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[Feuilleton] Mont Ruflet d'Ivar Ch'Vavar - 22/41

Par Florence Trocmé

Mont-Ruflet 
poème-feuilleton d’Ivar Ch’Vavar 
22e épisode 
Résumé de l’épisode précédent : Les corneilles ont croassé. Les sentiers concentriques qui mènent au cœur de la forêt ne l’atteignent jamais. Le soleil se couche-t-il des fois dans les bois ? Découverte d’une population résiduelle qui paraît en savoir long sur la question... 
 
Tournent dans les visages (mufles, hures) et l’engeance 
Terrée à se taire, la marmaille souffreteuse, dolente et é 
Grotante, démangée du derrière, chiards couverts de lé 
Pismes, cloportes, perce-oreilles ;  les vieux qui puent le 
Très vieux fond de gibecière, la brisure de genévrier ou 
Encor la vesse-de-loup rancie (on a le choix) ; et pour fi 
Nir les tristes femelles, à gueuler sans un son, désarticu 
Lées par l’éclampsie...Voilà le peuple qui a vu  (et conti   (1100) 
Nue) ce que nous autres avons cru voir, peut-être, le so 
Leil se coucher au fond des bois... Oh ! nous, c’est dans 
Des livres (tiens! Le Grand Meaulnes) —qu’à rougeoyer 
Entre les lignes, de tels couchants ont embrasé notre im 
Aginaire, et déposé leur braise dans notre mémoire. Ou 
Des récits, contes de fées, fadaises de grands-mères. Ou 
Quoi encore ? Mais nul de nos gens, maîtres, valets, n’a 
Pu voir cela en réalité :  le soleil se coucher dans la forêt. 
Eux (de la race blette et rabougrie) ont vu :  les couleurs, 
Brique, orangé, un rosé, l’écarlate,  puis – en de longs fil    (1110) 
Aments le violâtre, et des mauves,   un vert véronèse sus 
Pect s’intercale. Des jaunes citrins, mais plombés.  Voilà, 
Me direz-vous, les teintes attendues – non ?  Je réponds : 
Oui ; là n’est pas la question. C’est le couchant même, le 
Même couchant que celui  que vous pouvez voir sur des 
Champs, ou à la mer... Mais efforcez-vous de vous rapp 
Eler un seul soleil, précis,  que vous aurez vu se coucher 
Dans les bois, et vous serez surpris. — Vous comprenez 
Maintenant ? Or, eux ont vu, voient et verront des mille 
Et des cents de soleils couchants  au plus profond des es   (1120) 
Paces boisés. Comment ? pourquoi ? Je l’ignore. Il y a là 
Ma foi, un secret, que je n’ai toujours pas pu percer... Et 
Ils l’ont toujours vu sous les branches, le météore  (mété 
Ore... bon, le poète élargit ici un peu – pas mal – l’accep 
Tion du terme.  Mais s’il n’use pas, lui,  de licences poéti 
Ques qui le fera ? Et, « météore »... c’est beau ici, non ?). 
Eh bien, donc (comme eut dit Beethoven en réassénant u 
Ne phrase musicale particulièrement  osée pour l’oreille 
De ses auditeurs) : donc :  Et ils l’ont toujours vu sous les 
Branches le météore,  après des hectomètres de jonchées   (1130) 
De feuilles,  et non dans la tricherie de l’orée  ou au bout 
(Tympan glaireux, trouble opercule) d’une allée  où il se 
Serait comme par hasard encadré. Non, pas le soleil cou 
Ché dans une échappée... mais comme je l’ai dit et répété 
Dans les bois.. Ce dont l’anci.enne tribu seule a jamais é 
Té témoin. Cependant, lui ayant tourné le dos, non sans 
Un certain soulagement (car vraiment, ça n’est guère ra 
Goûtant, de devoir les regarder dans les yeux,  de leur ti 
Rer quelques mots, maigres mots tirés de la bouche, bar 
Billes, pelures de langue)  –  tu leur tournes le dos ils ont   (1140) 
Disparu, et tu retombes dans ton enfer/mement (je, non, 
Je n’ai pas dit que l’enfer me ment, j’ai dit que l’enfer m’ 
Enferme. Non, en vérité j’ai dit,  voulu dire que l’enferm 
Ement est un enfer. Et là je, tu, nous sommes carrément

prochain épisode mercredi 25 janvier 2012


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