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Ariane Moffatt -­ MA [2012]

Publié le 08 mars 2012 par Feuavolonte @Feuavolonte

ariane.moffatt.maAriane Moffatt
MA

Audiogram
Canada
Note : 9/10

par Élise Jetté

MA : « fossé, espace, pause entre deux parties structurelles. On peut aussi faire l’expérience de ce concept de spatialité entre des intervalles. Désigne aussi la conscience de cet espace chez l’observateur [...] » On peut dire qu’Ariane Moffatt s’est approprié tous les espaces vides pour la création de ce nouvel album. Les silences travaillés et les sons façonnés à son image transposent avec exactitude et virtuosité le concept qui soutient l’album MA. C’est un quatrième album tout en singularité pour Moffatt qui a choisi de créer un album métis (mi anglo, mi franco). Un album sur lequel elle est pratiquement tout à la fois : la voix, le son et le reste; l’ensemble étant habité par un groove sensuel et accrocheur.

Certes, la belle a tenu les rênes de la production de son nouvel opus du premier au dernier son enregistré. La prise de son minutieuse de Pierre Girard et les accompagnements occasionnels (une section de cuivres arrangée par le tromboniste Jean-Nicolas Trottier, le quatuor à cordes Mummies on the Run (arrangé par la violoniste Mélanie Bélair), et Jeanphi Goncalves) ont également alimenté la chanteuse dans la réalisation de cet album indie-pop électronique.

J’entends déjà les échos de ceux qui seront en désaccord avec le fait qu’elle ait choisi le mélange des langues. Or, on a tous quelque part un attachement sentimental à la culture musicale anglophone. Vous avez, tous autant que vous êtes, une chanson favorite de langue anglaise. Difficile alors d’en vouloir à une artiste qui possède la même culture bilingue que vous, qui a grandi avec des morceaux préférés anglophones et qui développe un désir soudain de s’exprimer musicalement dans une langue qui lui est si proximale. Le métissage est réussi et l’auteure dévoile une plume affutée dans la langue de Shakespeare comme elle l’a toujours eu dans la langue québécoise. Ses pièces anglophones se fondent à merveille aux saveurs du moment: un son indie électrifié qui risque de favoriser une percée grandiose à la Québécoise dans le marché canadien-anglais et américain. On avait d’ailleurs pu apprivoiser son chant anglo dans ses interprétations de pièces connues sur la bande sonore de la série Trauma. On avait alors découvert une sensibilité particulière dans la voix; plus touchante encore que lorsqu’elle chante en français. Ça n’a jamais été mauvais.

Mon corps a déjà été adopté par les ondes radio et Hôtel Amour devrait aisément être accepté par la musique populaire québécoise, dû à sa ressemblance avec le style habituel d’Ariane. Les pièces francophones La pluie et le beau temps et L’homme dans l’automobile présentent une tendance électro plus marginale, moins accessible et même une distorsion dans la voix pour ce qui est de la première. Toutefois, les thématiques textuelles soufflent un vent nouveau sur la scène musicale québécoise. Comme quoi il faut parfois frôler l’inaccessible pour créer la nouveauté. Sourire sincère joue pour sa part avec les différences de rythmiques, fabriquant une fois de plus des sonorités méconnues.

Du côté anglophone, Walls of the World et Too Late proposent une tendance rétro bien charmante alors que Rules of Legal Love et In Your Body démontrent une alternance entre un rythme électro et un groove pop-rock extrêmement captivant. Les textes les plus accrocheurs et les plus touchants, All Yours et Artifacts demeurent des pièces très accessibles; la première présentant une bonhomie plus pop qui se cramponne aux oreilles et habite la mémoire des heures durant.


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