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Cinéma et indépendance par Ted Hope

Publié le 02 mai 2012 par Monartiste

Comment le cinéma indie (*) renaîtra de ses cendres grâce à l’émergence d’une vraie communauté de cinéma libre

Ted Hope

Je me suis très largement inspiré d’un article d’un producteur américain Ted Hope , qui avait déjà été repris sur le blog El cosmonauta. Je me suis permis de reprendre cet article et d’y apporter des modifications, car je l’ai trouvé très inspirant et véritablement porteur d’espoir, d’idées et d’envies. Un courant de pensées, d’acteurs partageant les mêmes valeurs, se forme, j’ai souhaité ici l’alimenter, y apporter ma contribution et un peu de lumière. Vous pourrez trouver dans la boutique d’Amazon, des documents et des livres  qui sont dans la droite ligne de ce mouvement.

Texte de Ted Hope

L’industrie du cinéma est peut-être en crise, mais pas le cinéma, le modèle économique ne fonctionne plus, les grands studios n’investissent plus, adaptons-nous, soyons heureux de ce que nous faisons et acceptons le changement. Comment peut-on parler de la mort du cinéma indépendant, alors qu’il a à peine existé… Evidemment nous vivons une période de doutes et de remises en question, mais la solution n’est sûrement pas de criminaliser l’internaute, de se défendre contre son public et porter atteinte à sa liberté à travers des lois liberticides comme la loi Hadopi et la loi sinde. Un seul mot peut résumer ce que nous vivons : bouillonnement. Non pas le désordre, mais une recherche créative, fruit des bouleversements technologiques et d’un internet libre. Oui, il y a changement, mais cela peut être l’avènement d’un cinéma vraiment indépendant, d’un cinéma dirigé par les créateurs en relation avec le public et non pas par le marketing et l’appareil de distribution. Nous avons le pouvoir de tout réinventer avec cet outil spectaculaire qu’est internet. Nous avons les moyens en restant au contact du public de développer un vrai cinéma indépendant avec notre propre modèle économique.

Comme l’on change de terrain, il est temps de changer les règles du jeu, où tout le monde sera gagnant.

Toutes ces belles promesses peuvent être remises en question par les lois promues par les pouvoirs publics et poussées par les industriels et leur volonté de défendre un modèle obsolète.

Sous couvert de protéger la création artistique, ils imposent par tous les moyens une limitation d’accès à la culture, ce dont s’insurge Nicolas Alcàla, le directeur du projet  El Cosmonauta  : « Ne permettons pas que l’industrie des loisir, n’utilise les droits de propriétés intellectuelles, afin de limiter l’accès à la connaissance, que la puissance d’internet permet à plus de la moitié de la planète d’avoir accès. Un film sans public n’a aucune valeur, ce sont eux qui donnent un sens, nous ne devons jamais l’oublier. Ils ne peuvent être considéré comme des criminels parce qu’ils prennent ce qui est à leur portée. Et si la majorité ne va plus au cinéma, c’est à nous de nous adapter. S’ils préfèrent voir notre travail sur un ordinateur, à nous de leur proposer ce qu’ils veulent tout en leur rappelant que nous n’existons que par eux. Les contenus doivent aller où se trouve le spectateur et la seule chose que nous devons faire c’est de leur faire accepter nos nouvelles règles en leur proposant de la valeur ajoutée. il faut leur donner envie d’acheter et de vivre une expérience, mais cela ne peut se faire par une contrainte imposée par des lois répressives. »

L’avenir nous appartient.

Tout le monde veut tourner. Et, grâce au numérique, tout le monde peut tourner. Vite. Tout de suite. On n’a pas d’argent, mais on a des choses à dire. A montrer. A partager.  Ils n’ont pas toutes les solutions mais souhaitent prendre leur destin en main et s’émanciper du système grâce à internet. Ils ne voient justement pas les internautes comme des ennemis et s’insurgent même contre la criminalisation du téléchargement.

