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Fukushima, un an déja… Une catastrophe pour rien ?

Publié le 06 mars 2012 par Mister Gdec

Fukushima, un an déja… Une catastrophe pour rien ?Arrêter d’urgence le nucléaire avant un Fukushima en France

  Par Stéphane Lhomme
Président de l’Observatoire du nucléaire

Mardi 6 mars 2012

 Ce dimanche 11 mars 2012, cela fera exactement un an que la catastrophe nucléaire de Fukushima aura commencé. Nous disons bien “aura commencé” et non “aura eu lieu” car, comme pour celle de Tchernobyl (qui a commencé le 26 avril 1986), le drame de Fukushima va continuer pendant des décennies et ses conséquences vont s’aggraver pendant des siècles, des millénaires.

Pendant 25 ans, le lobby nucléaire a prétendu que Tchernobyl était “une catastrophe soviétique” et que la même chose ne pouvait se produire dans les pays dits de haute technologie comme les USA, la France, le Japon, etc.

Or c’est bien dans un de ces pays que le pire s’est produit. Qui plus est, le Japon était présenté comme le pays le plus en pointe sur le plan technologique, mais aussi par rapport à la prise en compte du risque sismique.

Il est donc démontré – pour ceux qui en doutaient encore – qu’une nouvelle catastrophe nucléaire peut se produire à chaque instant partout où se trouvent des réacteurs nucléaires, et donc particulièrement en France où il y en a hélas 58 en service.

Un réacteur nucléaire est toujours dangereux, même tout neuf. Mais ce risque s’aggrave encore avec le vieillissement. Or, en France et dans le monde, la grande majorité des réacteurs sont anciens, ayant déjà fonctionné pendant 25 ans, 30 ans, 35 ans, parfois plus de 40 ans dans certains pays.

La catastrophe de Fukushima a porté un coup fatal à l’industrie nucléaire qui va avoir le plus grand mal à construire de nouveaux réacteurs, à part dans des dictatures (comme la Chine) ou des pays dont la démocratie est de pure forme (comme la Russie).

De fait, pour survivre, l’industrie nucléaire a décidé de prolonger quasi indéfiniment la durée de vie des réacteurs actuellement en service.

Ainsi, en France, il est question de faire fonctionner les réacteurs au delà de 40 ans d’âge, voir jusqu’à 60 ans ou même plus. Le plus incroyable est que EDF doit en réalité obtenir de l’Autorité de sûreté nucléaire l’autorisation de faire fonctionner les réacteurs au delà de 30 ans.

Mais la dite “Autorité” de sûreté a si peu d’autorité et d’indépendance que cette autorisation est déjà considérée par EDF comme acquise, et que les discussions portent déjà sur les 40 ans ou plus. Bien sûr, les citoyens n’ont aucun mot à dire dans cette affaire… alors que ce sont bien leurs vies et celles de leurs enfants qui sont en jeu. Le nucléaire ne nuit pas seulement à l’environnement mais aussi, gravement, à la démocratie.

Le risque de catastrophe nucléaire est donc plus élevé que jamais en France, et ce ne sont pas les mesures dites “post-Fukushima” qui feront cesser ce risque : d’abord, il faudra des années avant qu’elles ne soient mises en place. Et, de toute façon, d’innombrables scenarios imprévus peuvent se produire, qu’il s’agisse d’évènements naturels (séisme, tsunami, tempête, canicule, gel, etc) ou d’erreurs humaines.

Car, il ne faut jamais l’oublier, les centrales nucléaires sont conçues, construites, exploitées et entretenues par de simples humains dont la première caractéristique est d’être faillibles. Une centrale nucléaire a vocation à causer tôt ou tard une catastrophe. La seule solution de bon sens reste donc de stopper au plus vite et définitivement les installations atomiques.

On nous dit que c’est impossible, ou alors que cela prendra des décennies. Mais, au Japon, il ne reste à ce que jour plus que 2 réacteurs nucléaires en service, sur un total de 54 qui fonctionnaient avant le 11 mars 2011. Et, sous peu, ces deux derniers réacteurs seront eux aussi arrêtés : le Japon fonctionnera bientôt avec 0% de nucléaire. C’est donc possible en France aussi !

