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Catherine Weinzaepflen (anthologie permanente)

Par Florence Trocmé

Ailleurs 
 
le vol sonore 
des perroquets blancs 
au-dessus de ma tête 
j’ai croisé trois Aborigènes 
plus rares encore que 
les grands oiseaux 
et dans les parcs 
d’obscurs abîmes 
entre les troncs tourmentés 
des arbres géants 
 
l’été la nuit 
parterre de lumières 
en étoiles vibrantes 
jusqu’à l’horizon 
le bruit des voitures 
par vagues 
les voix éméchées sonores 
des nightclubers 
torse nu en short 
devant le NeverMind 
 
l’été des ristretto 
Deane me dessine 
un kangourou 
sur la nappe de papier 
(cadeau d’artiste) 
Arturo Belano 
se fait flinguer au Libéria 
il meurt 
page huit cent quarante deux 
je suis en deuil 
 
c’est quoi la pensée ? 
question d’été 
je préfère mille fois 
la pensée poétique 
à la pensée philosophique 
Roberto Bolaño : 
mon roman peut se lire 
comme une agonie 
mais aussi comme un jeu
 
la fiction en vérité 
 
l’été des baskets en chevreau bleu 
comment a-t-elle pu  
appeler sa fille Atlantique  
de la couleur de mes baskets ? 
(plus vert le Pacifique) 
ce quatre août deux mille onze 
tout à coup à Sydney 
une chaleur blanche 
métallique 
venue d’on ne sait où 
 
wherefore, mine eyes, thy silver mists ? 
wherefore, O summer’s day ? 
derrière les collines 
les premières lueurs 
rose pâle et jaune 
ouvrent le jour 
nulle impatience aujourd’hui 
il a posé son iPhone sur la table 
et m’a dit : Écoute le poème du jour 
(c’était Emilie Dickinson ) 
 
sur Oxford street en contrebas 
100 mètres à vol d’oiseau 
le jeune homme en Tshirt bleu 
téléphone dans la main gauche 
main droite sous l’aisselle 
gauche 
ça fait un bras croisé 
Cendrars à Sydney 
qui parle de réalité ? 
 
tout ici est inversé 
l’hiver en été 
les flying foxes la tête en bas 
l’eau happée par le siphon 
dans le sens opposé 
les kangourous qui résistent 
ils ne peuvent pas reculer 
et lorsqu’ils sont agressés 
sont contraints d’aller 
de l’avant et de boxer 
 
 
Catherine Weinzaepflen, extrait de Ode à un kangourou 
 
[choix de Liliane Giraudon] 
 
Catherine Weinzaepflen dans Poezibao :  
Bio-bibliographie,  Le Temps du tableau, extrait 1 


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