Un conte sombre et poétique !
C’est sur le site des Humanoïdes Associés que j’ai goûté pour la première fois à cette saga qui me faisait de l’œil depuis tellement longtemps. Ils ont en effet eu la bonne idée de proposer une partie de leur catalogue gratuitement en ligne pendant les fêtes de fin d’année et, même si je ne suis pas trop fan de lectures en ligne, j’ai finalement succombé à la tentation de lire gratuitement le premier tome de cette série. C’est encore totalement sous le charme de ce premier volet que je me suis jeté sur les cinq autres tomes.
Je pensais initialement me procurer l’intégrale de la série, mais en découvrant que l’éditeur avait opté pour une édition en noir et blanc, j’ai préféré m’acheter les six tomes en couleurs. Attention, le dessin de Frederik Peeters n’a nullement besoin de colorisation pour être splendide, au contraire, mais je trouvais tout de même que la colorisation permettait de mieux accentuer les passages entre les différents univers proposés dans cette histoire (la surface industrialisée, le sous-sol peuplé de monstres, l’hôtel, etc…). Bref, j’ai lu les six tomes d’un coup, comme si j’avais lu l’intégrale, mais je l’ai fait en compagnie de ces belles couleurs qui accompagnent parfaitement cette histoire simple, poétique, sombre et efficace, qui séduit dès les premières pages.
Le contraste entre l’univers particulièrement sombre, à la frontière entre le rêve et la réalité, et cette petite héroïne attachante au possible fonctionne à merveille. Tout au long des six tomes de cette saga Pierre Wazem et Frederik Peeters invitent à suivre les aventures incroyables de cette petite ramoneuse aux grands yeux ronds. L’histoire se déroule en effet au sein d’une ville fortement industrialisée, dont les sous-sols sont parsemés d’étranges créatures. Si cet univers n’a rien de réjouissant, le métier de la petite et sa maladie complètent l’atmosphère triste, mais néanmoins poétique. Passant ses journées à ramoner les conduits les plus étroits des nombreuses cheminées de sa ville, Addidas (tel est son nom) est également la proie de crises inexplicables, qui la plongent à chaque fois dans un bref coma. La situation préoccupante de cette petite et la relation très mature qu’elle entretient avec son père contribuent à la rendre encore plus attachante.
Si le récit débute sous des allures d’un conte pour enfants, le ton de l’histoire se durci au fil des pages, tout en parvenant à garder une certaine légèreté, ainsi qu’un côté poétique. Si l’intrigue multiplie les rebondissements, les rencontres et les surprises, il y a malheureusement une scène de torture assez poussée qui dénote totalement avec l’esprit du reste de cette saga onirique pleine de tendresse.
Cette bande dessinée en grande partie muette se lit certes assez vite, mais chaque silence et chaque non-dit s’avère riche en sentiments et les quelques dialogues sont d’une grande justesse et viennent merveilleusement peaufiner la psychologie des différents protagonistes. Tout au long de la lecture, les textes et les dessins se complètent d’ailleurs à merveille. Si le lecteur a parfois l’impression de se perdre dans cet univers onirique métaphorique, ne sachant plus très bien situer la frontière entre le réel et le rêve, il finit néanmoins par saisir le sens de ce scénario original. Il peut alors relire l’ensemble et savourer une nouvelle fois ce récit qui invite à réfléchir sur des thèmes importants tels que la mort, l’industrialisation, la création et le sens de la vie, pour finalement constater que, quoi qu’il arrive, l’homme retombe toujours dans ses travers, croquant à chaque fois la pomme, en avalant le ver qu’elle contient…
Une lecture indispensable !
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