Il n’est jamais trop tard pour rendre un hommage : le mien arrive deux ans après le décès précoce de Guru, assurément l’une des personnalités du hip-hop conscient, et dont les influences musicales ont toujours été claires, comme sur ce projet en plusieurs volets, Jazzmatazz.
Le nom de cette compilation avec un fil conducteur toujours pertinent fait référence certes au jazz, style immensément vénéré et respecté par tous, dans tous les milieux musicaux, mais aussi et surtout à un titre de Quincy Jones, “Razzmatazz”. Je rend un hommage à quelqu’un qui, lui-même, rendit un hommage à un lieu, à un genre musical, et à des artistes contemporains (i.e. toute la ribambelle d’invités tout au long de l’album).
« Introduction » permet à Guru d’expliquer de quoi il va s’agir pendant les quarante-cinq minutes de cette « experimental fusion of hip-hop and jazz », tout en n’oubliant pas de présenter les différents interprètes qui vont se succéder derrière le micro ou en tant que musiciens.
Le début est superbe, de « Loungin’ » avec Donald Byrd aux trompettes et au piano, à « When you’re near » en duo avec N’dea Davenport (elle reviendra plus loin, sur le morceau « Trust me »).
Les auditeurs français, tout du moins les trentenaires, reconnaîtrons immédiatement MC Solaar sur « Le bien, le mal », en avant dernière position et avant le morceau qui me semble le plus faible et donc le plus dispensable, en toute fin d’album.
Les autres invités sont tout aussi fantastiques que ceux déjà nommés : Branford Marsalis, Ronny Jordan, Lonnie Liston Smith, Roy Ayers, Courtney Pine, Carleen Anderson, Gary Barnacle, Zachary Breaux, DC Lee, Simon Law. Pas une seule faute de goûts, les ambitions sont respectueuses à tous les points de vue, et c’est au final une très belle façon de faire découvrir, dix-neuf ans après sa sortie, le jazz aux néophytes (puisqu’il a presque disparu des productions actuelles) ou même une magnifique entrée en matière pour tous les réfractaires au monde du rap et du hip-hop. Les clichés, les préjugés, les frontières, tout tombe. Ne reste que la simplicité des émotions, l’humanité des paroles, le groove de la musique. Un pure moments d’émotions, signé Guru, à une époque probablement dorée pour le hip-hop.
(in heepro.wordpress.com, le 03/05/2012)