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Cloclo : Biopic total

Par Unionstreet
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Cloclo : Biopic total

Au programme : Claude François, sa vie son œuvre à travers un biopic ample et complet qui prend comme point de départ l’enfance méconnue du chanteur préféré des français dans l’Égypte colonisée de l’après guerre et jusqu’à sa disparition fulgurante, au sommet de sa gloire, à la fin des années 1970.

Siri impose enfin son talent. Cloclo, c’est avant tout la passion sans faille d’un metteur en scène qui rêvait depuis 10 ans d’un film musical. Amateur passionné du cinéma de genre (il est l’auteur de Nid de guèpes, thriller d’action désormais culte) et défenseur d’un certain art de la narration hollywoodienne qui à toujours su mêler nécessité du spectacle et expérience à hauteur d’homme, le jeune cinéaste était déjà parvenu à un tour de force miraculeux il y a quatre ans avec l’enemi intime, film de guerre sans concession qui abordait de face le conflit franco-algérien dans toute sa violence et sa complexité sans pour autant renoncer à la dynamique singulière de son cinéma, viscéral et spectaculaire.

Ambition hollywoodienne. On retrouve tout cela avec l’évidence des grands films dans Cloclo, fresque monumentale qui vous attrape dès les premiers plans et ne vous lâche plus. Rarement on a vu un réalisateur français aussi inspiré, capable d’offrir un spectacle à la fois accessible par la clarté de sa narration, populaire et fédérateur par son sujet et aussi ambitieux dans son approche formelle. Siri impressionne par la maitrise d’un vocabulaire cinématographique que l’on pensait jusque-là réservé aux cinéastes hollywoodiens.

Stone et Scorcese pour maîtres. En effet, les premiers noms qui viennent à l’esprit pour se tenter à la comparaison sont les cinéastes du nouvel Hollywood : Oliver Stone bien sûr, pour l’exigence quasi-documentaire de la reconstitution et l’art du détail, le jeu avec le grain d’image, les objets datés, la mode vestimentaire et les lieux symboliques qui marquent une époque et l’évolution de la société française à l’heure des trente glorieuses. Pensez au Doors, à Nixon ou encore JFK.

Scorcese enfin pour la subjectivité du point de vue qui nous plonge dans une intimité presque physique avec le chanteur. On découvre alors une violence et une tristesse insoupçonné et qui charge le film d’une dimension intime et tragique. Il y a dans le Claude François de Siri, un peu de la personnalité obsessionnel et destructrice du Howard Hugues d’Aviator et la la détresse amoureuse du De Niro de Casino.

Enfin le parrainage hollywoodien est évident quand on liste le nombres de séquences virtuoses qui confère au film toute sa poésie et sa force expressive, parfois proche de l’abstraction : mouvements de caméra, métamorphoses magique du décors ou encore plans-séquences complexes. L’exigence formelle est à la hauteur du sujet.

Qui a dit chanteur ringard ? Siri met aussi en avant l’artiste et tient le pari d’un film chargé de passion pour la musique et son impact sur la société. L’image clé qui restera du film, c’est l’éternel visage angélique de ce gamin volontaire qui ne peut s’empêcher de taper du pied pour battre le rythme. Un geste d’impatience mais plus encore une démangeaison, preuve que la musique est déjà là, présent jusque dans le corps de l’artiste et près à surgir comme une pulsion de vie, ou plutôt de survie. On passe des moments de galère à une consécration hors norme que le cinéaste capture avec un sens du spectacle étonnant dans des scènes de concert fiévreuses où l’ambiance, électrique et grisante, donne envie de bondir de son siège.

On découvre aussi, à travers de purs moments de cinéma, la passion et l’ingéniosité d’un artiste mégalomane mais moderne et dévoué, un chanteur populaire sans prétention mais instinctif et quand on entend la ligne de basse de Alexandrie Alexandra, avec le volume sonore d’une salle de cinéma bien équipée, ba on se dit que ca groovait bien tout ça et on comprend alors pourquoi ses titres monopolisent encore et toujours les salles à manger les soirs de nouvel an !Les chansons prennent soudain tous leurs sens quand le montage fait le lien entre les évènements intimes que traverse le chanteur et le sujet même des chansons. Dans tous les cas on apprend à reconsidérer un artiste un peu trop vite relayé au rang de faiseur de soupe.

C’est peu dire que Jérémie Renier y est bluffant de mimétisme et d’énergie, offrant de plus au personnage une candeur enfantine et une fragilité qui créer un lien empathique instantané avec le public. Sans parler de Benoit Magimel, dont le travail de transformation en Paul Lederman (le manager de Cloclo) est si bluffant que l’on met bien 30 minutes à le reconnaitre.

Verdict : Que l’on soit fan de la première heure ou anti musique de papa, tout le monde va adorer Cloclo parce que c’est un film miraculeux, une œuvre colossale et amoureuse doublé d’une folie visuelle de tous les instants, une tragédie dont l’émotion prend au tripe et une fresque qui magnifie et poétise une époque bénie et prospère, un temps de l’insouciance et du changement que la télévision à si souvent commenté et dont il ne reste aujourd’hui que la nostalgie. Cloclo était un mythe français, c’est à présent un mythe cinématographique.

Clément Levassort.


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