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Le 11 mars 2011 vécu du côté d’Osaka

Publié le 11 mars 2012 par Flo- @viesnippones

A l’occasion de ce triste anniversaire du 11 mars, j’ai souhaité vous raconter comment nous avions vécu cette catastrophe du côté d’Osaka, soit à environ 600 kilomètre de distance à vol d’oiseau. Vous le verrez dans cet article, je ne reviendrai pas en détail sur l’incident de la centrale nucléaire de Fukushima et je ne donnerai pas mon point de vue sur ce dernier. Simplement car je ne suis pas apte à en parler, c’est un domaine bien au delà de ma compréhension. De plus je n’étais pas sur place. Je vais avant tout aborder la façon dont j’ai vécu les évènements au travers de mes yeux de gaijin (étranger) et d’un point de vue local, c’est-à-dire à Izumi, dans la préfecture d’Osaka. Comme vous l’avez constaté, le blog est en pause mais souhaitant aborder ce sujet, aujourd’hui convient le mieux.

Le 11/03/2011

Le 11 mars 2011 était un jour comme les autres. Les beaux jours arrivaient et nous vivions paisiblement cette journée dans notre petit immeuble d’Izumi city. Je trainais sur Facebook, la France n’était pas encore réveillée, quand soudain j’ai vu des messages de la part des amis Japonais concernant un séisme majeur dans la province du Tohoku. Mon premier réflexe fut de rebrancher ma télévision et de l’allumer. Un énorme tsunami venait de frapper les côtes est du Japon suite à un terrible séisme de magnitude 9 (information que l’on a apprise par la suite). Des images filmées grâce aux hélicoptères de la presse Nippone passaient en boucle sur la majorité des chaines. Elles montrait des images terrifiantes de torrents d’eau qui emportaient tout sur leur passage : terres agricoles, maisons, voitures. Nous pouvions voir en direct des personnes au volant de leurs voitures tentant d’échapper à cette vague mortelle qui se faisaient rattraper. Cela paraissait incroyable, ça se passait à à peine 600km de nous et nous assistions impuissant à ce spectacle morbide. Nous ne savions pas encore à ce moment là que le bilan des morts serait si important. Nous ne savions pas que des dizaines de milliers de personnes avaient déjà tout perdu. Nous ne savions pas qu’une centrale nucléaire avait été lourdement endommagée. Nous ne pouvions que regarder l’horreur que la nature avait amené sur les terres Japonaises au travers de nos petits écrans de télé.

Le 11 mars 2011 vécu du côté d’Osaka

Yuko Sugimoto à la recherche de son fils.

Une peur impalpable

Dès lendemain la situation s’est envenimée lorsque peu après les médias Japonais, les médias Européens nous apprenaient que des fuites radioactives avaient lieu dans une centrale nucléaire située à Fukushima. C’est à ce moment là que le monde entier fit connaissance avec les réacteurs de Fukushima Daiichi. C’est aussi à partir de ce moment là que le gouvernement et la presse Japonaise ont commencé à nous délivrer des informations au compte goûte sur l’accident nucléaire qui en quelques jours s’est transformé en catastrophe nucléaire d’ampleur planétaire. En tant qu’expatrié, après avoir réussi à rassurer votre famille sur votre état physique à la suite d’un des plus gros séisme du siècle, il a fallu gérer le reste. Car même si Osaka est loin de Fukushima, un coup de vent à vite fait de ramener le danger, un danger qui n’a ni couleur, ni odeur. Précisons une chose, lorsque vous ne lisez pas le Japonais et que vous ne comprenez pas 7 phrases sur 10, vous utilisez les informations disponibles dans votre langue ou au pire en anglais. Et il y avait deux sons de cloche. Les médias Japonais qui suivant les informations (et conseils avisés…) du gouvernement tentaient de rassurer la population et les médias Français pour qui le Japon était déjà condamné à être entièrement irradié. Pour résumer : d’un côté il fallait rassurer les millions d’habitants de Tokyo (cœur économique du Japon) et de l’autre c’était l’occasion pour les verts de remettre en cause l’énergie nucléaire.

Le 11 mars 2011 vécu du côté d’Osaka

Ofunato, préfecture d'Iwate, le 14 mars 2011.

