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Emo, entre le cliché et le malentendu

Publié le 22 janvier 2012 par Lcassetta

J’ai vu ou entendu un nombre incalculable de fois des gens s’insulter en se traitant d’emo et j’ai toujours eu l’impression de parler à un mur à chaque fois que j’évoquais ce mot. Il y a beaucoup de clichés, d’incompréhension et de malentendus. Les gens n’essayent pas de comprendre et c’est tout à fait normal. J’ai donc eu envie de faire un article pour en finir une bonne fois pour toute !

Je vous vois déjà venir… Comment ? Un article sur l’Emo dans Lcassetta ? Prenez un grand souffle et essayez d’enlever de votre esprit tout ce que vous connaissez sur l’emo, car justement vous ne le connaissez pas ou très mal. Alors en fait, que veut dire “Emo” au delà de tous les clichés qui lui collent à la peau ? Comment un mot qui, à l’origine est censé désigner un genre musical assez peu connu, est devenu tellement banalisé et repris partout ?

Pour répondre à ces questions, je vais tout simplement vous faire découvrir des groupes, qui chacun à son époque a fait de la musique qu’on a qualifié d’emo. C’est un peu là la première difficulté, parce qu’il est tout simplement impossible de donner une définition claire et précise de ce qu’est l’emo. Aujourd’hui, certains vous diront que c’est un “style vestimentaire”, voire même une “pseudo-philosophie”, sauf qu’à l’origine c’est une musique qui trouve ses racines dans le Punk Hardcore, d’où l’emocore (pour emotional hardcore). Au fil du temps et des époques, l’emo a servi d’étiquette à plusieurs groupes qui ont fait des musiques très divergentes les unes des autres. Chaque période ou sous genre a sa propre définition ainsi que différentes variations. Ce serait assez compliqué d’en parler en détails, donc  je ne ferai que suivre la chronologie des évènements depuis le début de l’emo dans le milieu des années 80 jusqu’à aujourd’hui.

Si l’on devait s’arrêter sur une seule date qui représenterait le début de l’emo, ce serait l’été 1985 influencé par Zen Arcade l’album culte des Husker Dü. Certains groupes originaires de la scène Punk de Washington DC commencent à sortir des sentiers battus en introduisant un song writing parlant d’autre chose que la Politique. Cette dernière était clairement LE sujet dominant dans le Punk à cette période. On se tourne donc vers des choses plus personnelles qui gravitent autour de l’individu et non du groupe, loin de l’univers plutôt machiste et marginal du punk. C’est d’ailleurs probablement de là que vient la réputation “de musique pour tapettes” qui colle à l’emo jusqu’à nos jours. Certaines personnes dans le mouvement Punk n’ont jamais accepté que ce genre soit associé à des paroles et un songwriting intimistes, vu que l’essence même du Punk est protestataire voire rebelle. L’emo introduit aussi de nouveaux sons dans la musique, elle devient moins brutale, moins nerveuse et la voix prend plus de place. Il est à noter que les premiers groupes dits “emo” étaient vraiment issus du Punk avec même quelques figures du genre dont Ian Mackaye chez Embrace ou bien Rites of Spring avec Guy Picciotto. C’était donc une petit révolution qui était en marche et qu’on appellera plus tard la Revolution Summer.

Une multitude de groupes apparaissent dans tout les Etats-Unis, bien que la plupart finissaient par disparaître  en quelques années voire quelques mois. Cependant, le groupe le plus marquant de cette période est très objectivement Moss Icon. Ils donnent à l’emo un nouveau souffle grâce à leur musique plus pausée, des passages “post-rockisan” mais également des moments plus violents. Entre spokens words et chant crié, la musique de Moss Icon influencera énormément, et c’est peu dire, les groupes des années à venir.

Emo, entre le cliché et le malentendu

On distinge généralement 3 vagues de groupes dits emo, même si je ne suis pas tout à fait d’accord avec cette répartition qui réduit l’évolution de l’emo à des courants distincts, alors que mise à part la première vague, qui en est l’origine, toutes les autres avaient des courants différents et parallèles. Au début des années 90′s, l’emo commence à se faire connaitre dans le monde underground et certains groupes se forment pour suivre le modèle des pères du genre. C’est avec ces groupes que l’emo va réellement prendre ses marques, se développer, et surtout se détacher du Punk Hardcore. Il faut dire que si Moss Icon, en tant que précurseurs de l’emo, arrivaient à se distinguer du Punk hardcore, ce n’était pas le cas des autres formations de la même époque qui manquaient d’audace et qui restaient timidement attachées au punk.

