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Le Centre d'étude des compagnonnages poursuit son installation en Vaucluse

Par Jean-Michel Mathonière

La Nef de Salomon | Centre d'étude des compagnonnages est une association fondée en 2005 à Dieulefit (Drôme) par Jean-Michel Mathonière, spécialiste de l'histoire des compagnonnages.

Le Centre d'étude des compagnonnages poursuit son installation en Vaucluse

En ce début d'année 2012, elle vient d'être transférée à Avignon, haut-lieu historique du compagnonnage, notamment au travers de la figure d'Agricol Perdiguier (1805-1875), Compagnon menuisier du Devoir de Liberté et député en 1848 et 1849.

Suite:

Les buts du Centre d'étude des compagnonnages

Les compagnonnages de métiers ont largement contribué à la formation du patrimoine culturel français - notamment sur les plans architecturaux, artistiques, techniques et sociaux -, mais leur histoire reste méconnue, tant du public en général que de nombreux spécialistes des diverses disciplines concernées, ainsi que des Compagnons eux-mêmes. Une grande partie des livres disponibles sur ce sujet continue de colporter des généralités, des inexactitudes et des clichés romantiques qui non seulement nuisent à la véritable connaissance du sujet, mais aussi contribuent  à générer des impasses pour la recherche, tantôt en classant ce sujet, en tout ou partie, au rang des salmigondis pseudo ésotériques, dont s'écarteront alors les historiens sérieux, tantôt en laissant à croire que les grandes lignes sont finalement bien connues aujourd'hui et qu'il ne reste pas grand chose à découvrir ou à analyser différemment - ce qui là aussi détournera l'attention de nombreux historiens et chercheurs.

Les découvertes documentaires et les travaux réalisés notamment par Laurent Bastard et Jean-Michel Mathonière depuis une vingtaine d'années, obligent à reconsidérer assez radicalement la question des compagnonnages. Elles mettent au premier plan la nécessité de recourir tout d'abord à ce qui constitue le fondement méthodologique de la recherche historique, à savoir la réalisation d'études monographiques et la constitution de bases de données documentaires fiables car des généralités ne peuvent être clairement dégagées qu'à partir d'une connaissance détaillée. À titre d'exemple évident, les usages des Compagnons tailleurs de pierre du début du XVIIIe siècle sont en partie différents de ceux de leurs héritiers du début du XIXe, après la Révolution et les guerres du Premier Empire, et ils sont encore plus différents - quelque soit l'importance accordée en principe par les Compagnons de tous métiers à la « tradition compagnonnique » - de ceux des Compagnons boulangers de la fin du XIXe. De fait, les trous documentaires que l'on peut constater pour les uns, ne peuvent être bouchés sans risque d'erreur en empruntant aux autres ce que l'on sait d'eux... qui plus est à une époque différente !

On doit également accorder une plus grande importance à la critique des sources, nombre d'entre elles n'étant pas de première main. De même, la dimension plus ou moins initiatique des compagnonnages oblige à une rigoureuse prudence quant à l'utilisation des sources moins objectives que sont les rites et les légendes - sources qui cependant n'ont pas encore été suffisamment étudiées.

L'emploi de « compagnonnage » au singulier, instauré par la publication du Livre du Compagnonnage par Agricol Perdiguier en 1839, est de fait assez trompeur car il tend à laisser penser qu'il existe une unité profonde, tant conceptuelle qu'historique, entre les sociétés compagnonniques dont l'existence nous est actuellement attestée. C'est pourquoi, sans préjuger du résultat des recherches, il semble aujourd'hui préférable d'employer le pluriel : les compagnonnages.

En conséquence des remarques qui précèdent, le Centre d'étude des compagnonnages a pour buts principaux de :

- susciter et animer des recherches sur les compagnonnages de métiers en France, en Europe et dans le monde, ainsi que sur tous les sujets connexes à celui-ci ;
- diffuser et mettre en valeur les résultats de ces recherches ;
- assurer des échanges entre chercheurs ;
- participer à la sauvegarde et à la mise en valeur du patrimoine lié aux compagnonnages de métiers.

L'inscription en novembre 2011 par l'UNESCO du compagnonnage français sur la liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l'humanité vient donner un élan nouveau au travail patrimonial entrepris par le Centre d'étude des compagnonnages.

