Magazine Journal intime

Où il est question de ne rien oublier, d’indignés et de deux empereurs!

Par Vivresansargent

Lundi 19 Mars :

Je suis devant mon ordi, dans ma nouvelle chambre qui s’avère être un matelas posé dans un bureau, dans un…appartement, à Dégagnac. La petite d’Estelle et Philippe fait un caprice dans le couloir. Je suis nase, la journée a été rude. Allez, j’te raconte !

-08:00 : Je fais un pain maison à la farine complète, aux raisins secs avec un soupçon de cannelle. Je l’avais promis à Patrice. Je lui écris la recette car il est motivé pour en faire. Une heure plus tard, je salue tout le petit monde de la ferme en paille chaleureusement car j’ai passé une bonne semaine avec eux. De chouettes gens chez une chouette personne dans un chouette endroit pour un chouette moment.

-09:20 : Un bout de pain dans la poche et le sac à dos sur les épaules, je commence ma session d’auto-stop. Il me faut attendre 25 minutes avant d’être pris par une jeune maman qui répond au prénom de Delphine. Cinq minutes de plus d’attente et je battais mon record « d’exhibition de pouce sur bord de route », que j’ai réalisé à Saint Malo (33 minutes avec le vent dans l’dos mais homologué tout de même!).

J’ai choisi, pour cette session de stop, une stratégie risquée. Pour le stop, il y a deux choix possibles. Soit on prend les grands axes mais, souvent, on augmente la longueur du trajet, soit, on prend au plus court, les toutes petites routes mais, cette fois, c’est le flot des voitures qui diminue, poils au … ! Je choisi donc l’option petites routes de campagne et le trajet le plus court. Qui vivra verra !

-12 :20 : Je sors du camion de deux sympathiques maçons, je suis à 10 kilomètres de ma destination, Montgesty. Les routes sont si petites que je ne vois passer que trois voitures en deux heures. Aucune des trois n’a jugé utile de s’arrêter. Je marche donc les dix bornes. Je vois du pays, le Lot est un coin magnifique qui marque des points. Je m’éclate. La musique dans les oreilles, je chante à tue-tête avec les artistes qui m’accompagne depuis quelques temps maintenant. Le moment est fort. Le grand Charles fait se dresser les poils de mes bras quand il chante : « Non, je n’ai rien oublié ». Je chante avec lui et les autres Damien Rice, Nina Simone, Bashung, Balbino Medelin, Dylan, Daniel Darc, Cabrel and co.

-14:20 : J’arrive sur la place de l’église de Montgesty, je mange la moitié de mon bout de pain. J’ai les épaules en compote.

-14 :45 : Je suis sur le terrain d’Estelle et Philippe et je plante des petits oignons tout le reste de l’après-midi en m’occupant des miens (facile Émile!)

-19:30 : Je débarque dans l’appartement et pose mon sac dans le bureau.

-20:00 : Je découvre le caractère de leur petite fille de trois ans, ça déménage !

-22:00 : Après avoir donné un coup de main à Estelle pour le repas, on s’installe sur des cousins autour de la table basse et on dîne. Je fais la connaissance de mes hôtes et de leur stagiaire Nicolas. Le repas est chouette.

-22:30 : La petite pousse un dernier cri et file au lit.

-22:40 : Je m’installe sur le matelas de mon bureau/chambre pour une séance de méditation.

-23:00 : Je m’écroule.

Mardi 20 Mars :

Estelle et Philippe ont un grand terrain sur lequel il font du maraîchage en permaculture. En quelques mots, la permaculture est une technique de culture qui ne demande aucun labour de la terre. En gros, on reproduit ce qui existe dans un bois, par exemple. On fait tourner les cultures et on laisse la faune et la flore faire son travail et engendrer la vie nécessaire à la bonne croissance des légumes. Ils ont également deux grandes sœurs…euh, serres. Ce matin, on travaille dans ces serres. Il nous faut « repiquer » des petits plants de tomates et de poireaux dans des pots plus grands pour, dans quelques temps, les planter, avec de belles racines, dans les buttes qu’ils ont créé. 500 poireaux et 120 tomates passent entre nos mains.

On papote, Estelle, Nicolas et moi et on fait connaissance. Ils sont très agréables. Travailler dans ces conditions est exactement la raison pour laquelle je fais du WWOOFing. Comme, concernant les WWOOFers, ont ne travaille pas pour un sale air (fais c’que j’veux!), il n’y a pas cette compétition que l’on voit systématiquement dans le monde du travail. L’ambiance est décontractée et chaleureuse. Estelle chante très bien « Le poinçonneur des Lilas » et Nicolas est d’un tempérament très joyeux. Et moi, de mon côté, je fais de mon mieux.

