La poésie est l’art privilégié entre tous où le temps semble s’arrêter dans la conscience pour laisser au lecteur le loisir de la sentir exploser dans toutes les directions. Elle vit de synesthésies et de perceptions synchroniques, tel un vol d’abeilles qui essaime dans l’imagination multi-dimensionnelle. A ce stade, écrire et lire sont identiques, car le poète est lui-même son premier lecteur. Écriture signifie du même coup lecture. Dès lors, « lire ne consiste pas à répéter le texte, mais à l’ouvrir (…), à le faire éclater en forme d’étoile »1.
Qu’elle soit fictive ou qu’elle recherche l’authenticité et la réalité, la poésie ménage, comme on l’a dit, une pause, une pause active. On y respire librement. Cette libération intérieure qu’elle procure provient non seulement du contenu de l’œuvre d’art, mais de l’attitude que le poète et le lecteur prennent face à elle.
Daniel Frey, Corinne Duvoisin, in Anthologie de la poésie amoureuse allemande, du XIIe au XXe siècle, éd. Septentrion, 2011, p. 355
1 Hart Nibbrig
[choix de Jean-Pascal Dubost]