Le Centre d'étude des compagnonnages poursuit son installation en Vaucluse

On soulignera aussi le fait que l'association est totalement indépendante des sociétés compagnonniques, même si elle entretient avec une partie d'entre elles des liens amicaux et féconds. A fortiori, pour couper court à une confusion fréquente entre compagnonnage et franc-maçonnerie (qui sont deux choses distinctes et différentes, même si elles se réclament d'un lointain passé commun), l'association est également totalement indépendante des obédiences maçonniques, même si son champ d'étude l'amène bien évidemment à entretenir des relations avec des chercheurs travaillant sur l'histoire, la symbolique et les rites maçonniques

Actions du Centre d'étude des compagnonnages

1. - Actualité des recherches

Jean-Michel Mathonière poursuit ses recherches sur les Compagnons tailleurs de pierre, tant à partir de la riche base documentaire avignonnaise (cf. Travail et Honneur, 1996) que sur d'autres territoires géographiques, en France comme, dans une moindre mesure, dans d'autres pays d'Europe et tout particulièrement les anciens territoires germaniques.

La période 2010-2011 a notamment connu quelques belles découvertes documentaires quant à un Compagnon Passant tailleur de pierre avignonnais, Jean-Paul Douliot (1788-1834), dit « La Pensée d'Avignon », qui a été un important théoricien de la stéréotomie et de la construction. Ces premières découvertes, dans des fonds avignonnais, ont donné lieu à une communication de Jean-Michel Mathonière devant l'Académie de Vaucluse, le 9 novembre 2011. Ces recherches se poursuivent maintenant en direction d'autres fonds d'archives, tant privées que publiques.

La fin de l'année 2011 a vu l'entrée dans les collections d'une série de 60 épures de stéréotomie réalisées en 1858-1859 par un Compagnon Étranger tailleur de pierre, Eugène Lyon, originaire du Barroux (84). Cette série offre un double intérêt : d'une part, elle vient prolonger la série des épures du Compagnon Passant tailleur de pierre Jean-Jacques Laurès, réalisées dans les années 1839-1841 et conservées depuis 2006 par le Centre d'étude des compagnonnages ; d'autre part, elle illustre concrètement l'importance du Traité spécial de coupe des pierres (1826) de Jean-Paul Douliot, utilisé jusque par les Compagnons du rite adverse.

La collection des épures de Jean-Jacques Laurès, dit « La Tranquillité de Caux », a fait l'objet au cours des années passées d'une étude fondamentale par Jean-Pierre Bourcier, qui les a toutes analysées et retracées selon les méthodes actuelles. Il en résulte un volumineux travail qui sera, nous l'espérons, rendu accessible au public dans le courant de 2012, via le site internet.

D'autres recherches sont en cours sur l'histoire des compagnonnages de menuisiers et sur d'autres corps de métiers. Si l'étude des compagnonnages de tailleurs de pierre reste l'action la plus importante -  puisque c'est de là qu'est née notre dynamique de recherche -, c'est bien l'ensemble des métiers ayant connu une organisation à caractère compagnonnique qui retient notre attention.

2. - Ressources documentaires

L'année 2012 doit voir l'établissement d'un catalogue informatisé des ressources documentaires dont dispose le Centre d'étude des compagnonnages. Ces ressources, localisées à Avignon, seront accessibles sur demande aux chercheurs.

3. - Mise en valeur du patrimoine compagnonnique et communication

Les expositions

Depuis 2006, l'association s'est plus particulièrement investie dans la réalisation de nombreuses expositions, allant ainsi au devant du public :

2006 : première édition de « Stéréotomique ! », au Poët-Laval (26).

2007 : seconde édition de « Stéréotomique ! », à l'abbaye de Corbigny (58).

2007 : « L'Outillage traditionnel du tailleur de pierre », à Crupies (26).

2007 : « Bâtisseurs d'antan », à Bourdeaux (26).

2007 : « L'Ordre règne chez les maçons », épure d'une exposition consacrée aux Règles pour les cinq ordres d'architecture de Vignole (1507-1573), à Dieulefit (26).

2007 : troisième édition, en "grand format", de « Stéréotomique ! », à la Cité des Métiers et des Arts à Limoges (87).

2008 : seconde édition de « L'Ordre règne chez les maçons », au musée du Compagnonnage de Tours (37).

2010 : « Secrets de Compagnons », en partenariat avec les sièges de l'Union Compagnonnique de Toulon et de Vernègues, au château de La Tour d'Aigues (84).

2010 : « Stéréotomique ! », trois nouvelles éditions au château des Rohan à Saverne (67), à la collégiale de Saint-Gaudens (31) et à la galerie de l'Hôtel de Manville aux Baux-de-Provence (13).

2011 : septième édition de « Stéréotomique ! », au château de Saumane-de-Vaucluse (84)

Télécharger gratuitement l'album rétrospectif des expositions 2006-2011.

Le Centre d'étude des compagnonnages poursuit son installation en Vaucluse

Site internet et blog

Dès 2003, J.-M. Mathonière a créé un site internet www.compagnonnage.info dont la première mouture fut presque aussitôt classée au Top 10 des pages perso Wanadoo.

