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18 mai / A la marge 5/5

Par Blackout @blackoutedition
18 mai A la marge 5/5 - Nouvelles de demain Nous pénétrâmes dans une forêt dense où des dizaines de maquisards auraient pu se planquer, mais attention, les plombs témoignaient : les gargotiers étaient des chasseurs. Plus de tirs, ils avaient dû trouver la caisse. Réfugiés dans un trou providentiel, nous fîmes le bilan. Un plomb dans le mollet de Christine, il saignait un peu, mais pas mort de femme… Moi j'avais gardé cent euros en petites coupures, nous attendîmes la nuit pour calter. Nous allions y aller lorsque j'entendis un bruit terrible : le jappement de chiens qui approchaient dangereusement. Le sillage de lampes de poches barrait la nuit… - File, je vais me rendre, tiens cinquante sous… A plus… Le courage n'étant pas ma vertu principale, je me levais en brandissant la liasse de billets tandis que Christine se barrait de biais. Un cabot me baisa le mollet, son patron traînait à le rappeler : j'étais tombé sur des sadiques… Non. Finalement, tous les chasseurs ne sont pas des cons finis, le boss me fit travailler à la plonge, nourri logé, jusqu'à ce que je rembourse les billets manquants. Et comme il trouvait que je bossais pas mal, il me garda une semaine supplémentaire, payé en bonne et black forme. Je ne revis plus Christine, elle avait dû se faire aimer dans une autre auberge. Je repris la route, sans guitare, elle fut cassée dans la bagarre. Arrivé en ville, accompagné d'un peigne et papier cul, je chantais à la sortie de la gare. Le bus est bondé de peuplades bariolées et vêtues de chiffons. Il vient de la banlieue, le bus, et file vers l'azur des grandes surfaces. Je saute en marche. Centre ville. Ici, le blanc est majoritaire. Pourtant l'accès est gratuit. Mais l'huile et l'eau ne se mélangent pas. Rues piétonnes. Effluves de Chanel toques en fourrure chevauchant de vieilles poudrées jusqu'aux tréfonds des rides qui survivent au lifting, il y a encore une justice. Arrogantes vitrines gavées de bijoux face à la cathédrale : le chrétien soulage sa bourse dans l'une et son âme dans l'autre. Les bourgeoises jacassent et promènent leurs moutards en laisse : elles leur apprennent le caniveau. Les lèvres graissées de rouge s'agitent comme les ouvrières à l'usine. Une rue plus déserte que les autres, un magasin encore plus chic… Mon pied gauche vole et pulvérise la vitrine. Je me sens mieux. Une pulsion soudaine et inattendue me traversa l'esprit, alors qu'un bourgeois venait de m'insulter, me traitant de sale anarchiste. J'eus une envie irrépressible de me jeter sous un train. Heureusement pour moi et pour l'histoire, le prochain était dans quatre heures, ce qui me laissa le temps de réfléchir. La gare possédait une douche, je m'y jetai avec jouissance, puis lavai mes vêtements. J'aimais bien les laveries. Souvent désertes, on se repose à regarder tourner le linge à travers le hublot… Le moral repartit à la hausse, je pris le train en passager clandestin, je m'enfuis dans les toilettes au passage du contrôleur. Pas dupe et conciliant, il me souffla à travers la porte que je pourrais sortir pour laisser la place à ceux qui en avaient vraiment envie. La route est infinie, aussi cette nouvelle n'aura pas de fin.

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