Sincèrement, je pense que beaucoup d’expatriés qui avaient l’occasion de s’éloigner du Japon ont été imprudents. J’en fais bien entendu parti. Mon choix était simple : acheter un billet d’avion hors de prix pour rentrer en France et ne pas avoir les moyens pour revenir finir mon année scolaire au Japon ou rester et croiser les doigts pour que tout aille bien. Car nous avons été chanceux (si je peux utiliser ce terme) car le vent soufflait du côté de la mer. Il aurait décidé de changer de sens et nous nous serions pris des retombées radioactives. Cependant du côté d’Osaka la vie n’avait en aucun point changé, les Japonais étaient sereins et rien ne nous laissait penser que nous pouvions être en danger à quelconque moment. Bien sur, nos familles et écoles faisaient leur travail en nous demandant de rentrer au plus vite subissant de manière quotidienne une presse Européenne qui avait tout pour inquiéter. Des Européens sont même allé gober des pilules d’iodes, cela souligne à quel point ils ont bien fait leur travail : effrayer la population. Ils sont même allés jusqu’à contacter notre école pour nous filmer à travers notre webcam et ainsi recueillir le témoignage d’étudiants Français ayant décidé de rester au Japon malgré une situation alarmante. Nous leur avons alors donné notre point de vue qui a entièrement été découpé et remonté pour au final faire passer un tout autre message, celui qui les intéressait. Vous comprenez alors que j’ai une petite dent contre la presse Française. Je précise qu’elle a créé un effet de loupe médiatique sur l’accident nucléaire de Fukushima Daiichi jusqu’aux incidents du Printemps Arabe. Après cela, il fallait fouiller le web pour trouver quelque chose alors que le danger était toujours bien présent (c’était même pire quelques mois après). A partir de ce moment là en dehors de nos familles, informée grâce à nous, plus personne ne nous demandait de rentrer.

Le 11 mars 2011 vécu du côté d’Osaka

Minamisoma, préfecture de Fukushima, le 12 mars 2011.

Et les Japonais dans tout ça ?

Comme je l’ai évoqué dans le paragraphe précédent, la vie n’avait en aucun point changé du côté d’Osaka. Dès le lendemain de la catastrophe, les Japonais sont retournés à leur travail, ont continué de sortir et de consommer de manière habituelle. Et ce n’est pas l’accident nucléaire qui les a inquiétés. Leurs pensées allaient du côté de leurs amis deTokyo et de la région dévastée par le tsunami. Car si en France les esprits étaient préoccupés par l’accident nucléaire, les morts s’entassaient du côté de Miyagi mais il fallait aussi s’occuper des nombreux blessés, accueillir les sans abris, nourrir les survivants alors que les routes étaient impraticables et évacuer la zone autour de la centrale. C’était une situation incroyablement complexe que personne n’avait envisagé à cette échelle. A Tokyo, le séisme n’avait pas fait beaucoup de dégâts mais la peur des radiations était bien présente. C’est pour cela que certains produits ont disparu des rayons des supermarchés mais en dehors de cela, quelques jours après le tremblement de terre la capitale vivait comme à son habitude malgré les nombreuses répliques sismiques. A quelques centaines de kilomètres, nous nous sentions impuissants et il en était de même pour de nombreux Japonais. C’est pour cela que nous avons pu assister à une entraide incroyable que ce soit au travers de simples dons ou encore des gens qui se sont déplacés jusqu’aux régions sinistrées pour apporter leur aide. Pour vous donner une idée de l’entraide, mon école avait organisé une collecte d’argent dans les gares aux alentours (pas des plus grandes villes donc) qui a permis de récolter près de 40.000 dollars en quatre jours.

Voilà pour ce récit qui est très synthétisé. J’espère qu’il vous permettra de bien vous imaginer comment nous avons vécu ce passage sombre de l’histoire Japonaise et qu’il vous aura intéressé. Si vous avez besoin de précisions vous savez comment faire et sinon on se retrouve à partir du 26 mars pour de nouveaux articles.

Les photos proviennent d’un article du National Post qui montre des photos des mêmes lieux après la catastrophe et un an après. Vous pouvez le retrouver -ici-.


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