Derrière cette vague créative, il y a une volonté de jeunes professionnels qui n’est pas encore véritablement pris en compte par les instances publiques comme le C.N.C, d’affirmer son indépendance et de réaliser les films qu’ils souhaitent, comme ils le souhaitent sans carcan. Avoir à l’esprit de franchir une nouvelle étape au cinéma indépendant,  faisant en sorte que le terme « indie » ne soit pas aujourd’hui uniquement un qualificatif pour ranger les films dans une case. Au cours des quinze dernières années, le monde du cinéma a fait d’énormes efforts pour démystifier le processus de production et donner accès au cercle fermé du financement et de la distribution. C’est un premier pas, mais elle n’a pas donné aux cinéastes l’indépendance, le  vrai pouvoir de faire le film qu’il souhaite. Courir après le financement et essayer de mieux comprendre les subtilités de la production ont sans nul doute distrait la profession et tout particulièrement les créateurs indépendants de ce qu’ils devaient véritablement entreprendre. Nous avons appris à faire des films et la façon de les mettre sur le marché, c’est à notre génération de franchir une nouvelle étape en s’adjugeant la commercialisation et la diffusion des films, pour réussir à les faire comme on le souhaite et à les voir comme on souhaite les voir. Evidemment, nous avons aujourd’hui plus de possibilités, il n’y a jamais eu autant de films, il faut le reconnaître, mais ce n’est pas encore la liberté. C’est à nous de prendre notre avenir en main, de mieux connaître les attentes du public, d’aller à leur rencontre et de leur permettre de choisir, d’une manière intelligente. Nous devons assumer la responsabilité de raconter des histoires uniques d’une manière unique. Nous nous voulons innovateurs et révolutionnaires, mais cela nous vaut aussi des responsabilités supplémentaires. L’indépendance est à notre portée, mais nous devons faire ce que nous avions jamais fait auparavant: nous devons choisir.

Repenser l’économie du cinéma indépendant et offrir ce que nous pouvons faire de meilleur à une audience désireuse de nouveautés et d’expériences est la plus belle des victoires…

L’actuel modèle économique de l’industrie audiovisuel s’appuie sur des consommateurs qui ne font pas de choix, qui agissent par impulsion et consomment ce qu’on leur propose (chaîne classique, broadcasting). Nous devons leur donner les moyens de faire des choix. La révolution numérique leur offre la possibilité d’avoir accès à un contenu exceptionnel, mais pour pouvoir choisir d’une manière intelligente et non impulsive, il faut pouvoir rechercher selon ses goûts et savoir où chercher en s’appuyant sur sa culture. Lorsque nous ne verrons plus les internautes comme des ennemis, que nous les impliquerons dans les processus et qu’ils ne seront plus considérés uniquement comme des consommateurs, les choses changeront et le cinéma retrouvera de la valeur à leurs yeux.

Il est nécessaire de prendre conscience qu’une culture libre sera très différente du milieu dans lequel les films sortent actuellement. Adieu sans doute la gloire et le prestige, mais nous allons mettre fin à l’auto-censure que l’on s’inflige pour entrer dans le moule et nous adapter à un modèle industriel, qui a été formaté pour Hollywood et le marché du divertissement. Nous allons atteindre un public avide de quelque chose de nouveau, quelque chose de réel, quelque chose à dire sur le monde que nous expérimentons, quelque chose d’aussi complexe que les émotions qu’ils ressentent. En étant proche d’eux, nous pourrons mieux connaître leurs attentes.

Nous sommes dans une guerre culturelle, pas celle qu’essaye de nous imposer les pouvoirs publics, afin de couper le pays en deux «  défense des droits d’auteurs par la répression ou pas  » «  Hadopi – non Hadopi ».  Mais nous devons lutter pour ce que nous voulons voir, faire et ceux avec quoi nous voulons prendre du plaisir.

Les cinéphiles vont perdre cette bataille, parce que les cinéastes ont répondu aux appels des sirènes de la gloire et des récompenses, dans lequel un seul chanceux sur 3600 aura son travail récompensé. Nous devons voir la constitution d’une communauté de cinéaste comme un bien commun à défendre. La défense de la qualité du cinéma indépendant est entre nos mains.

Cinéma et indépendance par Ted Hope

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Par Ted Hope

Une fois que nous nous serons réveillés, mobilisés et rendus compte de l’opportunité et de la chance que nous avons.

Quelle est la culture cinématographique vraiment libre que je propose ? C’est celle qui utilise cet outil remarquable qu’est internet. C’est l’apport d’internet qui donne de l’ampleur à une entreprise qui jusqu’alors était basé sur le contenu limité et qui permet le passage à une entreprise qui cherche à combler tous les désirs du public, non seulement les souhaits du plus grand nombre comme le grand public, que celui des geeks au sein d’une niche.

