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[note de lecture] "Et Leçons et coutures" de Jean-Pascal Dubost, par Jacques Morin

Par Florence Trocmé

DubostC’est un livre ambitieux que Jean-Pascal Dubost donne ici, dont une clé se cache sous le titre. Il y a les auteurs qui s’inscrivent tacitement dans la file des poètes de littérature française, ce sont la majorité, et ceux qui de leur fait préfèrent intégrer les poètes de langue française.  Jean-Pascal Dubost a choisi cette option plus sélective.  Le titre donc, en emboutissant les deux mots, on obtient le mot : lectures. Et l’auteur en effet tente de régler une bonne fois toutes les dettes de lecteur qu’il a contractées envers les nombreux écrivains qui l’ont inspiré, volontairement en citant ses sources et surtout d’une façon plus ambiguë puisque parfois certains emprunts ne sont pas conscients : l’auteur est plusieurs, qui s’entend comme un jeu de clés, comme un jeu d’ « ils ». Il ajoute pour être tout à fait clair : Dette est plagiat avoué. Ainsi va-t-il pouvoir rendre hommage à une centaine d’auteurs passés ou vivants, français ou étrangers, tout au long de son livre. Chaque nom recensé devient titre du poème. À partir de là, le texte peut avoir un rapport évident ou n’en avoir aucun a priori, on entre, une fois allégeance faite, dans la liberté la plus totale, et c’est le mot, le travail sur les mots, les figures de rhétorique qui se font la part belle. Jean-Pascal Dubost est un pur styliste, il rameute certains vocables perdus depuis Villon ou Rabelais, dépoussière des locutions obsolètes et autres médiévismes, il recycle des normandismes désuets et, fort de ces rattrapages lexicaux, il invente lui-même à tour de bras. Jeux de mots : les benêts d’âne, miss terre est boule de gomme, ton frère Ça-Moi,… mots-valises : génitence (de génital et pénitence), ou néologismes parlants : barbaroques, écholalies : pochades pochardes… je ne fais qu’effleurer ces ingrédients divers et disparates et disparus… Pour le lecteur un peu désarçonné, nombre de notes (scholies) sont adjointes pour mieux saisir le sens et le travail sur la langue. Jean-Pascal Dubost n’ignore pas que le revers d’un tel ouvrage serait qu’on le traite de vaniteux ou de hautain, ce qu’il devance en affirmant qu’il se moque de ces reproches prévisibles. Une chose est sûre, en lisant Jean-Pascal Dubost, on entre en immersion dans la langue, dans le vocabulaire, dans les tournures, dans les mots, avec une double trajectoire aussi bien littéraire qu’historique. Quiconque aime lire ajoutera cette lecture à celles de Jean-Pascal, chaîne en construction. Enfin dernier condiment qui tend à épicer l’ensemble (on pourrait croire en un recueil rébarbatif), l’humour ; et une façon ludique de se prendre au sérieux. 
 
 
Jean-Pascal Dubost, Et Leçons et coutures, Éditions Isabelle Sauvage, 2012. 
 
Sur ce livre, lire aussi cet article de Bruno Fern (chez remue.net) – Poezibao publiera début mai un article d’Antoine Emaz


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