A l’heure du déjeuner, on passe dans la caravane. Une caravane ? Et oui, ils ne vivent pas encore sur leur lieu d’exploitation. Ils ont installé une caravane bien vieille et bien rigolote pour leur éviter de rentrer à l’appartement et, ainsi, gagner du temps.

Le repas est succulent. Estelle et Philippe pratique la politique du bien manger. La qualité des aliments est importantissime chez eux et ça me va bien.

Le reste de l’après-midi, Nico et moi, on plante des patates et des patates on plante. On discute et le temps passe tranquillement. A 18h30, on quitte le terrain. Grosse journée ! Pour un WWOOFer, j’entends.

Juste après le boulot, on file à Gourdon, à 15 bornes, où une petite bande « d’indignés » organise une assemblée populaire. Pourquoi pas découvrir ce mouvement et ce qu’il propose ! Surtout que comme tu peux le lire dans la rubrique « Qu’elle est mon idée » j’explique que l’action des «indignados de la plaza del rey » à Madrid, a inspiré la mienne et mon voyage.

Quand on débarque, une vingtaine de personnes, en cercle, les fesses sur des tapis de sol ou du carton, écoute, religieusement un orateur barbu. On écarte le cercle et on nous invite à s’asseoir. On s’assoit. Rapidement, on découvre le fonctionnement de l’assemblée populaire. Pour prendre la parole, on lève la main. Une personne se charge de mémoriser les mains qui se lèvent et redistribue, du mieux qu’il le peut, la parole. Il y a trois autres signes : un qui signifie que l’on est d accord, ou pas, avec celui qui a la parole et un autre pour dire que la personne prend trop de temps et qu’elle doit écourter sont intervention. Pourquoi pas.

Après une heure dehors, le froid et la police aidant, on doit déguerpir. Quelqu’un de la ville, j’imagine, propose une salle, à deux pas, pour terminer cette assemblée populaire. Dans cette salle, le dialogue reprend. Plusieurs personnes ont apporté à manger et à boire et, à la bonne franquette, on casse la croûte.

Après 3 heures de dialogue, le bilan est simple. Il y a du bon et du moins bon. Sur le principe de réunir la population et de tisser du lien social, c’est génial. Toutes les couches de la société étaient présentent dans cette assemblée. Mais, comme toujours dans les conversations de groupe, certains s’écoutent parler et font briller leur ego, d’autres prêchent pour leur paroisse et d’autres sont hors sujet. Il est impératif de se réunir et de parler mais il est vital de mettre en place des actions claires et nettes à l’échelle individuelle. Nous avons le pouvoir, nous le peuple. Si nous tous, par exemple, au lieu d’acheter toutes les semaines trois kilo de viande, nous n’en achetions qu’un kilo, nous n’en mourrions pas, d’une, et, de deux, un impact notable et rapide sur l’environnement serait une conséquence direct de cette action individuelle si elle existait à l’échelle planétaire, bien sûr. C’est simple. On ne peut pas critiquer la société si nous ne faisons pas le moindre effort pour la modifier. La solution est à l’échelle individuelle. Un pays n’est qu’un ensemble d’individu. Si tout les Français, par exemple, arrêtaient d’acheter de la pâte à tartiner, les fabricants n’en vendrait plus en France, point. Il ne s’agît pas d’être un citoyen « parfait » car ça n’existe pas mais on peut agir tout de même, non ? Un minimum, non ?

Je suis satisfait d’avoir découvert les indignés de Gourdon. Tout ce qui est vécu doit être vécu, tout ce qui est fait doit être fait et la meilleure manière de faire, c’est de faire. Alors action !

A minuit, nous sommes de retour à l’appartement. La journée a été longue, encore. L’ambiance ici est bonne et mes hôtes sont des gens biens. Pour autant, il y a deux trois trucs qui ne font pas partie de ce que je recherche en menant mon aventure de WWOOFeur. Comme par exemple dormir et vivre en appartement ou travailler 6 ou 7 heures par jour. Je ne vais pas rester longtemps parmi eux. Je viens de prendre ma décision. Demain je contacte une autre ferme. C’est dommage. C’est comme ça.

Jeudi 22 Mars :

Hier, j’ai découvert ce que tous les paysans et agriculteurs du monde connaissent, les caprices et la puissance de dame nature. Le vent, suite, d’après Estelle et Philippe, à un mauvais choix de leur part, a arraché les bâches des deux serres (jumelles). C’est la cata ! Ils ont absolument besoin de cet outil pour pouvoir proposer un panier de légumes variés aux membres de L’AMAP qu’ils fournissent. Les drapeaux sont en Vienne (si tu trouves pas, alors!). La quantité de travail et le coût financier de cet événement est énorme.

