Procès d’après-guerre !
Le cinquième volet de cette excellente série, auréolée du prix de la série lors du festival d’Angoulême 2011, se situe au lendemain de la Seconde Guerre mondiale. Après quatre tomes qui invitaient à suivre le parcours mouvementé de Joseph Joanovici à l’aube de cette guerre et durant l’occupation, Fabien Nury et Sylvain Vallée s’intéressent désormais à la France d’après-guerre, où ceux qui ont joué double jeu commencent à avoir chaud.
Ce sont les efforts d’une mère pleurant son fils qui sont à l’origine de nouveaux problèmes de cet ancien ferrailleur d’origine juive qui s’est c’est construit un véritable empire durant la guerre. C’est en enquêtant sur le meurtre de Robert Scaffa, que Jacques Legentil, juge d’instruction à Melun, va croiser la route de Joseph Joanovici et de ses acolytes. Si cette confrontation face à une justice corrompue n’inquiète pas trop nos « résistants » décorés par la nation, c’est sans compter sur la détermination de ce petit juge de campagne, bien décidé à punir les nombreux faits d’arme de notre ami débrouillard durant l’Occupation.
Malgré la fin de la guerre, la descente aux enfers de Joseph Joanovici se poursuit et la manière dont Fabien Nury confronte ses personnages à leurs actes est une nouvelle fois brillante. Cette enquête permet une nouvelle fois de souligner toute la complexité de ce personnage qui continue de fasciner au fil des tomes. Inspiré du personnage réel, cet immigré roumain qui manœuvre avec grande efficacité au milieu de fonctionnaires, policiers et juges corrompus, est d’une ambiguïté extrêmement intéressante. Enfilant une tenue de résistant au-dessus de son costume de collabo, il doit constamment retourner sa veste et user de sa fortune pour passer entre les mailles du filet. A cheval entre un statut de héros et celui de traître, il perd sa propre identité et les dégâts psychologiques sont de plus en plus visibles. Étalant ses faiblesses et ses qualités, passant de victime attachante à un fourbe cupide et déloyal, ce personnage confronté à ses démons ne laisse pas indifférent et continue de fasciner le lecteur.
Si le développement psychologique du personnage central demeure la pièce maîtresse, le contexte historique joue également un rôle prépondérant dans cette saga. A travers les choix et la destinée de Joseph Joanovici les auteurs mêlent le destin de leur personnage à celui de la France, baignent le lecteur dans la réalité de l’après-guerre et démontrent la complexité de l’âme humaine. L’auteur livre ainsi non seulement un personnage touchant et torturé, mais également une tranche d’histoire des plus intéressantes.
L’autre personnage clé de ce cinquième volet est Jacques Legentil, ce juge que l’on avait rencontré en début de série et dont on comprend maintenant l’acharnement. Le duel judiciaire qui l’oppose à Joanovici s’avère passionnant et les répercussions de l’enquête sur la vie privée des deux meilleurs ennemis sont énormes.
Graphiquement, Sylvain Vallée propose un dessin qui contribue au grand réalisme de l’histoire et un découpage qui témoigne d’une grande maîtrise.
Bref, cette série dont le titre est une sorte de clin d’œil au cultissime «Once upon a time in America» de Sergio Leone, confirme sa qualité au fil des tomes. Dommage qu’il n’en reste plus qu’en à venir !
Une des meilleures séries de ces dernières années !

Lisez également l’avis sur K.BD !