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Un challenge réussi pour Bastien Orenge et Thomas Verguet

Par Bande Dessinée Info

A l’occasion de la sortie de leur tout premier album dans le cadre de la nouvelle collection des éditions Glénat, voici une petite interview de deux jeunes dessinateurs très prometteurs.

E.A. : Qui êtes-vous ?

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Magellan : Jusqu’au bout du monde (Christian Clot, Bastien Orenge et Thomas Verguet) - Glénat

Thomas Verguet (TV) : Je suis Thomas, co-dessinateur sur Magellan. J’ai trente ans et je suis un ex ingénieur devenu auteur autodidacte. Enfin pas complètement autodidacte, j’ai pris des cours avec des professionnels, fait du graphisme. Magellan est mon premier album.

Bastien Orenge (BO) : Je suis Bastien, j’ai 22 ans, c’est également mon premier album. Je suis originaire du Havre, mais j’ai passé trois ans à l’école Pivaut à Nantes, et je suis arrivée à Paris en septembre 2010 pour venir au studio Elyum.

E.A. : Comment êtes-vous venus à la bande-dessinée ?

TV : Par passion. A un moment j’ai fait le choix de faire de la BD plutôt qu’être ingénieur. Je me demandais combien de temps ça allait prendre, j’attendais avec beaucoup d’impatience. Comme pas mal de monde, j’ai lu de la BD étant enfant : Astérix, Boule et Bill, Gaston, etc. J’ai découvert la BD plus « adulte » un peu plus tard, en première avec les Gardiens du Maser de Frezzato. Dans ma classe (à Aix en Provence d’où je suis originaire), j’avais un ami qui était super-fan de BD, qui prenait des cours avec des professionnels et qui voulait en faire son métier. Il m’a présenté à eux et eux m’ont ensuite réorienter vers le Zarmatelier. C’est drôle de voir que finalement les choses ont tournés comme ça. Lui qui voulait être un pro de la BD ne l’est pas devenu du tout et moi qui ne voulait pas l’être, je le suis devenu ! Vers 21/22 ans j’ai commencé à prendre des cours de BD et pendant mes dernières années à l’INSA, j’ai fait plusieurs stages au Zarmatelier. Mais je devais aussi assumer d’avoir un diplôme d’ingénieur et d’abandonner cette voie pour une autre très différente.

BO : Je dessine depuis tout petit. J’ai toujours lu les classiques franco-belges (Astérix, Gaston, Garfield), j’ai lu beaucoup, regarder beaucoup de films etc . Mais j’aimais montrer mes dessins à mon entourage. J’ai pris, dès 16 ans, du cours du soir aux Beaux-arts du Havre. A la fin du lycée, je ne savais pas quoi faire, j’ai passé plusieurs concours, notamment un pour entrer en Hypokhâgne. A ce moment-là les Beaux-arts ont fait une journée « portes ouvertes » à laquelle je suis allée, mais les Beaux-arts c’était plus pour moi, c’était pas assez précis, c’était trop « artiste ». Et au final, j’ai été pris à Pivaut à Nantes. J’y suis entré à 17 ans. A l’adolescence, j’avais découvert plein de BD en allant à la bibliothèque : Neige, La quête de l’oiseau du temps, et Lanfeust que j’ai dévoré. C’était un autre monde.

E.A. : Et pourquoi la BD, et pas l’illustration ?

BO : Avec la BD, je pouvais varier les expressions, les décors, tandis que l’illustration c’est figé. Il faut trouver rapidement la bonne composition, le bon dessin. Au final, à la sortie de Pivaut, j’ai été contacté par Soleil, j’ai fait un essai pour eux qui n’a pas marché. Puis Stéphane Louis m’a mis en contact avec Didier Poli qui m’a fait monter à Paris où j’ai rencontré Thomas.

TV : J’ai envoyé mes premiers projets vers 2008 aux éditeurs. Un peu avant j’étais allé à Angoulême avec des amis à moi qui faisaient du fanzinat. J’y ai rencontré quelques éditeurs avec qui j’ai eu des contacts encourageants. J’ai alors monté mon premier projet avec un scénariste amateur, on l’a envoyé mais il n’a pas été accepté. On m’a mis en contact avec Guillaume Dorison pour monter un projet aux Humanos, mais ça n’a pas non plus fonctionné. Je suis resté en contact avec lui. Il m’a mis en contact avec Didier Poli, puis ils m’ont tous les deux proposé de venir sur Paris. Et à ce moment-là, je voulais quitter la Belgique (j’étais dans une école à Mons) pour un atelier. C’était donc le bon moment et le bon endroit. Et puis en arrivant j’ai rencontré Bastien avec qui j’ai eu un bon contact dès le début. Ça faisait très longtemps que je voulais travailler avec quelqu’un. Pourquoi avoir choisi Magellan comme premier projet ?

BO : C’est lui qui est venu à nous. Il y avait plusieurs projets au studio, mais j’avais déjà travaillé sur les conquistadors et Didier pensait que c’était bien qu’on choisisse ça.

TV : Et les autres projets étaient plus ou moins déjà pris.

BO : Pour moi, c’était déjà figé vu mon dossier de fin d’année sur les conquistadors. Et puis c’était un projet à deux, alors pourquoi pas ? C’était moins effrayant que seul.

TV : On a des capacités complémentaires, on avait pas envie d’être seuls. Le principe de studio me plaisait, un album est meilleur quand plusieurs auteurs y mettent ce qu’ils savent faire de mieux.