On nous répond que ce qui est faisable au Japon, où le nucléaire ne couvrait “que” 35% de l’électricité, est bien plus difficile à réaliser en France où ce pourcentage est de 75%. Cet argument se retourne comme une crêpe : les japonais sont 130 millions, exactement deux fois plus nombreux que les français : il est donc deux fois plus facile d’alimenter sans nucléaire 65 millions de français que 130 millions de japonais !

 On nous rétorque que l’électricité est alors produite par des centrales thermiques émettant des gaz à effet de serre. Mais ceux qui argumentent ainsi sont précisément ceux qui, à la tête des institutions ou des grandes entreprises, ont empêché le développement des énergies renouvelables et des économies d’énergie. En réalité, ces gens ne se préoccupent d’environnement… que pour promouvoir le nucléaire, qui est lui-même une calamité environnementale.

  D’ailleurs, les pays nucléarisés sont aussi les plus gros émetteurs de CO2, Chine et USA en tête : si l’option nucléaire permettait de sauver la planète ça se saurait, et certaines villes n’en auraient pas payé le prix fort, de Tchernobyl à Fukushima sans oublier Hiroshima et Nagasaki.

  Réduire les émissions de CO2 se fera donc (ou ne se fera pas) sans lien avec la question du nucléaire : ce dernier ne couvre que 2% de la consommation mondiale d’énergie, une part infime et en déclin… mais qui s’accompagne d’un risque gigantesque. Il  est donc parfaitement absurde de continuer avec le nucléaire.

 D’ailleurs, l’exemple nous est donné par nos voisins qui ont décidé d’en finir avec l’atome ou de ne pas y recourir. Belgique, Allemagne, Luxembourg, Suisse, Italie, Espagne : nous sommes cernés ! Comble de l’ironie, ce sont ces pays qui, pendant la vague de froid de février, ont sauvé la France de la pénurie en lui vendant d’immenses quantités d’électricité : piégée par l’option absurde “nucléaire + chauffages électriques”, la France atomique est dans l’impasse.

Nous avons eu beaucoup de chance jusqu’à présent, mais ce ne sera probablement pas le cas indéfiniment : un Fukushima en France peut avoir lieu à chaque instant. Les principaux candidats à l’élection présidentielle ne semblent pas l’avoir compris. Certains restent radicalement et obstinément pronucléaires, à commencer par le “candidat-président”. Quant à son challenger socialiste, il ne fait guère mieux en annonçant pour le mandat 2012-2017, s’il est élu, la fermeture des deux réacteurs de Fessenheim (d’une puissance cumulée de 1760 MW)… quasiment compensée par la mise en service du réacteur EPR de Flamanville (1650 MW).

Chacun a pu constater que, en période de crise économique, les questions écologiques passaient au second plan, voire même disparaissaient du débat public. Et, lorsque le nucléaire est abordé, c’est à nouveau dans la cadre de batailles de chiffonniers à propos du prix de l’électricité, de l’emploi, de la supposée indépendance énergétique, comme si toutes ces questions n’étaient pas définitivement balayées par l’imminence d’une catastrophe.

Il faut croire que seul un désastre nucléaire en France permettrait enfin la prise en compte réelle du problème. Les opposants à l’atome sont parfois accusés – c’est un comble – de souhaiter un tel drame pour que leurs thèses soient démontrées. Mais Tchernobyl et Fukushima n’ont pas été causés par les antinucléaires ! Ce sont bien les promoteurs de l’atome qui sont responsables et coupables.

Aussi, avant que l’irréparable ne se produise en France, il faut fermer d’urgence toutes les installations nucléaires. Nous avons encore la chance de pouvoir le faire de nous mêmes, et non sous la contrainte d’une situation de catastrophe comme au Japon. Agissons vite, très vite. 

 Stéphane Lhomme
Président de l’Observatoire du nucléaire


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