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Eva, le sf à l’européenne

Publié le 28 mars 2012 par Unionstreet
  • Eva, le sf à l’européenne

Eva :

S-F à l’européenne.

Pitch : En 2041, les humains vivent en compagnie de robots de fonction exécutant toute sorte de tâches. Mais le projet que l’on impose à Alex est bien plus ambitieux et risqué : Avec l’approbation de l’université prestigieuse qui l’a formé, il se voit confier la création du premier robot-libre et recherche alors un modèle humain idéal : Ce sera la petite Eva.

Robot et humain : Fusion impossible ? C’est le fantasme absolue qui hante la science-fiction depuis sa naissance. L’homme créateur peut il prendre la place de la nature et crée un être à son image et surtout en a t-il le droit ?

Eva s’inscrit donc dans la droite lignée du cinéma de science-fiction des années 1970 à aujourd’hui qui n’a fait qu’engendrer des êtres hybrides fantastiques, organiques et mécaniques dans Terminator et Robocop, hyper-intelligent dans 2001, L’odyssée de l’espace ou doué d’amour et de compassion dans A.I. Le cinéma réalise ce que la science ne peut qu’effleurer par le pouvoir de l’illusion.

La science-fiction place l’homme face au dilemme de la création et ses limites éthiques en le dotant d’un pouvoir inouïe, presque magique et pour finir tentant. Tel un docteur Frankenstein cloitré dans son laboratoire, le personnage d’Alex est donc l’archétype du chercheur en quête de perfection. Pas très novateur me direz-vous, mais l’originalité du film n’est pas là.

Mélodrame et science fiction : improbable rencontre. Le cinéma américain nous a en effet habitué à un traitement de la science-fiction quelque peu figé car répondant aux codes du cinéma d’action spectaculaire, forcément dominant. Quoi de mieux il est vrai que ce genre de tous les possibles pour offrir aux spectateurs des images de contemplations uniques !

Cela dit, les contraintes budgétaires du cinéma européens ont du poussé le réalisateur de Eva à une approche résolument plus intimiste et propose en conséquence un traitement sobre et anti- spectaculaire du récit de science-fiction.

C’est là que le film va chercher son originalité. La science-fiction s’immisce dans le quotidien jusqu’à disparaître en arrière plan et laisse toute sa place au drame humain pour ensuite resurgir avec fracas. Les relations ambiguës d’Alex avec son frère, son amour de jeunesse et la petite Eva construisent le cœur du récit et imposent une tradition mélodramatique du triangle amoureux, du secret et de la passion. Impossible hélas d’en dire plus car toute information supplémentaire gâcherait la vision du film qui repose en en grande partie sur des effets progressifs de révélations.

Le cinéma espagnol et l’univers de l’enfance. Le film impose tout de même un objet de fascination : La petite Eva. Elle est le souffle de vie du film quand tous les personnages adultes semblent tristes, apeurés, rongés par le regret.

L’univers de l’enfance est, dans le cinéma espagnol, un portail vers le fantastique et le merveilleux. Que ce soit dans Le labyrinthe de Pan de Guillermo del Toro ou dans l’Orphelinat, les figures d’enfants ramènent souvent à l’insouciance et aux contes, au pouvoir de l’imaginaire qui nous délivre des horreurs du réel.

Le film baigne tout du long dans un décors de neige triste et immobile dans le lequel la jeune fille vêtue d’un manteau rouge semble être le seul motif de mouvement et de vie. Elle est la lumière, le modèle qui motive notre héros Pygmalion dans sa quête de la perfection.

Un flot de référence à l’univers S-F. On l’a dit, le film joue la carte de la discrétion en matière dereprésentation d’un univers S-F. Pour autant, nombre d’éléments sont facilement reconnaissables et renvoie immédiatement le spectateur à l’imaginaire de science fiction du cinéma hollywoodien. Un petit jeu de référence s’impose :

Nous avons le robot domestique à apparence humaine, sorte de C-3PO en version finalisé, tout aussi fidèle et burlesque que l’original. R2D2 lui est représenté par un chat-robot qui n’est pas doté de parole mais sait se faire comprendre et ne manque pas de caractère.

L’outil informatique qu’utilise Alex et qui lui permet de concevoir un cerveau artificiel complexe à l’apparence de la machinerie informatique de Tron, représenté ici par une simple lentille optique qui s’éclaire brusquement. C’est en fait un projecteur et l’objet le plus stupéfiant du film puisqu’il permet de modéliser dans l’espace une représentation concrète du cerveau artificiel et de manipuler divers éléments microscopiques par de simples mouvements tactiles dont la beauté et la fluidité rappelle immédiatement Minority Report et sa séquence culte de manipulation d’images aux allures orchestrales.

Verdict : Ne pas révéler l’intrigue de Eva c’est évidement se priver de commenter les séquences les plus marquantes. Passé la nécessité de la révélation, le film impressionne par la cohérence de son univers visuel parfaitement maitrisé qui impose une vision européenne singulière de la science- fiction traversée tout du long par une véritable exigence réaliste. En même temps il ne déboussole pas le spectateur en jouant sur des références familières.

Eva est volontiers poétique, romantique et délicat mais n’emporte pas tout sur son passage, faute à une certaine retenue qui prive le film d’un traitement mélodramatique total et assumé. Il confirme en tout cas le talent immense de Daniel Bruhl, et d’un jeune réalisateur espagnol à surveiller de près.

Eva

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