Survivre dans un camp de travail
"Arbeit macht frei". Ce slogan du nazisme affirmant que le travail rend libre est aussi inscrit sur des panneaux à l'entrée de leurs camps de la mort. Cette même maxime détournée, les prisonniers de toute l'Europe devront la prendre à leur compte pour pouvoir résister à la cruauté de leurs tortionnaires dont ils se demanderont chaque matin comment ils seront lunés. Chercher par la ruse ou la chance, la foi ou la volonté, à échapper au statut programmé de victime... Après un premier volet remarqué, Robin Walter livre la seconde partie de ce récit basé sur l'autobiographie de son grand père, Pierre Walter, emprisonné de 1943 à 1945 et survivant de ce calvaire. Des extraits illustrés de son journal de Pierre Walter sont publiés à la fin du roman graphique.
La première partie expliquait le destin de cinq protagonistes, allemands ou français, qui se retrouvent tous concernés par le camp Kz Dora près de Buchenwald. Dans ce camp de travail, comme tous les autres prisonniers, les français Paul et Émile sont affectés aux travaux de préparation des fusées V2 destinées à sauver le Reich de la défaite annoncée et tentent de survivre dans des conditions matérielles et morales insupportables. Hans, le SS frustré et revanchard, laisse aller ses pulsions meurtrières sur les russes ou les français, tandis que son collègue Bastian commence à se poser des questions. Quant à l'ingénieur Michael, il assiste à ce drame sans scrupule pour accomplir sa seule ambition : sauver le régime en confectionnant son arme de destruction massive et obtenir une promotion professionnelle.
Contrairement à Triangle rose qui évoque chez Quadrants l'enfermement des homosexuels, l'auteur Robin Walter approfondit le quotidien des déportés dans le camp de Dora ou son sous-camp d’Ellrich, avec ceux qui meurent d'épuisement dans leur sommeil, ceux qu'on pend pour sabotage, ceux qu'on tue par mauvaise humeur, pour blessure ou pour épuisement... Avec ses anecdotes et ses témoignages, cet album sert parfaitement au devoir de mémoire. Il a souvent été difficile pour les survivants d'évoquer l'horreur vécue. Ce diptyque vient combler un manque. Son découpage a progressé en limpidité. Le trait nettement ombré participe à l'ambiance sombre tout en donnant des visages attachants aux héros.
Une belle confirmation.
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Kz Dora - T.2 - de Robin Walter - robin-walter.blogspot.com - Des Ronds dans l'O, collection Histoire - 19 janvier 2012 - 16,00 €