Depuis 2007, le blog www.compagnons.info est adossé au site et il en prend peu à peu le relais. Plusieurs contributeurs réguliers l'enrichissent chaque semaine de photos, d'articles et de commentaires, jetant ainsi les bases d'un véritable travail d'inventaire du patrimoine compagnonnique ainsi que du patrimoine stéréotomique (plus de 560 articles fin janvier 2012).

L'ensemble des deux sites reçoit actuellement une moyenne de 10 000 visites par mois.

Conférences

De nombreuses conférences sont proposées sur l'histoire des compagnonnages en général comme sur celle des Compagnons tailleurs de pierre, ou encore sur les rapports complexes entre compagnonnage et franc-maçonnerie. Dans ce cadre, outre ses conférences en France, Jean-Michel Mathonière s'est rendu en 2010 en Espagne, en 2011 au Portugal et en Allemagne ; en 2012 sont déjà programmées, entre autres, une nouvelle intervention à l'Institut d'études françaises de Sarrebruck (Allemagne) et une communication à un colloque sur le patrimoine culturel immatériel organisé par la Cité internationale de la tapisserie et de l'art tissé à Aubusson, les 28 et 29 juin.

Publications

Le Centre d'étude des compagnonnages a repris l'enseigne éditoriale créée en 1993 par Jean-Michel Mathonière, La Nef de Salomon. Ont été publiées sous cette enseigne des études sur les compagnonnages de métiers et les sujets connexes. La diffusion en librairies de ces publications n'est actuellement plus assurée, mais il est possible de se procurer ces ouvrages via notre site internet.

Rappel des principaux titres :

Le Centre d'étude des compagnonnages poursuit son installation en Vaucluse

Laurent Bastard et Jean-Michel Mathonière : TRAVAIL ET HONNEUR ; les Compagnons Passants tailleurs de pierre en Avignon aux XVIIIe et XIXe siècles. (Cliquer sur le titre pour accéder à la notice et commander le livre.)

Le Centre d'étude des compagnonnages poursuit son installation en Vaucluse

Jean-Michel Mathonière : LE SERPENT COMPATISSANT ; iconographie et symbolique du blason des Compagnons tailleurs de pierre. Précédé de Compagnons du Saint-Devoir et bâtisseurs de cathédrales. (Cliquer sur le titre pour accéder à la notice et commander le livre.)

Par ailleurs, Jean-Michel Mathonière publie régulièrement des articles et des travaux dans diverses revues d'érudition.

Les projets du Centre d'étude des compagnonnages

Outre la poursuite des travaux de recherche engagés ainsi que des expositions et conférences, nous projetons dans les trois années à venir de travailler plus particulièrement sur les points suivants :

- établir le catalogue informatisé des ressources documentaires ;
- refondre complètement le site internet et le blog, pour y inclure des bases de données et davantage de ressources documentaires ;

- regrouper davantage de chercheurs et élaborer des programmes de recherche plus ambitieux (en partenariat avec diverses institutions) ;
- redémarrer l'activité éditoriale en la recentrant plus étroitement encore sur les compagnonnages, et en établissant des partenariats avec d'autres éditeurs pour ce qui relève de sujets élargis ;
- se doter de structures plus importantes (et par conséquent d'un véritable budget de fonctionnement) et notamment disposer de véritables locaux. Le stockage des expositions temporaires entre deux de leurs montages devient en effet problématique, et il serait intéressant de faire en sorte qu'au moins une partie des objets et documents exposés restent visibles, plutôt que dans des caisses entreposées dans une remise... À cet égard, des contacts ont été pris pour investir un lieu patrimonial (en harmonie avec les sujets que nous étudions), soit en Vaucluse, soit dans une région proche d'Avignon, mais il reste à avancer en ce sens.

En attendant, un échange de bons procédés avec la Fédération Compagnonnique des Métiers du Bâtiment d'Avignon nous permet de disposer d'un bureau dans leurs locaux du 37 rue du Four de la Terre, en plein cœur de la cité des papes, dans un magnifique hôtel particulier de la fin du XVIIe siècle qui abrite de nombreuses maquettes (chefs-d'œuvre) réalisées par les Compagnons. De la sorte, il est désormais possible, sur rendez-vous (nous contacter par courriel), de visiter ce lieu important du patrimoine architectural avignonnais, de découvrir en même temps la Fédération Compagnonnique des Métiers du Bâtiment et d'établir un contact avec le Centre d'étude des compagnonnages.

Le Centre d'étude des compagnonnages poursuit son installation en Vaucluse

L'homme pense parce qu'il a une main. Anaxagore (500-428 av. J.-C.)


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