faire si le bus part sans moi! Tout ça prend une mauvaise tournure. Je noircis le tableau, je me vois au fond d’un trou. C’est la caractéristique de la panique. Elle prend tout, renverse tout et ne te retrouve jamais la bonne carte. Elle te fait trois fois le tour et trois fois se plante!

Je suis seul face au monde et ce monde se marre bien!

On tape à mon épaule (jamais deux sans trois, jamais d’œufs sans toit, jamais d’eux sans toi!). Je me retourne. Mon gros ami me chuchote à l’oreille : »Je sais ce que le douanier veut! »

Il me dit de glisser quelques dollars dans mon passeport. Il me dit qu’il va lui parler. II me dit que tout va s’arranger. Il me dit d’autres choses encore, tout un tas d’autres choses que je ne comprends pas car je ne l’écoute plus. Je suis sourd, ma sirène intérieure à eu raison de mes tympans. Je m’apprête à faire ce qu’il ne faut jamais faire en voyage. Je lui tends mon passeport. Je ne souhaite qu’une chose, que ce cirque se termine. Je suis un pantin que des fils invisibles démembre. Mon passeport, garni de quelques dollars, s’éloigne de moi. Le gros Guy (t’as vu, je reste cohérent!) revient, sourire aux lèvres. Sûrement qu’un des billets est maintenant au fond de sa poche. Il me dit que tout est ok. Je lui demande où se trouve mon passeport. « Va au guichet, c’est bon, va au guichet! » glapit-il. Alors devine quoi!  Bien oui, je vais au guichet.

Il n’y a personne au guichet. Ni passager, ni douanier. J’attends un petit peu plus que pas longtemps. Le douanier s’installe, il a mon passeport dans la main (il a autre chose dans la main ce fainéant!). Sans même un regard pour moi, il lève son bras et tâche mon passeport d’un « poc » salvateur. D’un coup mes papiers sont valables. Si ce fumier lisait mes pensées, il me ferait fusiller sur le champ. Je récupère mon bien et je rejoins les autres voyageurs. Il y a un restaurant. La rivière est maintenant entourée de nuit. Il fait froid. A peine ai-je entamé mon assiette qu’un groupe de militaire entre dans le local. Que veulent-ils? Manger, se réchauffer, profiter de la lumière ou bien se farcir le p’tit gringo? Ils se sont sûrement passé le mot les cons. Tout le monde doit être au courant qu’il y a une banque sur pattes dans le coin. Je suis sûr que c’est pas fini, qu’ils vont tous frapper à ma porte. Je suis tellement noué que je regarde mon assiette de riz se refroidir. Il ne se passe rien.

Je reconnais les chauffeurs de mon bus au loin qui fument en riant fort. Je les rejoins et trouve en eux du réconfort. Quelques instants plus tard, je suis installé à ma place. Je continu de faire profil bas. Cette mascarade à durer 3 heures. Il reste tout l’Equateur à traverser, une autre quinzaine d’heures de route. Je n’ai que très peu de souvenirs de cette seconde partie de mon voyage. Je suis dans un état troisième (pire que second). Je suis sale. Je sens mes joues se creuser, mes pieds me trahir et mon cerveau flétrir. Je ne suis bon à rien. Je suis incapable de lire la lettre de ma belle qui se trouve toujours être dans une de mes poches. Je sais que si je la lis, je ne pourrais contenir mes larmes. J’ai les yeux tellement plein d’eau salée que si je clos mes paupières, je pleure. N’y tenant plus, je ferme les yeux et… sale mes joues.

Après environ 70 heures, 18 minutes et 24 secondes de voyage, j’arrive à Guayaquil, terre promise. Par chance nous arrivons dans la lumière du jour. J’arrête un taxi et lui donne l’adresse de l’alliance Française. C’est là que Magalie, la grande sœur de mon pote (celui de la multitude, à la gare d’Angers. Qu’elle me semble loin cette gare, là où je suis.) travaille.

Je frappe à la porte de son bureau. On ne sait pas vu depuis des années mais elle me reconnaît tout de suite. On se salue. Quel moment fort pour moi. Un visage familier est tout ce dont j’ai besoin. En grande voyageuse elle le sait. Elle est chaleureuse.

« T’as l’air fatigué mon pauvre Nico! » me dit-elle, souriante. Je commence à lui raconter mon voyage mais, en femme d’expérience, elle me coupe gentillement:

« Tu me raconteras tout ça plus tard. Pour l’instant le mieux à faire est d’aller te reposer! » Elle me note l’adresse de son domicile sur un bout de papier volant, qu’elle me tends. Je le glisse tout au fond de ma poche et, discrètement, d’un claquement de doigts, je lui brise les ailes pour être sur qu’il y reste. Elle me dit également le prix du trajet en taxi. Elle s’assure que je ne me ferais pas voler. J’apprends.

Une goutte d’eau se faufile derrière mon oreille. Une autre s’échoue entre mes lèvres, je la lape. Encore une goutte puis, une autre. Un tuyau vibre. Une autre goutte. Je frissonne. Une autre goutte. Je baille à m’en décrocher la mâchoire lorsque le pommeau de douche libère, d’un coup d’un seul, mille autres gouttes. Je suis sous un déluge d’eau fumante. Je tourne le robinet, lentement. La température monte. Je tourne encore. Tout va bien. Je tourne encore. L’eau me brûle tendrement la peau. Le savon coule à flots. De nouveau je suis beau, propre comme un sur huit (ou un sou neuf, comme tu veux! Au choix (mais pas trop salé!))

Il me faut peu de temps pour trouver, dans la cuisine, de quoi me restaurer. Je bats 3 gros œufs tandis que rissolent une pomme de terre et un oignon émincés. Quand l’omelette est prête, je la saupoudre d’herbes aromatiques. Oh la suave odeur! Oh le doux moment! Oh le chaud repas! Oh la belle vie! En silence, je dîne (je pourrais t’en tartiner des tonnes à propos de cette omelette mais…je n’ai que 3 œufs!).

Propre et repu, je cherche un lit. Je le trouve. Les draps sont pliés sur le coin du matelas. Je fais le lit. J’enlève le bas. Je me glisse sous le drap, remonte la couverture jusqu’au menton. Je suis au paradis. J’oublie tout.

Qui pourrait me faire croire, après une expérience comme celle-ci que le luxe se trouve dans l’abondance…

Fin.


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