Comment surmonter l’épreuve que constitue le décès d’un conjoint? Comment faire le deuil de quelqu’un qui se révèle finalement très différent de ce qu’il prétendait être? Et surtout, comment reconstruire une histoire d’amour alors que l’on n’a pas pu accepter la perte et que l’on éprouve un grand désarroi face à la découverte de la vraie personnalité de celui que l’on pensait pourtant connaître parfaitement?
Ce sont les questions que pose L’Amour et rien d’autre, le premier long-métrage de Jan Schomburg.
Au début du film, son personnage principal, Martha, nage en plein bonheur. Son conjoint, Paul, avec qui elle vit depuis plusieurs années, lui annonce qu’il a décroché son doctorat en médecine et qu’un poste l’attend à Marseille. Le couple se prépare donc à quitter l’Allemagne pour s’installer dans le sud de la France. Paul part le premier, afin de démarrer sa nouvelle carrière, pendant que Martha prépare les cartons pour le grand déménagement.
Le lendemain, le rêve tourne au cauchemar. La police frappe à la porte de la jeune femme pour lui annoncer que son mari s’est donné la mort à Marseille.
Martha refuse tout d’abord l’évidence. Comment Paul a-t-il pu se suicider alors qu’il avait tout pour être heureux, au moment où débutait une nouvelle vie pleine de promesses? Non, ce n’est pas possible…
Pourtant, les photos lui confirment la funeste nouvelle. C’est bien son mari que l’on a retrouvé mort dans sa voiture, dans le sud de la France. Le choc est terrible, et il va l’être encore plus quand elle va également se prendre la vérité en pleine face : Paul n’avait pas décroché de poste de médecin. En fait, il n’a même pas passé son doctorat. Sa vie étudiante, le compte-rendu de ses journées… Tout cela était totalement inventé.
Au désarroi provoqué par la perte de l’être aimé s’ajoute un profond vertige. Comment a-t-elle pu se laisser ainsi duper pendant des années? Comment a-t-elle pu laisser ce drame se produire?
Alors qu’elle est encore en plein dans les doutes et les interrogations, elle rencontre Alexander. Il ne ressemble pas physiquement à Paul, mais elle projette sur lui l’image de son défunt mari et s’attend à ce qu’il l’aide à reprendre le cours de sa vie d’avant le drame. Mais les choses ne sont pas aussi simples…
Autant vous prévenir tout de suite, malgré ce que laisse présager son titre de comédie romantique cheap, L’Amour et rien d’autre baigne dans une ambiance grave et lourde, assez étouffante. Le rythme est lancinant. La photo joue sur des tonalités grises cafardeuses. Bref, c’est un film à déconseiller fortement aux personnes dépressives, car le cinéaste tente de nous faire ressentir la douleur et à la confusion de l’héroïne…
Le problème, c’est qu’il va jusqu’à adopter une mise en scène complètement atone, qui, si elle se défend par rapport au parti-pris initial, plombe aussi considérablement le film et constitue finalement un frein à notre empathie vis-à-vis de son personnage.
Heureusement, Jan Schomburg a eu la bonne idée de confier le rôle à Sandra Hüller, qui se révèle être une excellente actrice. Ou plutôt, qui confirme être une excellente actrice, car elle avait déjà remporté l’Ours d’argent à Berlin pour son rôle dans Requiem de Hans-Christian Schmid
Toujours juste, aussi impressionnante dans la retenue des émotions que dans les scènes où le personnage parvient à se libérer de sa douleur et de ses angoisses, elle porte le film sur ses frêles épaules.
Soyons francs. Sans elle, il n’est pas du tout certain que L’Amour et rien d’autre et son approche un peu trop sobre de sujets aussi forts que le deuil et le mensonge, ait retenu notre attention. Si le film mérite le coup d’oeil, c’est surtout pour Sandra Hüller et sa performance d’actrice, justement saluée par des prix d’interprétations dans plusieurs festivals. Pour elle et rien d’autre (ou presque)…
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L’Amour et rien d’autre
Über uns das All
Réalisateur : Jan Schomburg
Avec : Sandra Hüller, Georg Friedrich, Felix Knopp, Kathrin Wehlisch, Valerie Tscheplanowa, Stephan Grossmann
Origine : Allemagne
Genre : interdit aux dépressifs
Durée : 1h28
Date de sortie France : 18/04/2012
Note pour ce film : ●●●●○○
contrepoint critique chez : Le Figaro
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