BO : A Pivaut, la solitude dans le travail était pesante. Je passais des week-ends entiers tout seul à mon bureau à travailler, et avoir des nouvelles de ma famille qui faisait des repas de famille où ils y étaient tous, sans y être moi, c’est dur. Je voulais allier ma passion avec des gens, parce que c’est tellement de temps.

TV : Bastien était enjoué de travailler avec un explorateur. Moi j’avais envie d’un projet sérieux, mais ce n’était pas mon sujet de prédilection. L’ambiance était plus attirante que le projet en lui-même.

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Bastien Orenge et Thomas Verguet © E. Aubague

BO : Moi le projet me parlait, les bateaux, sur la mer, venant du Havre…. Et puis le côté mystique, j’avais vu des films marquants, comme The Funtain, qui pouvaient aider à mettre en valeur le côté mystique de l’album. Et penser que les indigènes pouvaient être plus forts que les conquistadors me plaisait. Le scénario me rappela l’histoire des cités Mayas non-découvertes, ça me faisait rêver.

TV : De ce que j’avais lu, l’histoire me donnait envie, pas que ce soit une BD historique, mais aller dans l’esprit des personnages. C’était un vrai challenge d’aller vers l’inconnu.

E.A. :Comment vous êtes-vous réparti les rôles ?

TV : Didier avait une idée précise de nos points forts. Et ça nous convenait. A la base, je faisais le story-board et le posing des personnages. Bastien devait faire les visages et l’encrage parce que ses personnages sont plus sexys.

BO : Soit disant, je styliserais plus que Thomas.

TV : Suite à ça, on a essayé différentes méthodes de travail avec une répartition précise des tâches. Moi je devais plus m’occuper des volumes, et Bastien des formes. Mais dans la pratique, on a fait beaucoup de changement selon le moment et l’envie.

BO : Thomas essayait de trouver des techniques qui relancent la motivation.

TV : Parce qu’il fallait parfois donner de l’élan au projet.

BO : On ne savait plus qui faisait quoi par moment.

TV : Il y a eu plusieurs grandes phases de travail parce que la répartition de départ était lente. J’éprouvais de la frustration de ne pas avoir de dessin finalisé pour moi.

BO : Moi, à un moment je me suis trouvé plus lent que Thomas et j’avais l’impression d’avoir plus de travail que lui.

TV : Alors je me suis mis à encrer. Parce qu’à certaines phases où j’ai pris de l’avance sur le board, j’avais parfois plus de cinq planches d’avance. On n’allait pas au même rythme.

BO : Quand le travail était trop divisé, on n’était plus motivés.

TV : On avançait plus quand il y avait qu’une page d’écart même si la page d’avant n’était pas terminée d’être crayonnée. Le travail de Bastien était long et lent, alors que le board était très rapide à faire. Et après on reprenait planche par planche pour finaliser l’album. C’était beaucoup plus productif.

E.A. : Comment s’est passé la collaboration avec Christian Clot ?

BO : Très bien, il nous a fait profiter de son expérience d’explorateur et de toute sa documentation très intéressante.

TV : On était tous très passionné. Christian était très exigeant du respect de sa vision, mais on a su lui faire accepter notre vision et ça a été un mélange des deux. Des fois, on était en contradiction avec la réalité. Au niveau pratique, on travaillait parfois en étroite collaboration, et des fois plus du tout quand il est parti en voyage, mais à son retour et sur la fin, il était très présent.

BO : Christian est déjà allé là-bas et il nous a fourni une très grosse documentation, et notamment ses photos persos.

TV : Il connaissait donc il pouvait nous dire si on était proche de la réalité.

E.A. : Comment vous êtes-vous documenté autour de cet album ?

TV : Christian tirait vers l’historique et nous a fourni quelques photos de la Nao Victoria, une reconstitution de la Victoria. Mais à partir de la vision d’un bateau, il a fallu en faire quatre autres.

BO : La compagne de Christian nous a fourni la documentation pour les costumes. Et puis on a été au musée de la marine, on a vu des films comme 1492.

TV : On a lu aussi des BD comme Helldorado, et vu des films comme 1492, ou Aguirre, la colère des dieux qui étaient des références pour la crédibilité. Mais il y avait plein de choses à créer sans avoir de documentation, donc ce n’était pas toujours simple. Et on se demandait aussi comment simplifier les choses pour la BD ?

E.A. : Maintenant que votre album est sorti, quelles sont vos impressions ?

BO : C’est la fête ! Mais c’est quand même étrange après avoir passé beaucoup de temps dessus (un an et trois mois).

TV : On a eu la chance aussi de pas beaucoup attendre entre le rendu final de nos planches et la sortie.

BO : Ça fait bizarre d’avoir son album entre les mains.

TV : C’est la fin d’un long voyage, d’un marathon. On prend conscience du chemin parcouru.

BO : C’est la cerise sur le gâteau, parce que dessiner c’est autant pour soi que pour le partager. Tout le monde va pouvoir nous donner son avis.

TV : L’attente était vraiment très très longue. C’était un véritable challenge, une épreuve de force, on a gravit une montagne. On l’a fait !

E.A. : Le mot de la fin ?

TV : Je suis très content de pouvoir rencontrer tout le monde.

BO : On est contents parce que le public touché est varié. Ça nous donne envie.

TV : Moi je voudrais dédicacer sur la Nao Victoria.

BO : Thomas, je t’aime !

Propos recueillis par E. Aubague


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