Magazine Culture
Chaque lecteur aura le sien, en fonction de ses goûts et du temps qu'il aura passé à lire des romans de la rentrée. (Ce serait d'ailleurs une bonne idée, de rassembler quelque part les oubliés des prix littéraires, et de faire un anti-palmarès plutôt qu'un Prix des prix.) Le mien, s'il fallait en sauver un seul, serait le roman de Véronique Ovaldé, Des vies d'oiseaux.Un chassé-croisé d'une grande subtilité entre une mère et sa fille puis, au-delà, entre deux couples dont chacune des femmes est l'oiseau. La liberté d'écriture correspond à celle des existences des personnages, et en même temps une densité impressionnante leste ces pages qu'on n'a pas envie de lâcher dès qu'on y a mis le nez. Certes, au début, on a un peu de mal à suivre. C'est volontaire: toutes les données ne sont pas fournies d'emblée, il faut les découvrir petit à petit. Mais cette découverte est un bonheur de chaque instant. Les pistes tracées entre Villanueva et Irigoy, c'est-à-dire entre une cité où prospère la partie la plus favorisée de la population et une campagne réputée encore mal dégrossie, dessinent une toile pleine de possibilités qui se croisent, pour finir par nous rendre prisonniers d'un récit que l'on voudrait ne pas voir finir.J'ai peu lu Véronique Ovaldé auparavant - deux autres romans, je crois: Les hommes en général me plaisent beaucoup et Déloger l'animal, parus en 2003 et 2005. Elle avait, avec ses livres suivants, conquis plusieurs jurys. Celui du Prix France Culture-Télérama avec Et mon cœur transparent (2008). Ceux du Renaudot des Lycéens, du Roman France Télévisions et des lectrices de Elle avec ce que je savais de Vera Candida (2009). Elle n'a pas fini de nous séduire et il faut la découvrir avant qu'elle soit devenue, aux yeux du public, la grande qu'elle est déjà pour ses lecteurs.