Magazine Info Locale

« Le court-termisme, plaie de notre temps »

Publié le 27 février 2012 par Gezale

Une des premières mesures que devrait prendre un véritablegouvernement de gauche à son arrivée au pouvoir serait d’interdire, dans tousles médias publics généralistes, la diffusion horaire des bulletins de la Bourse.Ce serait-là, avec la confiscation de TF1 (1), une des premières mesures desalubrité publique.La production, heure après heure, des cours de la Bourse,contribue largement à entretenir un stress collectif. Comme si nos vies, nosbonheurs comme nos malheurs, étaient suspendus à l’appréciation ou à la dépréciationdu cours de l’action de telle ou telle société du CAC 40. Ou encore de l’indicede telle ou telle université privée américaine basé sur la confiance qu’aurait danssa cuisine je ne sais quelle ménagère de moins de cinquante ans au fins fondsde je ne sais quel État.Comment a-t-on pu en arriver là ? Comment a-t-on pu accepterque le capitalisme financier procède à une telle effraction quotidienne et permanenteet parvienne ainsi à nous aliéner ? Comment peut-on tolérer cettedictature permanente des marchés ?
On nous objectera qu’il en est ainsi parce que nous sommesdans un monde en compétition, et que, puisque les États-Unis sont en cela ceuxqui montrent le chemin, nous ne pouvons faire autrement qu’eux. Parce qu’ilsont adopté pour leurs retraites, le système des fonds de pension, c’est à eux qu’importetant d’être rassurés, heure après heure, pour savoir si le mois ou l’anprochain, leur retraite leur sera versée. Rappelons-nous au passage qu’il était,en 2007, dans les projets de Nicolas Sarkozy, d’en finir avec notre système deretraite par répartition. La faillite de Lehman Brothers, en 2008, et la ruinede milliers de pensionnés ont permis de mettre en lumière la précarité et la cruautéde ce système. Il n’y a cependant pas renoncé pour autant.Ce système est absurde. Car ces fonds de pension, présentsdans le capital de la plupart des entreprises n’ont d’autre finalité que detirer de ces mêmes entreprises un profit maximum. Quitte à les saigner à mort.Qu’importe, elles iront ensuite ailleurs pour chercher d’autres proies.Dès lors, il devient évident que les stratégies desindustriels et celles des fonds de pension sont totalement incompatibles. Pourse développer, une entreprise a besoin de stabilité, de temps. Elle a besoin d’investirà moyen et à long terme, dans la recherche, dans les machines, dans les hommesafin de constituer des équipes solides et efficaces. Toutes choses que luiinterdisent la vision exclusivement court-termiste des fonds de pension. Ilsexigent en permanence des prévisions au jour le jour, des annonces de résultatstous les trois mois, des rendements financiers annuels qui en une quinzaine d’annéesont passés de 3 à 4% à 12, 15, quand ce n’est pas 20%.Ce système des fonds de pension, intrinsèquement lié aucapitalisme financier, est une des principales causes de la destruction desemplois industriels des pays occidentaux. On le voit clairement se manifesterdans les ignobles licenciements boursiers. C’est la forme la plus aboutie et laplus stupide du court-termisme.Ceci étant posé, on comprend bien qu’il serait vain d’espérervouloir faire changer les choses sans prendre les moyens politiques de s’affranchirdu court-termisme. Si nous voulons, comme cela est indispensable, transformernos modes de production et d’échange afin de prendre le virage que nousimposent la sortie des énergies carbonées, l’arrêt du gaspillage des ressourcesnaturelles de la planète et le problème immense du réchauffement climatique, ilnous faut du temps pour cela. Du temps pour mettre en place ces politiques d’intérêtgénéral. Du temps pour que s’opère le basculement entre le système actuel deproduction, basé sur l’offre, et un nouveau système basé sur la demande. Dutemps aussi pour réaliser la transition énergétique.Au Front de Gauche. Cette politique porte un nom. Elle s’appellela planification écologique. Elle a vocation à organiser cette bifurcation. Seulela puissance publique a la capacité d’orienter sur le long terme de tels choix.Sans la planification que détestent bien entendu les libéraux, et sans leconcours de l’État – des États –, comment aurait-il été possible de construirenos industries aéronautique, spatiale, ferroviaire, et de les hisser au premierplan mondial ? Aucun industriel privé n’aurait jamais pris le risque derelever un tel défi. Mais pour cela, il faut d’abord rompre avec la logique ultralibéralecourt-termiste du capitalisme financiarisé. C’est à lui qu’il faut s’attaqueren premier. Plutôt que de lui donner des gages, il faut se donner les moyens dele combattre.ReynaldHarlaut(1) Billet du 1er octobre 2010, sur ce blog :« Confisquer TF1 à Bouygues »

Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Gezale 7337 partages Voir son profil
Voir son blog

l'auteur n'a pas encore renseigné son compte l'auteur n'a pas encore renseigné son compte

Magazine