A l’heure du déjeuner, la conversation est exclusivement centrée sur ce p…… de vent à la c… ! Pour autant, ils font pile (on peut bien rigoler, non !) avec calme et réagissent bien. Les idées fusent, l’analyse des tenants et aboutissants se peaufinent et des décisions sont prises. Là se trouve la force des Hommes. Dans la difficulté se découvre les caractères. Et ceux qui m’entourent sont dotés de très bons caractères. Lucides, efficaces et sains, voilà ce qu’ils sont. Bravo à eux.

Demain, je prends la route. Déjà ! Après 5 jours ? Pourquoi ? Comment se fesse ? Et bien, c’est tout simple, tout change. C’est comme ça, hey, Alexandra ! Je dois avouer que je kif pas trop de vivre en appartement et le WWOOFing, pour moi, c’est la campagne, les arbres, les petits chemins, les oiseaux, la boue, les tracteurs, les bottes et tout et tout. Et puis il y a cette autre chose dont j’ai parlé a Estelle. Je trouve les journées trop longues. J’ai rien contre le boulot, c’est pas le problème. Mais quitte a bosser 7 heures par jour, je rentre à la ville et je me trouve un job avec salaire et tout et tout. Le WWOOFeur doit avoir du temps pour lui pour découvrir la région en se baladant, préparer des repas, se reposer, méditer, jouer de la guitare, aller sur face de bouc, se faire un thé ou courir dans les bois, bref, pour vivre. Ici, malgré que j’apprenne beaucoup avec eux et malgré leur sympathie, je n’ai pas assez de temps pour moi. Alors, je bouge et continue mon chemin vers de nouvelles contrées.

Dimanche 25 Mars :

Je suis maintenant dans le Tarn et Garonne, à Bégayne, à Trente bornes de Caussade, du côté de Montauban, dans le 82. Je débarque dans un éco-lieu, où Yourtes et Bus aménagé occupent le terrain. La clic qui m’accueille est diversifiée et je sens que ça va être intéressant de passer quelques jours ici. Leurs idée est de créer un endroit pour accueillir des gens porteur de projets du type « maison écolo-économique », pour former un collectif, uni par des aspirations communes. Intéressant.

J’aurais des tas de trucs à raconter dans l’article suivant concernant cette association et ses actions. Pour clore cet article fa (y’a plusieurs note, hey Heliot!), je vais te raconter l’anecdote d’hier soir dont je tiens un des rôles phares. Rôle qui aurait pu tourner à celui de victime.

Quand on arrive à Vaour, Olaf et moi même, il est 18 heure, nous sommes en retard. Nous avons raté le défilé du carnaval des habitants du village. Pour nous rattraper, nous nous accrochons aux culs des fanfares qui se livrent un duel féroce. L’ambiance est plus que bonne enfant, elle est bonne en tout. Le soleil chauffe et colore la peau des femmes qui, pour fêter le printemps, ont sorti leurs plus légères robes. Les enfants font se qu’ils savent faire, ils courent et ils crient.

L’apéro concert commence dans la salle des fêtes (accomplies) et la population se dirige droit vers la buvette. La soirée se passe gentiment. La musique n’est pas désagréable, ce qui est déjà un petit succès et, la pitance est bonne. J’ai même fait une entorse à mon principe de vivre sans argent pour m’offrir une assiette de bœuf Bourguignon fait par les villageois, trois euros de bonheur. La soirée se passe gentiment et je rencontre des gens. Ce village, ou plutôt devrais-je dire, ce coin, est porté par une ambiance milito-tranquilou-cool. Les gens dégagent quelque chose. Je n’ai, évidemment, rien contre les Parisiens mais c’est sûr, on ne vit pas pareil ici, que là-haut, à la capitale.

Après le repas, j’apprends que le projet de mes hôtes est de faire la bringue jusqu’au bout de la nuit. Je n’ai pas le même projet. J’ai fait ça et à l’époque je détestais le monde entier : « tousdes cons ! » étaient mes premiers mots au réveil. Depuis quelques temps maintenant, je dors la nuit et, depuis que je dors, la vie est belle. Donc, mon projet pour ce soir, dormir. Le truc, c’est que nous sommes à 25 bornes de « ma » Yourte et de son lit et qu’aucun de mes hôtes ne souhaite faire l’aller et le retour pour m’y jeter. Je les comprends car, si comme moi tu sais compter, ça fait quand même cinquante kilomètres au compteur.

