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Safinez Bousbia redonne vie à l’harmonie

Par Mickabenda @judaicine

211043_220985637918876_2882205_nLa bonne humeur – el gusto – caractérise la musique populaire inventée au milieu des années 1920 au cœur de la Casbah d’Alger par le grand musicien de l’époque, El Anka. Elle rythme l’enfance de ses jeunes élèves du Conservatoire, arabes ou juifs.
L’amitié et leur amour commun pour cette musique qui « fait oublier la misère, la faim, la soif » les rassemblent pendant des années au sein du mêmeorchestre jusqu’à la guerre et ses bouleversements.
El Gusto, Buena Vista Social Club algérien, raconte avec émotion et… bonne humeur comment la musique a réuni ceux que l’Histoire a séparés il y a 50 ans.
La sortie du film El Gusto dans les salles de cinéma aura lieu le 11 janvier 2012
Pour accompagner la sortie du film, 2 concerts exceptionnels au Grand REX à Paris le 9 et 10 janvier 2012 . Le CD (la bande originale du film ) sortira le 2 janvier 2012. Le livre El Gusto quand à lui sortira fin février 2012 .
El Gusto est le premier film de Safinez Bousbia, 30 ans, réalisatrice polyglotte de culture cosmopolite. En 2003, à l’occasion d’un voyage en Algérie, elle découvre par hasard le monde des maîtres de la musique chaâbi.
Touchée par les destins de ces musiciens inspirés, elle éprouve le besoin de partager sa découverte en portant leur histoire à l’écran. Elle change alors radicalement de vie et pénètre dans l’univers du cinéma.
Safinez Bousbia a écrit, produit et réalisé El Gusto. Tout en menant à terme ce projet de long-métrage, elle a formé L’Orchestre El Gusto d’Alger. Elle en est devenue la manager et a organisé ses tournées.
Safinez Bousbia a aussi collaboré avec Damon Albar, (le leader de Blur et Gorillaz) pour produire le pre- mier album de l’orchestre, distribué par EMI.
El Gusto a été une grande aventure humaine pour Safinez Bousbia. Les maîtres du chaâbi sont devenus sa famille au cours de ces huit années passées à voyager avec eux au pays du projet El Gusto.
Le miroir et les musiciens
Été 2003, vacances en Algérie. En me promenant dans les dédales de la Casbah d’Alger, je croise le chemin d’un miroitier, Monsieur Ferkoui. Alors que je suis entrée dans sa boutique pour lui acheter un petit miroir, je découvre tout un monde disparu.
Nous commençons à bavarder, il me propose de m’asseoir et me fait partager son histoire : célèbre musicien dans l’Algérie des années 1950, Monsieur Ferkoui fut un pionnier de la musique chaâbi.
Grâce à son récit je découvre cette musique populaire née de la rue et des cafés, imprégnée de chants berbères, andalous et religieux qui s’est im- posée dans la Casbah. Monsieur Ferkioui l’a apprise au conservatoire sous la direction de son fondateur, El Anka.
C’est là qu’il s’est lié d’amitié avec les autres musiciens chaâbi, juifs ou musulmans. Sur les photos qu’il me tend, je découvre leurs visages surgis du passé. Touchée par ce récit émouvant, je décide de partir à la recherche des survivants de cette classe de musique, séparés depuis plus d’un demi-siècle.
Bien que la belle harmonie qui liait ces musiciens juifs et arabes ait été brisée par la guerre et que la musique chaâbi semble avoir sombré dans l’oubli, ils n’ont rien perdu de leurs souvenirs ni de leur pas- sion. Grâce à leurs vivants témoignages, l’Algérie des années 50 – la plus belle époque de la Casbah – reprend vie sous nos yeux et… à nos oreilles. La musique chaâbi se révèle avec son histoire qui nous plonge au cœur de l’Histoire, ses déchirures mais aussi ses heures de bonheur et la joie qu’elle suscite, ce qu’ils appellent « el gusto ».
C’est avec une grande nostalgie que les musiciens l’évoquent, tout en déambulant dans la Casbah pour nous montrer les lieux où elle résonnait sans cesse, si profondément conviviale. Violons, mandolines et ouds s’unissaient aux chants poétiques pour faire vibrer les cœurs et danser les corps.
Mais il me semblait que la mémoire ne suffisait pas et que ces grands musiciens méritaient que leur musique revienne véritablement à la vie. C’est pour cela que je leur ai proposé de se retrouver à Marseille, pour ce qui devait être un ultime concert et qui, finalement, est devenu le premier d’une nouvelle série. Il m’a fallu deux années pour ras- sembler les quarante musiciens de l’orchestre de la première classe de musique chaâbi du conser- vatoire d’Alger éparpillés sur les deux rives de la Méditerranée.
Ensemble, ils sont remontés sur scène, les « papys du chaâbi » pour un concert longtemps attendu qui les plonge dans leur passé commun, si vivant et si présent dans leurs cœurs malgré le temps écoulé.
Un petit miroir mais une grande aventure et une belle rencontre, qui a changé leur vie et la mienne, à tout jamais.


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