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Suite paradisiaque - Ville Ranta

Par Belzaran

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Titre : Suite paradisiaque
Scénariste : Ville Ranta
Dessinateur : Ville Ranta
Parution : Février 2012


« Suite paradisiaque », par l’auteur finlandais Ville Ranta, est une bande-dessinée qui traite de la Genèse. Lourd sujet donc, surtout qu’il s’agit ici de parler de l’exclusion d’Adam et Eve du jardin d’Eden. Point de traitement théologique, le propos est fortement cynique et doté d’un humour pince sans rire qui fera grincer de nombreuses dents…

Le livre démarre sur la découverte de la sexualité par Adam et Eve. Une découverte qui ne va pas plaire à Dieu, décrit comme possessif et colérique. L’absorption du fruit de la connaissance va ensuite tout bouleverser. En effet, les deux êtres humains vont accéder au savoir et notamment à la notion de bien et de mal. S’ensuit la culpabilité…

C’est une interprétation particulière de la Genèse à laquelle on a droit dans cette bande-dessinée. La sexualité y est centrale et explicite. C’est le véritable commencement des problèmes pour l’humain. Suit l’impossibilité d’accéder à l’arbre de vie (symbolisé par un mur érigé et des chérubins gardiens), puis le départ du jardin d’Eden. Au fil du livre, Ville Ranta reconstitue le processus d’exclusion mené à l’encontre d’Adam et Eve. Dieu y est montré comme autoritaire et rancunier, alors qu’Adam, qui aime profondément Dieu, souffre et pleure. L’auteur retourne clairement la situation telle qu’elle est présentée habituellement. Les humains y sont montrés comme subissant le courroux d’un maître acariâtre.

L’évolution de la situation des deux tourtereaux est bien menée. Des débuts complètement innocents (car sans connaissance !), on sent leur existence s’émietter. Ils sont rongés par la culpabilité, ont peur, sont persécutés par les chérubins, rencontrent la Mort…

Le problème de ce genre d’ouvrage théologique, c’est que c’est vite très bavard. En effet, l’action est loin d’être omniprésente et les concepts abordés (le mal, l’amour, la culpabilité…) sont parfois peu concrets à décrire. L’auteur s’en sort plutôt bien même si un inévitable ventre mou fait son apparition au milieu de l’ouvrage.

« Suite paradisiaque » est construit essentiellement sur des dialogues. Malgré cela, l’auteur parvient à diversifier son graphisme. On n’a pas d’impression de répétition alors qu’en soit les situations sont souvent très proches. L’auteur adopte un trait assez tendance sur lequel j’émettrai quelques réserves. Le trait a un côté très brouillon, comme jeté. Il est donc fondamentalement imparfait et dynamique. Cependant, des fois c’est limite. On sent que l’auteur travaille de façon spontanée. Il est clair que certains lecteurs risquent d’opérer un rejet immédiat sur le graphisme.

Heureusement, ce trait est soutenu par des aquarelles de toute beauté. La couleur s’adapte parfaitement au trait de l’auteur, cette technique étant souvent source de spontanéité et d’erreurs. Et c’est tout ce qui en fait la beauté. Les ambiances sont très bien rendues. La couleur délimite les cases qui ne sont pas tracées. Encore une fois, « Suite paradisiaque » a un graphisme très relâché pour favoriser le dynamisme de l’ensemble. Sous un côté a priori brouillon, le tout est parfaitement maîtrisé.

« Suite paradisiaque » est un ouvrage curieux. Un peu bavard parfois, il possède une ambiance particulière, entre cynisme, humour et théologie. Mais finalement, cet ouvrage se termine sur une forme de blasphème formidable qui ne manquera pas d’arracher un sourire complice des plus impertinents et d’entre nous.

par Belzaran

Note : 14/20


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