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Henri Lopès : Tribaliques

Par Gangoueus @lareus
Henri Lopès : Tribaliques
J’étais en seconde quand pour la première fois, j’eus ce recueil de nouvelles d’Henri Lopès à étudier. J’en gardais un bon souvenir de lecture, avec un fil d’Ariane tournant autour du tribalisme ou pour faire plus élégant sur la question des rapports des communautés nouvellement créés dans le cadre des frontières de 1885.

Tribus. Ethnies.
Dans les Balkans ou en Belgique, je ne suis pas sûr qu’on use aujourd'hui du même vocable indépendamment du fait que les réalités sont finalement semblables. On parle de nationalités, histoire de niveler les concepts…Ce texte à plus de 40 ans, alors tribus au lieu de nations...
En me baladant, pendant le salon du livre 2012 au stand des auteurs du Bassin du Congo, je suis tombé sur les premières publications d’Henri Lopès. Tribaliques. Souvenirs, souvenirs. Un achat, une dédicace plus tard, je sortais avec ce texte avec le désir confronté mes souvenirs lointains et l’analyse qui peut être faite aujourd’hui de cette première publication de l’auteur congolais en 1971…
On ne peut parler en public d’une dédicace, qui est quelque part personnelle, mais sans rentrer dans le détail, Henri Lopès indique joliment qu’il s’agit d’une œuvre de jeunesse, sur le style je pense.
Après avoir lu plusieurs textes d’Henri Lopès, replonger dans ces Tribaliques me montre que la marque de fabrique du romancier est déjà : la capacité à percevoir et explorer l’intériorité de personnages très différents dans le contexte du Congo socialiste bantou puis marxiste-léniniste. Comment l'histoire déteint sur les individus et leur choix. Chaque nouvelle permet au lecteur de rencontrer des réalités de l’époque de cet état embryonnaire, tout en se centrant sur les histoires personnelles.
La trahison en amour. La difficulté d’une relation extracommunautaire. Les états d’âme d’un bourreau. La Françafrique. Le caractère belliciste d’un ancien baroudeur assagi par un exil contraint et doré. Les idéaux foulés au pied.
Déjà, en 1971, sous la plume d’Henri Lopès, on note un pessimisme clairvoyant qui souligne le fait que les idéaux et l’idéologie ne pèsent pas lourds devant le réflexe clanique.
Mais nous sommes, nous congolais, encore ainsi  faits qu'une personne qui a les mêmes goûts et les mêmes pensées que nous, nous parait plus dangereuse que celle avec qui nous avons le dialecte et le clan en commun.
Nouvelle Ah Apolline ! page 26, éditions CLE Yaoundé, réédition 2011
Bien que je n’habite pas au Congo, je n’exprimerai pas ici une hérésie en disant que les choses n’ont pas vraiment changé depuis. Non, elles se sont aggravées. Ce point de vue est de la première facture quand on connait les fonctions éminentes qu’Henri Lopès dans le Congo des années 70. L'auteur a mettre en exergue les renoncements de ceux qui parfois la facilité tribalique à l'exigence révolutionnaire. On a envie de poser la question : pouvait-il en être autrement quand on songe que le Congo actuel est une invention européenne? 
Je ne sais pas s’il est exact de parler de gerbes mal nouées pour Tribaliques. Au-delà d’une écriture déjà originale, portant à la fois la mélancolie et l’humour du nouvelliste, cette première œuvre qui est d’abord le témoignage d’une époque mais aussi une réflexion sur l’homme écartelé entre sa culture et des dogmes étrangers mal assimilés, cette œuvre disais-je est toujours d’actualité après relecture. C’est là sûrement la puissance d’un texte : son intemporalité. C'est mon point de vue en tout cas.
Henri Lopès : Tribaliques
Henri Lopès, Tribaliques
Editions Clé, 1ère parution en 1971,  115 pages
Source photo - Festival de Cine Africano de Córdoba 

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