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ENFANT, 11 ANS, SANS PAPIERS et CHAMPION FRANÇAIS D'ÉCHECS

Publié le 01 mai 2012 par Abelcarballinho @FrancofoliesFLE

 

  echec

A 11 ans, Fahim  Mohammad est en situation irrégulière et sans domicile fixe en France depuis 2008. Samedi 21 avril, il est devenu champion de France pupille d’échecs. Depuis, il aurait du intégrer l’équipe de France, mais pour participer à des tournois internationaux, il faut un passeport pour voyager.

Au rez-de-chaussée d’une tour de Créteil, dans le petit local du club d’échecs Thomas-du- Bourgneuf, un gamin vêtu d’un sweat à capuche est affalé sur le canapé. Fahim Mohammad dîne ici avec son père presque tous les soirs, plus rarement il y dort. Il vient surtout s’entraîner. Nura Alam, son père, pointe du doigt un amas de coupes perchées sur le micro-ondes marron et déclame, les yeux grands ouverts : “Champion Ile-de-France 2010, champion de Paris…” Faute de place, d’autres trophées campent dans l’arrière-salle. Fahim semble réservé, presque distant par rapport à tout ça.

Après quatre ans en situation irrégulière, à vadrouiller entre les hôtels sociaux, avec même un bref passage sous une tente, il a trouvé un peu de stabilité dans des familles proches du club. Samedi 21 avril à Nîmes, Fahim est devenu champion de France des moins de 12 ans. Comme il est scolarisé depuis trois ans en France, ce titre aurait dû lui ouvrir les portes de l’équipe nationale. Théoriquement.

“Ils ne voulaient pas que je joue aux échecs”

Fin 2008, Fahim et son père débarquent en France en avion “avec un passeur qui nous a repris ensuite les passeports”, se remémore-t-il. Ils ont fui le Bangladesh pour des problèmes politiques. “Mon père était dans le clan qui a perdu les élections présidentielles. Ils l’ont menacé de s’en prendre à moi.” Fahim a retenu de cet épisode qu’“ils ne voulaient pas que je joue bien aux échecs. Ils étaient jaloux”. Tandis que, dans un français parfait, son enfant pèse chaque mot pour répondre à nos questions, le père sort d’un classeur des articles de journaux en anglais.
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Sur une photo à la une, on aperçoit Fahim en tournoi, juché sur trois chaises en plastique afin d’être à la hauteur de l’échiquier.

Depuis l’âge de 5 ans, il gagne la plupart des tournois qu’il dispute. Une fois arrivé à Paris, le premier réflexe de Nura Alam fut d’inscrire son fils à un tournoi d’échecs. A seulement 8 ans, il remporte la compétition réservée aux moins de 20 ans. Un entraîneur le repère et lui conseille d’aller faire un tour au club Thomas-du- Bourgneuf, où évolue une équipe de “top jeunes”, le plus haut niveau français. Ce jour-là, Xavier Parmentier, ancien entraîneur de l’équipe de France des jeunes durant vingt ans, y dispense justement un cours.

“J’ai vu arriver le gamin avec son père. Il ne parlait pas français. Je lui ai montré un problème (sur l’échiquier), il a désigné du doigt la solution, beaucoup plus vite que les gamins qui étaient là.”

Depuis, il entraîne bénévolement Fahim deux fois par semaine. De son côté, le jeune joueur doit s’exercer à la maison. “Mais il est encore un peu feignant, comme les gosses de son âge”, soupire son entraîneur. Fahim reconnaît lui-même qu’il “ne travaille pas beaucoup, beaucoup”. Un peu nonchalant, un peu distrait, l’enfant a vu son niveau de jeu évoluer en dents de scie, principalement à cause de sa situation matérielle.

Des organismes comme l’Ofpra (Office français de protection des réfugiés et apatrides) et la CNDA (Cour nationale du droit d’asile) ont rejeté en août 2010 sa demande de titre de séjour et celle de son père, au motif que la femme et deux enfants de Nura Alam demeurent toujours au Bangladesh. Décision confirmée en appel par le tribunal administratif la même année. Accueillis un temps dans des hôtels sociaux d’urgence par France terre d’asile, Fahim et son père se retrouvent à l’été 2011 de nouveau à la rue.....  lire la suite
source: Les Inrocks




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