Dessinent, autour, les enfants
parlent avec les chats, ramassent cailloux et fleurs
le vert est celui lustré et gris de l’olivier.
L’églantine, que je nettoyais des mauvaises herbes
le printemps dernier, est là où je l’avais laissée
donc moi aussi je suis là où j’étais. En ces
jours pour toi de pâques, appliquée
de la caducité des corps désormais je m’habille.
Je la porte dans les prés, à la suite des enfants.
Ils cherchent à présent les roseaux, ils cherchent l’eau par les sentiers,
ils font chaque chose pour de vrai.
Tre cartoline
Le gris de la lumière m’étourdit
et descendre les marches de l’Ara-Coeli
comme si c’était à jamais,
comme si j’allais vers ce sommeil
où nous retournerons inextricablement
– vers une halte, parmi les gradins
que d’autres, en montant, fouleront en moi
Il grigio della luce mi stordisce
e scendere la scalinata di Aracoel
come fosse per sempre,
come verso quel sonno muovessi
dove ritorneremo inestricati
– verso una sosta, fra i gradini
che altri, salendo, calcheranno in me.
Or tu crois qu’il suffirait d’un rien,
s’asseoir à une table libre
au moment propice, et travailler à ses vers,
travailler à ses fragments. Moi je suis faite à l’inverse
de ce non écrire jour après jour ;
dans la sédimentation des petites
choses, et des grandes, je suis
l’âme occupée de leur devenir muettes.
Passants
C’était avant l’aube, et en allant
transpercé tout-à-coup fusait l’air
et très-brillante la faucille lune,
la claire lame des monts. Et nous restions cloués.
Tu vois, te demandais-je, que cette vue
pour moi paraît tremblée, car fragile
je la tiens dans mes mains, et je pleure ; dis-moi,
elle tourne vers nous peut-être, beauté, une prière ?
de combien est-ce don, de combien
est-ce offense aussi bien, peut-être une crête en nous
d’unique lumière luit ?
De cette halte je demande, où je ne distingue pas
si mon ombre ici glissée à terre
est joie ou douleur. Signe de quoi les pleurs.
Traces III
à Rosa Luxembourg
Quelqu’un plus tard la verra sur le pont.
Socialisme ou barbarie, avait répété
avec un léger accent étranger une femme
pendant qu’elle allait parmi les gens du peuple
violet, celui qui a rempli aujourd’hui la place.
Et les jeunes n’ont pas compris sa langue,
qui pouvait discerner a feint de ne pas entendre.
Du pont, maintenant, un instant ultime
sur l’hécatombe des eaux
jusqu’à qui regarde, loin.
traductions inédites de Jean-Charles Vegliante