A propos d’En terrains connus de Stéphane Lafleur 3 out of 5 stars
Francis La Haye, Fanny Mallette
Dans la banlieue de Montréal, en plein hiver, le quotidien de Benoit et Maryse, deux frère et sœur, est bouleversé par une série d’incidents étranges…
Par endroits, En terrains connus (qu’on peut lire avec un jeu de mots comme « en terre inconnue ») évoque le récent Curling de Denis Côté. Mais chez cet autre cinéaste québécois, l’étrange avait un côté plus sombre et un goût de polar noir que n’a pas En terrains connus.
Cela n’enlève rien aux qualités du second long-métrage de Stéphane Lafleur, qui partage avec Curling le silence des personnages, la même lenteur propice au burlesque dans la mise en scène, le même goût pour l’incongru et cette capacité à décrire précisément, avec humilité et des moyens cinématographiques simples la tragédie de deux êtres aussi paumés l’un que l’autre. L’humour et la distance de Lafleur permettent de ne pas tomber dans le glauque ni le sordide mais de rester profond.
Benoit est un quasi quadragénaire oisif qui vit encore chez son père. Convaincu d’être un loser et de « transformer tout ce qu’il touche en merde », il vit dans une déprime permanente que renforce sa liaison infructueuse avec une femme divorcée vivant avec un enfant qui le déteste naturellement.
Avec humour et un sens incontestable de la dérision, Lafleur traduit bien le sentiment de vacuité qui mine ses personnages. Tout aussi « mêlée » (traduction du québécois : perdue) que son frère, Maryse assiste impuissante, à l’usine où elle travaille, à l’accident d’un ouvrier qui s’est gravement entaillé le bras. Cet accident traumatisant lui fait prendre conscience qu’elle vit avec un homme qu’elle n’aime plus peut-être…
Voilà deux êtres en pleine dépression à l’approche de la quarantaine. Deux êtres dont Lafleur décrit bien les destins parallèles, avec un art subtil de la transgression et un goût prononcé pour l’absurde et le loufoque. En terrains connus n’est pourtant pas une comédie où l’on rit à gorge déployée. Au contraire, on ne rit pas vraiment. Mais ces personnages ont quelque chose de touchant dans leur côté paumé pour Maryse, immature et inadapté à la société pour Benoit.
Il y a une dimension saugrenue dans le film qui vient aussi de son côté pseudo science-fiction. Les compositions de Strobl participent largement à l’étrangeté et l’atmosphère surréaliste dans laquelle baigne En terrains connus. Un homme débarque chez Benoit et prétend venir du futur en annonçant la mort prochaine de Maryse dans un accident de voiture.
L’annonce de cette catastrophe imminente, par son côté irréel, rapprochera le frère de sa sœur de manière inattendue et leur redonnera goût à la vie tout comme pour le spectateur, envie de revoir ce genre de film…
http://www.youtube.com/watch?v=NpwoDMZQ7JQ
Film canadien (Québec) de Stéphane Lafleur avec Francis La Haye, Fanny Mallette (01 h 28).
Scénario de Stéphane Lafleur et Valérie Beaugrand-Champagne : 3 out of 5 stars
Mise en scène : 3 out of 5 stars
Acteurs : 3 out of 5 stars
Dialogues : 2.5 out of 5 stars
Compositions de Strobl : 3 out of 5 stars