Je pars donc, avec l’aide de Johan, à la recherche de quelqu’un qui rentre pas trop tard et pas trop loin de Bégayne. Quelques minutes plus tard, une charmante demoiselle se propose de faire un détour pour me rendre service. C’est beau la vie.

Une petite heure plus tard, nos regards se croisent, c’est l’heure du départ. Cette demoiselle, Vanessa, doit choper un train de nuit, à 45 minutes d’ici et est ok pour faire 15/20 bornes de plus pour me ramener, cool. Dans la voiture, on fait plus ample connaissance et la conversation est sympathoche. Elle me dit qu’elle n’est pas du coin et qu’elle connaît mal les petites routes. On discutaille le bout de gras et on se perd une première fois. Le temps passe. On fait demi-tour, on discutaille encore et on se perd une seconde fois. Le temps défile et la pression monte d’un cran. Elle me dit qu’elle ne peut pas rater son train car elle l’a déjà raté ce matin et qu’elle doit aller à Strasbourg pour le baptême de sa nièce et tout et tout. La conversation continue mais elle est moins…fluide. On sent bien tout les deux qu’on a un problème. On se perd une troisième fois, gloups ! Le temps défile à la vitesse de la vitesse, ça sent le roussi cette histoire. Elle me fait comprendre que si elle ne prend pas, maintenant, la direction de Caussade et de sa gare, c’est mort pour elle. Le truc c’est que l’on est au milieu du chemin me concernant entre la salle des fêtes et la yourte. Un p…. de problème pour moi. Je tente de téléphoner à mes hôtes, répondeur. La tension continu de monter. Elle voudrait bien m’aider mais ne le peut pas. Elle me dit qu’elle doit, MAINTENANT, prendre la route pour son train. Je suis en plein délire. Je lui demande le numéro d’une de ses potes qui est encore à la salle des fêtes et je sors de la voiture. « Désolé ! » me dit-elle avant de disparaître.

Je vois la voiture s’éloigner. Il fait nuit, je ne sais même pas où je suis pour l’indiquer à quelqu’un pour venir me chercher. Je tel la pote de Vanessa, répondeur. Je tel les gars, répondeur. Et, sans déconner, comme dans les films, j’ai qu’UNE pauvre barre de batterie sur mon téléphone. Ça s’annonce mal, très mal.

J’éclaire, avec mon portable, les panneaux de direction et j’essaie, tant bien que mal, de faire le point. Si personne ne me répond, je n’ai pas d’autre choix que de tenter de rentrer à pied à la salle des fêtes mais comme on a tourné dans tout les sens, je ne sais pas vraiment par où aller ou, rentrer à la ferme mais là, j’ai au moins quinze bornes à me taper…

Je commence ma randonnée by-night en me disant que j’ai là, une bonne occasion de tester la patience que je me fabrique depuis un moment et le calme revient. Je marche.

Je marche depuis dix minutes quand j’aperçois une voiture au loin. Dur dur le stop de nuit. Je lève non pas le pouce mais les deux bras comme si ma vie en dépendait. A priori, le message passe et la voiture ralentie et s’arrête à ma hauteur. Deux jeunes gens. Je leur explique vite fait le topo et ils me disent qu’ils vont à….la salle des fêtes (c’que j’dis mais pas c’que j’fais!) que je viens de quitter. Je pousse un grand ouf de soulagement et les mecs dans la voiture sont sacré empereur de ma nuit. Quelle veine, hey Gislaine ! Ils m’ont même offert une bière que j’ai bu d’un trait.

De retour à la salle des fêtes mon histoire remporte un franc succès, tout le monde se marre. Je rencontre la pote de Vanessa, on se marre. Je demande le numéro de Vanessa et je l’appelle. A ce moment là , je n’ai qu’un souhait: pourvu qu’elle est chopé son train. Je lui téléphone et elle me dit qu’elle est sur le point de monter dans le train. On rigole ensemble de cette histoire de fou. Elle a voulu aider un inconnu et ça a foiré. Entre son train, sa nièce, sa famille, ses potes et moi, un illustre inconnu, elle a fait son choix. Et ce choix, je le comprends. Qui aurait fait l’autre choix. Au téléphone, je la rassure car elle était mal de m’avoir laissé, comme ça, comme un con, en pleine nuit, dans un coin paumé du Tarn et Garonne.

Au final, cette histoire est un bon souvenir et un bon souvenir, ça ne fait jamais de mal.

Voyager plus pour vivre plus !


Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Vivresansargent 2031 partages Voir son profil
Voir son blog

l'auteur n'a pas encore renseigné son compte l'auteur n'a pas encore renseigné son compte