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Sur les "révoltes arabes"

Par Alaindependant
Marx au XXIème siècle : sur les "révoltes arabes"

Le 5 novembre, les organisateurs du séminaire " Marx au XXIème siècle, l’esprit et la lettre ", ont invité Mikaïl Barah, directeur de recherche sur l’Afrique du nord et le Moyen-Orient à la Fondation pour les Relations Internationales et le Dialogue Extérieur. Il a livré ses réflexions sur " les révolutions arabes " et la " reconstruction " du Moyen-Orient, sujet brûlant d’actualité dans ce contexte électoral en Tunisie, et au vue de la prolongation des manifestations sur la place Tahrir, malgré les concessions faites hier, mercredi 23 novembre, par l’armée.

En introduction, c’est à une déconstruction des concepts médiatiques tels que " révolutions arabes " ou " printemps arabes " que Mikaïl Barah nous invite. Si, indéniablement, nous sommes face à une rupture, un tournant dans les évolutions que cette région a jusqu’à présent connues, il faut préférer au terme de révolution, celui de " révolte effective ". En effet, l’avenir restant incertain, il est encore trop tôt pour parler de révolution, concept impliquant une réforme pleine et entière, tant du régime que de la structure étatique et des pratiques politiques. Si un processus de transition peut s’observer, marqué par la destitution des gouvernants autoritaires, la Tunisie, la Lybie et l’Egypte, pays les plus avancés dans ces transformations, ne sont pas encore passés d’une configuration à une autre, et les attentes de démocratisation n’ont pas toutes été comblées.

D’autre part, Mikaïl Barah refuse le qualificatif  " arabe " au vu de la diversité des événements et des spécificités propres à chaque pays, d’ailleurs revendiquées comme telles par les manifestants. Il rappelle ainsi à juste titre que, bien que des répercussions soient visibles dans un nombre important de pays, on est bien loin du scénario de tsunami régional qui bouleverserait toutes les situations en place.
Il substitue ainsi au terme trop général de " printemps arabe ", une typologie permettant de conceptualiser les différences entre les différents pays.
En bas de l’échelle se trouvent les pays aux transitions dites " relatives " dans la mesure où elles seront le fait des gouvernants. Relève notamment de ce groupe le Maroc, à la suite de la déclaration du roi Mohammed VI en faveur d’un changement constitutionnel. Si ces évolutions restent relatives, elles viennent rappeler que pour la première fois, les gouvernants du Moyen-Orient craignent pour leur pouvoir et ne se sentent plus protégés par leurs forces armées ou par les alliances qu’ils ont nouées avec des acteurs forts des relations internationales.
Viennent ensuite les pays engagés dans des " transitions de l’incertitude ", notamment la Syrie et le Yémen, pays pour lesquels les chances de réussir la transition s’amenuisent à mesure que le temps passe. A contre-courant des analyses présentes dans la presse, Mikaïl Barah rappelle qu’une partie importante de la population syrienne reste fidèle au gouvernement de Bachar Al-Assad . Si une volonté de changement existe, les syriens ne sont pas prêts à entamer une réforme trop hâtive ou qui servirait le jeu des occidentaux. La prise de position américaine en faveur des manifestants a ainsi largement décrédibilisé ces mouvements.
Formant un groupe à elle seule, celui des pays aux " transitions engagées mais difficiles " vient ensuite l’Egypte. Si le gouvernement de Moubarak est tombé, les frustrations de la population, notamment vis-à-vis de l’importance immuable du rôle de l’armée dans la vie politique, continuent de s’exprimer.
Enfin, la Tunisie et la Lybie relèvent du " scénario de la rupture ", même s’il est encore trop tôt pour présager de quoi la nouvelle donne sera faite.


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