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[Feuilleton] Mont Ruflet d'Ivar Ch'Vavar - 4/41

Par Florence Trocmé

Mont-Ruflet 
poème-feuilleton d’Ivar Ch’Vavar 
4e épisode 
Résumé de l’épisode précédent : À califourchon sur une grosse branche au-dessus de la fille nue, le garçon veut partager l’émotion qu’il ressent, comme lors de sa découverte de la poésie à l’école de Wailly-Beaucamp. 
 
Té, puisque, là haut juché, et la peau de mes cuisses nue 
(C’est la peau qui est nue) d’ores déjà striée  d’égratignu 
Res par l’écorce rude de l’arbre, cette beauté je la perçoi 
S, et bel et bien associée à sa rusticité et sa nervosité, défi   (160) 
Nie par elles, même), donc je remarque que les pieds ne 
Sont pas placés tout à fait sur la même ligne, le droit un 
Peu plus avancé,  et quant au gauche (un peu « rentré ») 
Légèrement en retrait. Et alors je vois que les mains aux 
Longs doigts aussi,  maigres — est-ce qu’elles pendaient 
Seulement le long des cuisses,  ou  elles se crispaient peu 
T-être contre, pressaient leur peau,  sur le côté — tout-à- 
Coup ses deux mains se dressent, à droite, à gauche per 
Pendiculairement aux poignets,  sans que les avant-bras 
Aient bougé, et de là où je suis c’est,  oui,  c’est saisissant   (170) 
J’ai un choc, qui manque de me déséquilibrer :  on dirait 
Que deux petites ailes viennent de pointer,   viennent de 
Naître, d’apparaître au niveau des crêtes iliaques,  et les 
Doigts s’écartent, renforçant ce fantasme, et tout à coup 
(Fantasme pour fantasme)   cette jeune fille est sous mes 
Yeux comme si elle venait d’être plumée  (je tombe pour 
De bon de mon perchoir). 
                                                  Je marche dans les bois, je 
Foule l’humus,   je m’y enfonce,  de vieilles tiges d’orties 
S’enroulent à mes chevilles,   que difficile,  c’est, de prog 
Resser, anormalement difficile, je me déhanche,  il faut ti   (180) 
Rer sur mes jambes ; mes doigts agrippent, tirent   l’étof 
Fe du pantalon,  ils entrent  dans mon  champ de vision, 
Je vois aussi mes pieds et mes genoux,   et tout est blanc  
Gris, gris-blanc comme à la télévision   (j’ai l’impression 
D’être dans un feuilleton) et tel,    à piétiner l’épais tapis  
De feuilles mortes,  tout gigotant,  à voir passer sans trê 
Ve mes pieds et mains,  c’est une angoisse,  se disloquer 
Mes yeux n’ont droit qu’à des bouts de moi,  ils piquent
Pas qu’ils « piquent » dans ce qu’il y a à voir, non, non, 
Peut-être ont piqué  ‒ mais eux sont piqués, et piquants   (190) 
Ils me brûlent,  mais pas tant, je me vois que je ne m’en 
Tends : ahaner, et soufflant. Mais,  je ne m’entends que 
Comme en dedans. Le son s’est comme engoncé ;  c’est 
Un manque d’espace, avec une crasse, en plus,  dans le 
Conduit,   où tu frottes tes manches et les y appuies, im 
Possible de l’éviter.   C’est comme si tu étais dans le pos 
Te (en fait),  ça coudoie, crachote  et c’est plein de stries. 
Écriteau d’orée : DÉFENSE D’ENTRER  (et combien de  
Fois je me suis demandé si derrière cette injonction,   oui   (200) 
L’écriteau est cloué à un gros tronc :   donc, pas faisable 
De voir ce qui pourrait bien se cacher derrière...    s’il ne 
Fallait pas entendre ce message subliminal,   drôlement 
Plus inquiétant :  Entrez, oui...  mais vous ne ressortirez 
Plus)...  Je m’entends trop,  et je me vois si brutalement, 
Trop par à-coups,   louchées et effarements. Bien ! je dé 
Cide d’y aller plus doucement.  « On se calme ! », pour 
Commencer. Il n’y a pas le feu aux lacs  (du braco ! mê 
 
prochain épisode le mercredi 7 décembre 2011 


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