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Code éthique (1) : présentation

Publié le 03 décembre 2011 par Stéphan @interpretelsf

Je l’évoque régulièrement dans mes billets et nous allons encore souvent le rencontrer. Il convient donc de s’attarder quelques articles sur lui, à savoir, le Code éthique des interprètes/traducteurs en langue des signes française (LSF) élaboré par l’AFILS.

Ainsi, pour juger de la compétence d’un interprète, on peut se référer à trois critères:
- la langue des signes
- les techniques (stratégies) d’interprétation
- la connaissance et la maîtrise du Code éthique.
L’importance de ce dernier est donc fondamentale. Il n’est pas qu’un simple texte théorique encadrant notre profession. C’est aussi un atout pour les interprètes professionnels, une protection qui leur garantit d’effectuer une interprétation correcte et respectueuse dans les meilleures conditions possibles.

C’est à partir de 1970 que le mouvement de reconnaissance de la langue des signes initié par les sourds est accompagné par une volonté de professionnaliser le métier d’interprète (voir historique du métier d’interprète en LSF), d’où la nécessité de réfléchir à l’instauration d’un code déontologique.
C’est ainsi que des interprètes qui travaillaient bénévolement prennent conscience qu’ils sont plusieurs à pratiquer la même profession. Ils décident alors de se réunir et fondent la première association française d’interprètes en 1978, l’ANFIDA (Association Nationale Française d’Interprètes pour Déficients Auditifs) qui deviendra l’AFILS en 1988. A cette occasion sont joints à ses statuts des règles déontologiques qui garantissent la fidélité au message, la neutralité et le secret professionnel.
Les adhérents sont des professionnels rémunérés. Ce code donne pour la première fois un cadre permettant de distinguer l’interprète des autres professionnels comme l’interface de communication, le preneur de notes, le répétiteur ou le médiateur social.

De fait, c’est une réponse au discours d’Arlette Morel prononcé à Albi en 1987 dans laquelle elle reprochait aux interprètes, leur manque de déontologie dans l’exercice de leur métier : elle évoquait la nécessité de mettre en place une formation et une déontologie adéquate.
Selon elle, “ces interprètes estimant avoir une solide expérience de l’interprétation sur le plan pratique… n’éprouvent pas le besoin d’aborder l’interprétation comme un vrai métier c’est-à-dire avec une vraie formation….une formation théorique avec une approche déontologique de la fonction, aussi nécessaire que la maîtrise de la LSF. Dommage car ils auraient ainsi appris à être neutres, à ne pas penser à la place du sourd, en résumé à ne pas être plus sourd que sourd”.

En d’autres termes, pour qu’une situation d’interprétation se déroule de manière professionnelle, l’interprète doit respecter des règles. Cela permet aux interlocuteurs sourds et entendants d’être au cœur de la situation. C’est pourquoi toutes les formations qui délivrent un diplôme d’interprète français/langue des signes française (Master 2) intègrent dans leur cursus de nombreuses heures de cours théoriques et pratiques consacrées à ce Code.

Le Code éthique de l’AFILS se compose d’une partie intitulée “Code déontologique” (titre premier) et d’une partie intitulée “Code de conduite professionnelle” (titre deuxième).
C’est l’ensemble des règles et devoirs auxquels les interprètes membres de l’AFILS doivent se référer dans le cadre de leur activité.
Selon l’AFILS, “la déontologie est un contrat moral passé entre les locuteurs (usagers) et l’interprète garantissant que celui-ci interviendra le moins possible dans les échanges. C’est un engagement à respecter les personnes en présence, leur parole et la langue qu’ils utilisent”.

Voici le texte de ce Code, tel qu’on peut le trouver sur le site internet de l’AFILS, rédigé par Francis Jeggli et Pierre Guitteny.

CODE ETHIQUE

Le présent code éthique définit les conditions d’exercice de la profession par les interprètes membres de l’AFILS.

TITRE PREMIER

Code déontologique

Article 1. – Secret professionnel
L’interprète est tenu au secret professionnel total et absolu comme défini par les articles 226-13 et 226-14 du nouveau code pénal dans l’exercice de sa profession à l’occasion d’entretiens, de réunions ou de conférences non publiques. L’interprète s’interdit toute exploitation personnelle d’une quelconque information confidentielle.

Article 2.- Fidélité
L’interprète est tenu de restituer le message le plus fidèlement possible dans ce qu’il estime être l’intention du locuteur original.

Article 3.- Neutralité
L’interprète ne peut intervenir dans les échanges et ne peut être pris à partie dans la discussion. Ses opinions ne doivent pas transparaître dans son interprétation.

TITRE DEUXIEME

Code de conduite professionnelle

 Article 1.
L’interprète s’interdit d’accepter un engagement pour lequel il n’est pas qualifié. S’il est le seul à pouvoir assurer cette prestation il pourra le faire après en avoir averti toutes les parties concernées.

Article 2.
L’interprète s’engage, dans la mesure du possible, à se former dans le but de répondre aux besoins des usagers.

Article 3.
L’interprète qui exerce une autre activité professionnelle, notamment au sein d’une même institution, doit prendre garde à ce que les exigences de cette autre activité ne soit pas en contradiction avec le code éthique de l’AFILS.

Article 4.
L’interprète doit avoir une présentation appropriée à la situation d’interprétation. Pour le bon déroulement de l’interprétation, il doit veiller à ce que certaines conditions matérielles soient respectées (lumière, placement, etc.).

Article 5.
Conformément à l’article L112-3 du code de la propriété intellectuelle, l’interprète est propriétaire de sa traduction et de son interprétation. Aucune utilisation, diffusion, ni commercialisation de cette dernière ne pourra se faire sans son accord.

Article 6.
L’interprète doit être loyal et solidaire à l’égard de ses collègues. Toute critique sur un collègue ne doit pas être énoncée en public.

Article 7.
L’interprète doit s’assurer qu’il dispose de bonnes conditions de travail. Il doit prévenir son client que des pauses lui sont nécessaires. En aucun cas il ne pourra travailler plus de deux heures sans relais. En situation de conférences, les interprètes travailleront toujours en équipe.

Article 8.
Si l’interprète travaille en équipe, il est en droit de connaître l’identité de son ou ses collègues avant d’accepter un contrat.

Article 9.
L’interprète peut refuser un contrat si, pour une raison éthique et personnelle, il sent que sa prestation ne sera pas conforme au présent code. Le client pourra alors demander une attestation de refus à l’interprète.

Article 10.
Les interprètes qui travaillent ponctuellement bénévolement pour des associations caritatives ou à caractère humanitaire, s’engagent à respecter le présent code et à demander les mêmes conditions de travail que s’ils étaient payés.

Le conseil d’administration peut être interpellé pour tout manquement à ces codes.
Celui-ci, éventuellement aidé d’une commission spéciale nommée à cet effet, statuera sur les suites à donner à toute plainte dans les plus brefs délais. Les sanctions prises par le CA à l’encontre de l’interprète concerné pourront aller jusqu’à sa radiation.

Pour plus d’informations historiques sur la création de ce code déontologique, je vous conseille de lire l’article/chronologie rédigé par Francis Jeggli à l’adresse suivante : http://bit.ly/histoirecodedeonto .

A suivre : le secret professionnel



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