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Le chapeau de Mitterrand - Antoine LAURAIN

Par Liliba

Le chapeau de Mitterrand Antoine Laurain Lectures de Liliba

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Croyez-vous que les objets puissent avoir une influence sur notre vie ? Qu’ils soient dotés d’un pouvoir secret ? Ou bien que nous imaginions ce pouvoir et de ce fait, nous nous donnions inconsciemment les forces pour réussir dans nos entreprises ?

Vous n’aurez pas vraiment la réponse en lisant ce roman, mais cependant je ne peux que vous encourager à vous y plonger, car je me suis régalée du début à la fin. Daniel Mercier est un homme normal, dans la quarantaine. Un soir qu’il dîne seul dans une brasserie parisienne, il se retrouve par hasard à coté de François Mitterrand. Subjugué, il écoute la conversation des hommes et se réjouit de pouvoir côtoyer de si près le pouvoir, et surtout de pouvoir ensuite raconter l’anecdote à ses proches. Quand après leur départ, il s’aperçoit que le président a oublié son chapeau, sur un coup de tête, il s’en empare, s’en coiffe comme s’il lui appartenait et file sans demander son reste.

Il est tout heureux de ce hasard de la vie et du récit qu’il fera à son épouse à son retour. Ce qu’il ne sait pas encore, c’est que le chapeau, sitôt qu’il se pose sur une tête, semble influer sur la vie de son porteur, lui insuffler de l’énergie, de la personnalité, la force d’oser exprimer son opinion, ou de se positionner contre l’avis des autres. Bref, le couvre-chef donne à son possesseur non seulement un air chic et digne, mais une aura qui va changer sa vie. Il agit comme un talisman, un porte-bonheur, un gri-gri, une sorte de force immatérielle et donc insaisissable faisant ressortir le meilleur de la personne qui s’en ceint...

Sauf que le chapeau semble ne pas vouloir rester dans les mêmes mains. Mercier le perdra bien vite au profit d’une jeune femme, qui l’abandonnera sur un banc, après avoir pris une grande décision qui fera que sa vie changera du tout au tout. Il sera récupéré par un parfumeur dépressif en mal de création, puis par un bourgeois parisien… avant de revenir sur la tête de Daniel, après maintes et maintes péripéties. Pour savoir sur quelle crâne finira le galurin, vous devrez lire le roman…

Outre l’histoire qui est vraiment très drôle et originale, et qui pose des questions intéressantes sur notre confiance en nous-mêmes, je me suis délectée de ce retour dans les années 80. Antoine Laurain ressuscite cette époque (ma jeunesse) avec sa verve habituelle (souvenez-vous du délectable Fume et tue !), et un humour mordant, souvent ironique, mais cependant également empreint de nostalgie. Nous revivons les début du minitel, écoutons les chansons à la mode qui deviendront des tubes malgré le coté sulfureux de la chanteuse (C’est la ouate), assistons aux scandales de Gainsbourg à la télé, les débuts de Canal+, la petite chaine qui monte, regardons le JT de Mourousi… Basquiat est un illustre inconnu ; Jacques Séguéla fait sa pub ; en politique, il faut cohabiter ; on écoute ses messages sur des répondeurs à cassette et on filme en VHS ! Nous nous insurgeons contre la construction des colonnes de Buren ou de la pyramide du Louvre, Jacques Lang crée la fête de la musique, bref, c’est toute une époque qui défile sous nos yeux, et c’est un régal !

L’écriture de Laurain est fluide, vive, bourrée d’humour (souvent grinçant, très ironique), de clins d’œil, et ses descriptions des personnages sont un véritable régal, tout particulièrement les bourgeois ancrés dans leurs principes et outrés qu’un des leurs ose virer sa cuti, changer d’idées politique et même appeler Mitterrand en prononçant son patronyme correctement au lieu de cracher un Mittrand péjoratif (j’ai eu l’impression d’entendre mes parents et leurs amis, la famille, prononçant le nom honni du bout des lèvres, comme si en parler les salissait déjà, les contaminait !). Jubilation également à lire les soirées mondaines du show biz de l’époque, les m’as-tu-vu qu’on croise dans les galeries. L’énergie de cette période m’est revenue, avec un brin de nostalgie… Je rassure ceux qui craignent de lire un panégérique de l'homme politique, il n'en n'est pas question ici.

Le jeu de mot est facile, mais je vous tire mon chapeau pour ce beau roman, Monsieur Laurain !

Challenge Petit Bac 2012

Catégorie Objets et Personnes Célèbres


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