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Des Pyrrhus qui s’ignorent

Publié le 06 mai 2010 par Denis_castel

Les marchés financiers, cette sorte de Moloch sans visage constitué des milliers ou dizaines de milliers d’acteurs de l’industrie financière qui décident des investissements et des arbitrages à réaliser, se réveillent et s’inquiètent, enfin et non sans raison, des déficits publics et de l’endettement accumulé par les Etats.

Des déficits et de l’endettement accumulés depuis trente ans, que ce soit en Grèce ou en France, du fait d’une double lâcheté :

Une lâcheté face aux gestionnaires de la dépense publique, aux syndicats de la fonction publique, aux groupes de pression et aux intérêts corporatistes de toute sorte, qui ont obtenu moyens et effectifs supplémentaires, subsides et sinécures,

Une lâcheté face aux impacts largement prévisibles sur les régimes de retraite du vieillissement démographique et de l’allongement de l’espérance de vie.

Et la facilité avec laquelle nos gouvernants ont pu laisser filer les déficits publics et les financer auprès des marchés financiers par le recours à l’endettement n’était pas non plus pour les inciter à cesser de se vautrer dans leur lâcheté et le court-termisme électoral.

Des déficits et de l’endettement démultipliés ensuite par les effets de la crise financière, qui a contraint les Etats à intervenir massivement pour soutenir des économies en situation d’infarctus après la faillite de Lehman Brothers.

Après trois décennies passées à acheter sans barguigner des emprunts de n’importe quel Etat pour investir les derniers excédents des caisses de retraite et l’épargne des contrats d’assurance-vie en euros, les marchés financiers ouvrent les yeux et poussent les Etats les moins vertueux (la Grèce, le Portugal et l’Espagne aujourd’hui ; la France demain quoi qu’en dise 20minutes ?) aux mesures d’austérité que les dirigeants politiques n’ont pas eu le courage de prendre.

Mais, en faisant ainsi la preuve de leur toute-puissance, les marchés financiers ne risquent-ils pas de causer leur propre perte ?

A l’instar d’un vassal dont la richesse et la puissance susciterait l'envie de son suzerain désargenté, et aussi improbable que cela puisse paraître aujourd’hui, il n’est pas du tout inimaginable que les Etats, sous la double pression des opinions publiques (Cf. la crise sociale qui s’amorce en Grèce) et de la contrainte financière, en viennent à prendre des mesures d’exception visant entre autres à durcir la réglementation pour dompter ces marchés.

Et l’arme ultime pour un gouvernement pourrait consister à nationaliser les banques et établissements financiers. La question de l’efficacité d’une telle mesure reste posée, mais chacun sait que les passions humaines s’embarrassent rarement de rationalité.

Et il suffirait de dédommager les actionnaires des banques avec des emprunts d’Etat spécialement émis, voire des titres de rente perpétuelle au taux du livret A. Il y aurait une certaine ironie (pour ne pas dire une justice ?) à voir les actionnaires des établissements qui nous ont placés au bord du gouffre, voire y ont fait tomber quelques charrettes de salariés qui n’avaient rien demandé, devoir se satisfaire d’un intérêt annuel de 1,25 %.

N’oublions pas enfin que les pays actuellement soumis à la pression des marchés financiers sont des démocraties où se tiennent régulièrement des élections, avec toutes les (mauvaises) surprises que cela peut réserver parfois…

PS : Finalement, c’est en Grèce que j’aurais dû situer l’action de « Ras-le-Bol », le scenario y est rigoureusement identique.

Original post blogged on b2evolution.


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