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Jérôme Sabbagh/Ben Monder/Daniel Humair en fusion au Sunside

Publié le 15 novembre 2011 par Assurbanipal

Jérôme Sabbagh Trio

Paris. Le Sunside.

Lundi 14 novembre 2011.21h.

Jérôme Sabbagh : saxophone ténor

Ben Monder : guitare électrique

Daniel Humair : batterie

La photographie de Jérôme Sabbagh est l'oeuvre du Flamboyant Juan Carlos HERNANDEZ.

 

Jérôme Sabbagh

En regardant l’ustensile qui porte les partitions, je m’aperçois qu’il vient directement du lutrin des églises. Cela ne m’avait jamais assez frappé à ce point. C’est dire le caractère sacré de la musique. En Europe, tout le système d’écriture et de notation musicale vient de l’Eglise catholique, apostolique et romaine.

D’ailleurs, pour commencer le concert, Daniel Humair sonne les cloches sur ses cymbales. Petites notes fermement pincées de la guitare. La voix grave, chaude du saxophone ténor s’élève. Humair est toujours aussi vif, souple, inventif à 73 ans. Il a surtout toujours le désir de se remettre en question avec de jeunes musiciens. Il se passe des choses alchimiques entre la guitare et la batterie. La musique est pesante, sombre comme une menace. Jérôme écoute, yeux clos. Il attend son tour de chant. Le voici en solo. Daniel Humair hoche la tête, yeux clos, écoutant, approuvant. Duo sax/batterie maintenant. Percussions du souffle face à celles des coups de mains. La guitare arrive et ça s’enclenche, se déchaîne même dans une puissance contrôlée. C’est bien trop libre rythmiquement, harmoniquement pour être du Rock’n Roll. C’est du Jazz électrisant. Ben Monder utilise la pédale, des effets électroniques mais sans étaler, abuser. Humair nous fait maintenant le vrombissement de l’avion sur ses tambours. Comme « barman de sons » (Jean Cocteau), il demeure dans les grands créateurs. Le trio se partage entre le psychédélisme de la guitare, le gros son à la Coltrane du saxophone ténor et la fine et puissante dentelle de la batterie. Whahou! Dès le premier morceau, ça défrise les mises en plis. Ils calment le jeu comme un descendeur à l’arrivée dans ses arabesques pour ralentir. Dans le public, un petit sifflement, un silence d’admiration puis les applaudissements.

Un petit air moqueur, sautillant en trio. Une autre qualité de Daniel Humair, c’est qu’il est toujours aussi joueur. Trois individualités fortes, indépendantes qui ne font qu’un, c’est impressionnant, nom d’une pipe en bois. Tiens, la guitare sonne comme une basse. Mais jusqu’où s’arrêteront ils ? Après tant d’agitation, retour au thème gentiment moqueur de départ. De la douceur, de la tendresse après le déchaînement d’il y a quelques instants. Ces hommes sont bien vivants. Ils expriment la diversité de leurs sentiments. Humair est aux baguettes, ferme, solide. C’est somptueusement délicieux comme un mi cuit au chocolat réussi : croquant à l’extérieur, fondant à l’intérieur.

Duo sax/batterie aux tambours pour commencer. Ca  chante, vibre. Avec un ours d’une telle carrure derrière la batterie, il faut être de taille à lutter. Jérôme Sabbagh l’est. Quand Daniel Humair joue ainsi, il semble manier des lanières de cuir, pas des baguettes de bois. Ben Monder ajoute un son subtilement torturé de guitare. Duel guitare/batterie sanglant et cinglant. Ca charge mais ce n’est pas chargé. Le sax vient s’ajouter à la fête des sensations. Humair mène la danse arrêtant, relançant le trio d’un coup de baguette. Ca débouche les circuits internes.

« La fée Morgane », hommage à celle qui enchante Merlin l’enchanteur. Pour la rencontrer, il faut aller dans la forêt de Brocéliande en Bretagne. Bien entendu, pour la voir, il faut y croire. Ecoutons la d’abord. C’est une ballade. Humair fait scintiller les cymbales. Tout se passe comme dans un rêve.

Solo de ténor pour commencer. Humair ajoute de la chaleur aux tambours. Ca s’énerve, tonnerre de Brest ! Ca gronde, plonge, bondit. La lutte est féroce entre ces trois grands fauves.

PAUSE

Pour des raisons personnelles, je suis un peu sonné et il y a école le lendemain. Fin du concert pour moi. Ce n’est pas la première fois que j’écoute ce trio en concert mais je pense ne l’avoir jamais entendu sonner si bien, toujours sur le fil mais ne tombant jamais, puissant mais pas violent, subtil mais pas gracile. Décidément, il faut suivre les aventures musicales de Jérôme Sabbagh de près.

Ci-dessous, ce trio au Sunset le 9 avril 2011. Depuis, ils ont fait bien plus que gravir les marches d'un club de Jazz à Paris. Allez les écouter pour le vérifier.


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