Les années 90′s représentent l’époque charnelle. Diverses influences viennent se greffer à tout l’heritage Punk et c’est certainement là que l’appellation emo commence à devenir quelque peu floue. Elle désignera alors des groupes aussi differents que Swing Kids, Indian Summer, Jimmy Eat World ou Sunny Day Real Estate. C’est l’émergence de l’indie emo. On est à la croisée des chemins, les majors ont flairé l’aubaine que pourrait être pour eux le fait de faire signer certains groupes et le genre gagne en popularité. Entre signer chez un major ou rester dans l’indie,  plusieurs formations ne résisteront pas à la pression qu’engendrent ces conflits intérieurs à propos de la direction du groupe. Cette periode marque la disparition de l’emocore tel que l’on le connaissait à ses débuts. C’est la sortie de l’underground qui entraîne l’ouverture vers un nouveau public. L’emo va se scinder en deux genres distincts : D’un coté, le screamo avec des groupes comme Orchid, Saetia ou bien Portraits of Past, qui revendiquent leur penchant plus violent et plus fidèle aux origines idéologiques du punk, même si le screamo finira lui aussi par être mainstream, et d’un autre coté l’indie emo avec des groupes comme Cap’n Jazz, The Get Up Kids, ou American Football.

L’ère est favorable grâce au retour du Rock chez le grand public avec le succès de Nirvana, Green Day ou encore Weezer  dont l’indie emo s’inspire beaucoup. L’emo devient de plus en plus mainstream, ou du moins, des groupes dit “emo” le deviennent. L’un des plus connus est certainement Jimmy eat World, avec Clarity en 1999 suivi directement  en 2001 de Bleed American  avec The Middle, l’un des singles les plus connus du groupe. Cependant, cet album est souvent mal vu par les fans “old shcool” de l’emo car c’est LE premier album “emo” à être sorti sous un label mainstream. C’est donc avec cet album que le genre va se démocratiser lançant les prémisses d’une nouvelle vague d’emo. Bleed americain est un disque trés Alternative Rock qui tranche avec le passé de JEW. Le groupe, pourtant, continue à trainer sa réputation de groupe dit “emo”. Il faut comprendre la confusion  que tout cela crée, At The Drive-In c’est de l’emo ? Thursday aussi ? Et The Promised Ring, Texas Is The Reason, Mineral alors ?  Et puis tout ces petit groupes qui viennent de se former Taking Back Sunday, Brand New, Thrice ? les autres ceux qui arrivent au milieu des années 2000 Escape The Fate, blessthefall, Bring Me the Horizon ? Le contre courant qui se veut loin des paillettes et  du grand public composé essentiellement de groupes screamo; Daïtro, Sinaloa, Raein, Envy, Circles Takes The Square ?

Qui est emo, qui ne l’est pas ? C’est la question que l’on retrouve partout au milieu des années 2000. Dans les forums de discussion affiliés au genre, la meilleure réponse pour moi est celle de Guy Piciotto, un des fondateurs du genre : “… I’ve never recognized “emo” as a genre of music. I always thought it was the most retarded term ever. (…) I just thought that all the bands I played in were punk rock bands. The reason I think it’s so stupid is that – what, like the Bad Brains weren’t emotional? What – they were robots or something? It just doesn’t make any sense to me.” Beaucoup ne sont pas d’accord avec lui, mais la plupart s’accordent à dire que l’emo n’est ni une idéologie ni un style vestimentaire. D’ailleurs cet article a pour seul but d’essayer d’éclairer certains sur un “genre” trés mal connu et trés mal perçu qui, tout comme le metal, la musique electronique, le rap ou l’indie rock (ect…) a constitué une motivation pour énormément de groupes differents, à faire de la musique qu’on a qualifié à tort ou à raison d’emo.

Pour finir, une petite playlist concoctée par mes soins. J’ai essayé de proposer les différents visages de l’emo, même ceux que je n’apprecie pas vraiment. Pour plus de documentation, car il y a encore énormément de choses à dire, je vous renvoie sur deux petits sites un en francais qui est “Le dictionnaire de l’emo” et l”autre en anglais un peu plus connu qui est “You don’t know Emo”.

Emo, entre le cliché et le malentendu
Ali Zarki (Ali Zarki)

Etudiant à l'ESJC. J’écoute de la musique, beaucoup de musique.


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