Est-il possible de trouver un lieu qui ne soit pas partisan, un endroit qui tente de construire des ponts, non pas des rêves angéliques et éloignés du réel, mais des amorces de dialogue, aussi difficile soit-il, des efforts pour vaincre la peur, la méconnaissance, la haine viscérale de l’autre ? Ou est-ce être naïf, voire manipulé ? Je n’ai bien évidemment pas la réponse et me méfie plus que tout des fausses bonnes solutions, voyages humanitaires sous l’égide d’un ‘artiste’ tout beau tout gentil ou ‘Musée de la Tolérance’ construit sur un lieu saint de l’autre religion.
Si la pièce du Russe Andrei Molodkin, YES écrit Ɏ€$ et rempli de pétrole, est un peu simpliste, les 'radiographies' du Saoudien Ahmed Mater (Including Evolution of Man) où l’homme portant un pistolet à sa tempe se transforme en pompe à essence (ou vice versa selon le sens dans lequel on les lit), sont porteuses d’un message plus fort, plus complexe et plus universel (en haut).
On peut voir la Coréenne Kimsooja, nomade éternelle drapée dans son voile coloré (Encounter - Looking into Sewing) derrière les Tours d’amour de l’Egyptien Moataz Nasr, chacune pour une religion (de Nasr, aussi, sa carte d’Iraq en allumettes, signe de catastrophe).Le Franco-Marocain Mounir Fatmi
(qui s’est fait critiquer pour sa participation à cette exposition, et a été fort bien défendu) montre une grande projection vidéo où se déclinent les Temps Modernes de Chaplin, repris dans des arabesques calligraphiques qui l’orientalisent (Modern Times : a History of the Machine). Dans un registre similaire, l’Irako-Finlandais Adel Abidin s’appuie sur la rumeur de la dissimulation dans le sigle Coca-Cola retourné, d’un message anti-islamique « Not Mohammad ! Not Mecca ! » : le sigle pourrait donc servir de propagande sur deux registres, commercial et politico-religieux. Mais c'est peut-être au contraire un toast, un salut : "To Mohammad ! To Mecca !" Parmi les autres artistes présents, pour donner une idée de la richesse de cette exposition, citons aussi Martha Rosler, Thomas Hirschhorn, Gilbert & George et Jota Castro, entre autres.Alors, qu’en penser ? Est-ce une récupération de la part de l’occupant, ou est-ce une manifestation de bonne volonté ? Toujours optimiste, je pencherais pour la deuxième réponse, quitte à me faire encore traiter de naïf.
Photo 6 de l'auteur. Mounir Fatmi étant représenté par l'ADAGP, la photo de son oeuvre sera ôtée du blog à la fin de l'exposition.