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Au nom du fils – Ciudad Perdida, seconde partie (Perrotin & Belin)

Par Mo

Au nom du fils - Ciudad Perdida, Seconde Partie

Perrotin - Belin © Futuropolis - 2011

Le voyage de Michel en Colombie se poursuit. Où le mènera sa quête ? Retrouvera-t-il Étienne, son fils ?

La route qui le mène à lui semble semée d’embuches. La langue et la méconnaissance de la région freinent l’avancée de l’enquête de Michel. Il est tributaire du bon vouloir des indigènes. Heureusement, où qu’il aille, il rencontre des gens chaleureux qui acceptent de l’aider… une petite compensation pécuniaire permettra parfois de balayer les dernières réticences. Les économies du français se réduisent comme peau de chagrin et malgré les conseils avisés de quelques amis, Michel s’obstine : il ne quittera pas ce pays sans son fils.

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Presque un an – jour pour jour – après la sortie du premier volet de ce diptyque, Serge Perrotin et Clément Belin nous livrent ce second opus… J’attendais avec impatience de découvrir le dénouement de ce périple. On retrouve Michel à l’endroit où nous l’avions laissé en refermant l’album précédent : sur une plage, confortablement installé dans un hamac. Il réfléchit à son parcours, à sa vie et à la quête qu’il poursuit. Seul son instinct le guide. Sans aucunes certitudes, il se laisse guider par son instinct… il a la certitude que son fils est toujours vivant. Est-ce pure folie ?

Au nom du fils – Ciudad Perdida, seconde partie (Perrotin & Belin)
La recette utilisée par les auteurs est la même que préalablement.

A l’aide de quelques ingrédients impeccablement dosés, le lecteur entre progressivement dans le récit, quittant sa place d’observateur pour finir aux côtés de Michel à arpenter les pistes de la forêt tropicale. Comme lui, on est obnubilé par l’idée de rallier Ciudad Perdida (là qu’Étienne a été enlevé), nous sommes convaincus que c’est un endroit incontournable, le “vrai” point de départ de la quête de Michel. Cette immersion progressive dans l’univers fictif, je ne l’ai remarquée qu’au moment de refermer l’album, comme si je me retrouvais projetée dans mon salon alors que l’instant d’avant, j’étais aux côtés des Indiens Kogi.

Ici pourtant, le charme n’opère pas autant que dans le premier album où l’effet “découverte” était total. Le parcours du personnage principal n’en est pas moins crédible, tant au niveau psychique que physique. Il n’hésite pas à se remettre question, ne se leurre pas sur le sens de sa démarche et la réflexion qu’elle lui permet de faire. Une crise de la cinquantaine très finement traitée par les auteurs. Un homme courageux qui accepte ses faiblesses. Un homme qui, loin des appuis sur lesquels il peut habituellement compter (son épouse, ses amis…), fait le bilan de sa vie et du sens qu’il lui a donné.

Je m’attendais à retrouver un personnage confiant (en lui, en sa démarche). En effet, j’avais trouvé qu’il parvenait à prendre facilement ses marques dans ce pays inconnu. Pour quelqu’un qui n’avait jamais voyagé auparavant, la première partie de Au nom du fils nous avait montré que cet homme s’adaptait facilement, comme s’il avait “le voyage dans le sang”. Pourtant, dans ce second album, nous allons le voir déstabilisé. Sans faire le constat d’un échec, il se rend compte qu’il est peu attaché à sa vie telle qu’elle est actuellement. Il ne remet pas en cause les sentiments qu’il a pour sa femme, mais il a l’impression d’avoir traversé son existence comme un automate. Il a mis de côté ses rêves, ses passions, ses convictions… au profit de quelque chose de très conventionnel (métro, boulot, dodo). Nous le découvrons donc en plein tâtonnement, en pleine crise existentielle… chose à laquelle je ne m’attendais pas. Serge Perrotin nous prend donc une nouvelle fois à contre-pied, sème le trouble et fait repartir son récit grâce à une nouvelle donne. Sans jamais s’emballer, cette réflexion est accompagnée par un rythme narratif qui crée peu à peu une tension (peur de l’échec, peut-il se fier à son instinct ?…). Le scénariste met à nu son personnage. J’ai ressenti une réelle empathie pour ce héros et la présence de la voix-off du narrateur y est pour beaucoup, elle donne une profondeur inattendue à cette aventure humaine.

La partie graphique opère le même mouvement. On part des couleurs chaudes du début d’album pour s’enfoncer doucement dans la verdure des paysages de la forêt colombienne. Le vert soutenu des feuillages, la grisaille de la brume, la mélasse brune de la boue… tout cela amplifie l’impression de morosité ambiante et la mélancolie qui s’installe dans l’esprit du personnage. Ce jeu de couleurs opère des va-et-vient permanents (grisaille/chaleur) et permet au lecteur de coller à l’état d’esprit du narrateur. Encore une fois, Clément Belin a réalisé un superbe travail, tout en finesse.

Au nom du fils – Ciudad Perdida, seconde partie (Perrotin & Belin)
Il y a une belle continuité entre les deux tomes. L’histoire aurait pu être publiée sous forme de récit unique cependant, je reconnais que la scission entre les deux tomes m’a permis de mieux profiter de son dénouement : l’attente entre les deux tomes m’a finalement permis de repenser à ce récit et à cet homme. La perception que j’en avais a ainsi évolué tout au long de cette année, j’ai été aidée en cela par les nombreux échanges qui ont été mené çà et là sur la toile (et le fait de faire voyager le tome 1 y a été pour beaucoup).

Michel est un personnage surprenant ; placide, mature, ambitieux… face à une situation qui lui est totalement étrangère, il garde une spontanéité et une ouverture d’esprit étonnantes. Elles servent de base à ce récit qui mêle fougue et raison, curiosité et peur de l’inconnu. Cet homme à la dérive doit son salut à l’amour qu’il porte à son fils. Mais au final : ce récit est-il un rêve ?

Je remercie les Éditions Futuropolis, Clément Belin et Serge Perrotin pour ce magnifique récit.

J’avais présenté le tome 1 ici et je l’avais proposé au voyage : je vous renvoie vers les chroniques de lecteurs chez qui l’album avait fait une halte.

Extrait :

« Je n’arrive pas à quitter Santa Marta. Je suis là depuis un mois, à guetter la moindre nouvelle. Je prends des cours d’espagnol. Je veux comprendre ce qui se dit ou s’écrit. Mais rien. Toujours aucun signe Étienne. C’est à devenir dingue. (…) Je ne peux pas quitter la Colombie. Ce serait comme abandonner notre fils » (Au nom du fils – Ciudad Perdida).

Au nom du fils – Ciudad Perdida

Seconde partie

Diptyque terminé

Éditeur : Futuropolis

Dessinateur : Clément BELIN

Scénariste : Serge PERROTIN

Dépôt légal : janvier 2011

ISBN : 9782754806275

Bulles bulles bulles…

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