Jusqu’à maintenant nous n’avons jamais eu ce type d’opportunité et la tragédie est alors que nous commençons juste à comprendre, ce que cela signifie, des forces contraires tentent de nous barrer la route.

La neutralité du web est constamment remise en cause et si les opérateurs et les studios hollywoodiens notamment arrivent à leur fin, nous perdrons cette formidable occasion d’être des cinéastes libres.

  • Une vraie culture libre respecte la gratuité de la culture cinématographique et les besoins et les désirs du public autant que ceux des cinéastes.
  • Une vraie culture de cinéma gratuite admet le film comme un dialogue et a besoin de cet échange pour comprendre sa communauté. Les participants à une communauté n’hésitent pas à s’engager et tout simplement à participer même s’ils n’ont pas d’intérêt ou de films en cours et s’investissent aussi pour agrandir le cercle de la communauté en invitant d’autres personnes. Nous donnons les moyens de choisir, de choisir ce qu’ils veulent voir ou faire. Nous devenons en quelque sorte les gardiens du temple, en invitant le public et les membres de la communauté à voter à favoriser ce qu’ils aiment avec leurs pieds, leurs yeux et leur argent, mais en les incitant à ne pas agir par impulsion, mais par acte réfléchi.
  • Un  professionnel du cinéma, membre de la communauté FREE CULTURE FILM, a compris que son travail n’est plus simplement de trouver un bon scénario ou de trouver une bonne pièce à adapter. Il reconnaît qu’il doit faire davantage pour trouver et justifier le financement. Un cinéaste vraiment libre doit prendre conscience que sa responsabilité réside aussi dans la nécessité de trouver un public, de lui donner envie, de le mobiliser ou encore de le secouer, pas seulement émotionnellement à travers ses films, mais aussi littéralement par contact direct, que cela soit par mailing, conférence, blogs, réseaux sociaux.
  • Le réalisateur ou le producteur reconnaît que la connaissance est le vrai pouvoir et que la propriété est une puissance fictive. Il n’a pas peur de partager, plus on a de connaissance, plus vite on avance. En partageant nos connaissances et nos compétences, on fera tout mieux, que cela soit dans le processus créatif, dans la production ou encore la distribution. Nous entrons dans une nouvelle ère, nous avons intérêt à nous rassembler pour ne pas se perdre.
  • Le cinéaste à l’ère du numérique et vraiment libre n’est pas limité par le matériel pour raconter son histoire. Le réalisateur libre n’est plus lié à la projection en salle, il ne la voit plus comme un passage obligé et ne se soumet  plus à la lutte sauvage qu’est la sortie en salle le mercredi. Où peu réussissent à dépasser la première semaine.
  • En créant une communauté autonome pour le cinéma où l’innovation sera la priorité. Le coût réduit de nos créations, nous permettrons de prendre plus de risques. Si nous voulons aller au-delà du qualificatif « indies » et de ceux qui ont déjà franchi avec succès la première étape en innovant techniquement dans la manière de raconter et d’aborder les histoires, il nous faut continuer le chemin en innovant dans la distribution.
  • Si nous sommes capables avec passion de produire 3600 films par an, nous pouvons avec un peu de cette énergie, nous mobiliser et construire une nouvelle communauté pour rassembler un nouveau public, créer de nouveaux modèles et de nouvelles sources de revenus. Il est temps de construire une alternative au système qui nous a pollué pendant des années. Il est une nouvelle fois temps de prendre la mesure de la responsabilité que représente l’indépendance. L’indépendance signifie connaître son projet de haut en bas, avoir envisagé toutes les options, connaître son public afin de taper juste, lui donner envie et pouvoir le solliciter si besoin.

Je peux vous assurer que ce travail sera lent et fastidieux, mais mieux nous connaîtrons notre public, plus nos films rencontreront leur public et nous obtiendrons la récompense d’une véritable interaction. Embrassons le changement, impliquons nous dans la production et la rencontre de notre modèle économique, mettons fin au qualificatif devenu fourre-tout « indie » et bâtissons une vraie Free Culture Film.

Ted Hope

Nicolas Alcala

Moi-même (plus modestement)

* le terme Indie fait référence au cinéma indépendant en provenance en majorité des Etats-Unis des années 90 à aujourd’hui, nait avec le festival de Sundance.

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