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Auguste Renoir à ses débuts…

Publié le 12 mai 2012 par Les Lettres Françaises

Auguste Renoir à ses débuts…

Renoir, entre bohème et bourgeoisie, Kunstmuseum, Bâle, jusqu’au 12 août 2012.

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Revu culturelle littéraire Les Lettres françaises Renoir

Lise Tréhot par Renoir

Cette exposition bâloise, qui est loin d’être pléthorique, a le mérite d’être claire et bien conçue. Elle montre quels ont été les premiers pas du jeune Auguste Renoir dans sa peinture et sa rapide évolution. Elle permet de comprendre comment l’artiste a pu si vite définir ses thèmes de prédilection et adopter une manière de peindre qui se révèle en quelques années révolutionnaire. Ses origines modestes (son père est tailleur, sa mère, couturière) lui sont finalement utiles : il doit travailler très jeune pour vivre et devient un excellent peintre d’éventails. À l’âge de dix-huit ans, il entre dans l’atelier de Charles Gleyre à l’école des Beaux-Arts. Il n’aime guère son professeur, mais peut se lier d’amitié avec quelques uns de ses élèves : Frédéric Bazille, Claude Monet et Alfred Sisley. Il quitte l’école quand le vieux Gleyre meurt, en 1874. Il fréquente par la suite le café Guerbois, où ont lieu les réunions organisées par Édouard Manet, qui a inventé l’« impressionnisme » (définition malveillante d’un journaliste), qu’on appelle alors « l’école des Batignolles ». L’enseignement de l’Académie n’a pas été inutile : il a appris la composition, les couleurs, la perspective, l’anatomie et la perspective, autant de matières qu’il a assimilées en un éclair. En témoignent le Portrait de Marie-Zélie Laporte et le Portrait d’Alfred Sisley, tous deux exécutés en 1864, l’année où il expose pour la première fois au Salon.

Trois ans plus tard, il fait poser son camarade Bazille, et l’on voit que son style évolue. Il se libère des préceptes de la peinture de son temps. Sa révolte ne passe pas inaperçue et on le refuse au Salon. Il préfère exposer avec ses amis au Salon des artistes indépendants. On remarque son goût pour les scènes intimes en intérieur ou en extérieur, comme le portrait en pied de Lise Tréhot (1868), qui va devenir son épouse. Parfois, il succombe à l’esprit de la scène de genre en vogue à cette époque, comme la Promenade (1870). Mais il s’en libère. Il se révèle un excellent auteur de natures mortes. Il n’est que de voir Nature morte au bouquet (1878) entre autres, pour s’en convaincre. Et le paysage se révèle une passion grandissante, comme on le voit avec la Seine près d’Argenteuil. L’œuvre la plus fascinante de toutes est sans conteste le Paysage de neige (1871) : le blanc en est presque absent et c’est le sentiment général produit par la combinaison des tonalités qui engendre l’idée d’hiver et de journée neigeuse. Il avait évité le noir, (fidèle au précepte de Léonard de Vinci) pour créer un monde naturel idyllique. Mais il dût l’adopter dès qu’il rejoignît les autres peintres de la modernité. Le dernier tableau que l’on peut contempler ici est la Chevauchée dans le bois de Boulogne (1871), où le noir triomphe comme il triomphe dans le monde urbain. Et il ne va plus cesser de jouer de cette ambiguïté picturale.

Gérard-Georges Lemaire

Renoir, entre bohème et bourgeoisie, Kunstmuseum, Bâle, jusqu’au 12 août 2012. Catalogue : 302 pages, 58 FS.

N° 93 – Les Lettres Françaises mai 2012



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