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Nous sommes des monstres

Par Teazine
Nous sommes des monstres Carnage Roman Polanski
Carrière atypique que celle de Roman Polanski, alternant chefs-d'oeuvre et gros échecs. Il avait renoué avec le succès critique et populaire il y a un peu plus d'un an avec The Ghost Writer, un thriller impeccable. Et voilà qu'il fait le grand écart - à 78 ans, c'est pas sérieux - en adaptant une pièce de théâtre comique. 
Carnage reprend Le Dieu du carnage, une comédie créée en 2008 par la française Yasmina Reza, qui a d'ailleurs écrit avec Polanski le scénario du film. Brooklyn, le fils des Longstreet se fait casser deux dents au cours d'une dispute dans un parc avec l'enfant des Cowan. Ces derniers sont invités par les parents de la "victime" afin de discuter de l'incident et de régler cette affaire. Ce qui semble n'être qu'une petite discussion courtoise dégénère pourtant, à notre grande joie. Ne vous fiez pas à la bande-annonce un peu naze qui ne rend pas du tout justice au film. 
Comme au théâtre, le film respecte l'unité de temps et d'espace. Une heure et quart, sans aucune ellipse ou pause, et un seul lieu, l'appartement joliment décoré des Longstreet,  dont on voit quatre pièces : le salon, la cuisine, la salle de bain et le pallier. Bien que cette pièce ait été écrite dans un contexte français, elle se transpose sans problème à New York. La force de Carnage réside bien sûr quasi-uniquement sur ses quatre acteurs. Et quel casting ! Jodie Foster, Kate Winslet (qu'on avait dernièrement trouvée bien pâlotte - sans mauvais jeu de mot - dans Contagion), Christoph Waltz (brillant en colonel nazi dans Inglourious Basterds) et John C. Reilly vont à merveille ensemble et l'on se délecte (carrément) de leurs joutes verbales et de leur progressif passage du bourgeois coincé et courtois au monstre révélant toutes ses frustrations.
Carnage est en fait une vraie satire de la société. L'hypocrisie, le matérialisme, les masques, la bonne conscience qu'on se donne en s'inquiétant pour le Darfour, la prétention, les couples à la dérive, l'art contemporain, la protection des animaux... Au spectateur de choisir de choisir de développer ces sujets ou au contraire se blottir dans l'apparente légèreté délicieuse du film. Quant à la forme, Polanski a l'intelligence d'avoir fait un film court (car le huis clos a ses limites) et d'éviter l'impression "théâtre filmé" en changeant continuellement de plans, pour que l'on ne s'ennuie pas une seconde.
On ne peut s'empêcher de vouloir chercher un petit défaut à Carnage, mais c'est bien dur à trouver. En fait, cela fait bien longtemps qu'on n'a pas passé un aussi bon moment au cinéma. On y retournerait même volontiers, histoire de revoir ses superbes acteurs et pourquoi pas apprendre leurs répliques par coeur. 

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