Magazine Culture

Les romans durs de Simenon, 1934-1937

Par Pmalgachie @pmalgachie
Les romans durs de Simenon, 1934-1937Suite du parcours dans les premiers volumes des "romans durs" de Georges Simenon. Aujourd'hui, le tome 2.

Les clients d’AvrenosUne saison de langueurentre Ankara et Stamboul, villes cosmopolites qui invitent à traîner de bar enrestaurant, de boîte de nuit en bar... Et rebelote le lendemain, selon un cycleimmuable au cours duquel se rencontrent les mêmes personnes plus ou moinsinactives - et plutôt plus que moins. La légèreté trompeuse avec laquelleévoluent ces Clients d'Avrenos les place au bord d'un précipice qu'ils nevoient même pas...Au sein de cette fauneinterlope, Simenon distingue Bernard de Jonsac, personnage sans réelleépaisseur qui se laisse aller au gré de distractions prévisibles. Et qui nousparaît aujourd'hui délicieusement suranné. A dire vrai, il l'était peut-êtredéjà dès la première publication: Jonsac, en effet, est «drogman» àl'ambassade de France. La fonction n'a rien d'anglo-saxon, contrairement à cequ'on pourrait penser (le mot est d'origine grecque ou arabe). Il s'agitsimplement d'un interprète dans les pays du Levant - mais le titre a étésupprimé en... 1902.De toute manière, Bernardde Jonsac fait passer le travail bien après ses plaisirs, au point de se faireréprimander par l'ambassadeur. Dissipé, le drogman épouse Nouchi, qui estpeut-être hongroise d'origine mais dont la profession ne fait aucun doute:elle est entraîneuse au Chat noir, un cabaret d'Ankara. Jonsac aime bien Nouchi,qui longtemps ne lui donne pourtant pas grand-chose d'elle-même, mais pas aupoint de lui proposer le mariage. En fait, la belle de nuit est sur le point dese faire expulser de Turquie et il lui a offert cette solution.Forcément, elle rencontreles amis de Jonsac. Dans un premier temps, elle ne les trouve pas intéressants.Mais, bientôt, elle ne peut plus se passer d'eux, qui lui tournent autour commedes insectes autour d'une flamme. L'oisiveté porte au badinage, ou plus siaffinités - ce sera longtemps un mystère... Pendant que sa femmepapillonne, Jonsac repère une jeune fille qui est tout le contraire de Nouchi.Lelia, en contraste avec le monde perverti où il vit, lui paraît le comble dela pureté. Qu'il faut corrompre, d'une certaine manière, pour établir unsemblant d'équilibre entre les choses...

Les demoiselles de ConcarneauJules Guérec est resté unpetit garçon, bien qu'il ait la quarantaine et qu'il dirige la petiteexploitation de pêche familiale. Ses sœurs, ses aînées, sont les véritablespatronnes, surtout Françoise et Céline, qui passent leurs journées à tenirl'épicerie et les livres de comptes. Marthe est sortie du cercle en épousantEmile Gloaguen, le secrétaire du commissaire de police de Concarneau. Mais elle a en quelquesorte délégué son pouvoir à son mari, considéré comme le seul homme sensé dansl'histoire. Puisque Jules garde la marque d'une faute passée: un enfantillégitime qu'il a fallu faire oublier de peur du scandale. Et voilà que Jules,décidément incapable d'autre chose, fait une nouvelle bêtise, que soninquiétude double d'une véritable catastrophe. A Quimper où il représentait lesthoniers de Concarneau à la réunion du syndicat, ses pas l'ont mené vers la rueoù traînent les femmes faciles et il y a laissé cinquante francs dont il nesait comment justifier la disparition. Tout à ses penséessombres, au volant de sa nouvelle voiture qu'il maîtrise encore mal, dans lanuit qu'il traverse pour la première fois à la lueur des phares, il n'a pas letemps de voir surgir un gamin devant ses roues qu'il l'a déjà écrasé. Paniqué,il ne s'arrête pas tout de suite, revient sur ses pas après un moment, voit unattroupement, rentre finalement chez lui et choisit de régler le problème descinquante francs manquants en annonçant qu'il a perdu son portefeuille jetédans des cabinets.Entre la peur de ses sœurs et de la police, dont son beau-frère est un digne représentant, Julesmûrit un remords croissant avec ce qu'il apprend de la mère célibataire dont ila tué un des deux enfants. Marie Papin est pauvre, il entreprend de l'aider enengageant son frère, à demi simplet, sur un bateau. Sans demander l'avis de ses sœurs qui le prennent mal et y voient une manœuvre destinée à leur cacherquelque chose. On ne peut pas leur donner tort, d'autant moins que Jules, dansson désir de racheter sa faute jusqu'au bout, s'imagine déjà marié avec MariePapin dont il se croit amoureux. Françoise et Céline, toujours soucieuses depréserver la cohérence de leur famille, ne peuvent laisser faire cela. La tension monte, lescandale éclate, le pauvre Jules ne sait plus où il en est de sa vie ni de cequ'il veut en faire...Le drame familial estintense, le point de basculement est évident et Simenon a traité ici un de cesdérapages qu'il affectionnait.

Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Pmalgachie 8645 partages Voir son profil
Voir son blog

Dossiers Paperblog

Magazines