« Le réel ne peut s’exprimer que par l’absurde » a dit Paul Valéry.
La pièce de théâtre Maison de repos qui vient de se terminer au Théâtre des Déchargeurs nous offre une magnifique illustration de cette célèbre phrase, avec cette maison dit « de repos » qui enferme ceux qui n’ont pas le comportement qu’il faut.
Mais c’est avant tout la rencontre de deux êtres rejetés par notre société, Tony et Marion, qui, l’un avec l’autre, trouvent réconfort et réponses à leurs questionnements sur eux même, la vie et tout le reste.
Marion, magnifiquement interprété par Camille Hazarad, nous invite à toucher une enfance rebelle, créatrice et instinctive. Quant à Tony, savamment joué par Mathieu Gorges, il nous pousse à sortir de nos sentiers battus à travers ses questions de gamin têtu et espiègle.
Claudia Mosconi interprète Emeline, fille de la doctoresse en chef, fragile et mélancolique. Elle illustre merveilleusement cette folie qu’on rejette et qu’on enferme et qui pourtant force les portes et entre dans la vie de n’importe quel être humain.
La mise en scène d’Emmanuelle Lancien, également auteure de la pièce, est originale, chorégraphiée et vivante malgré la mécanique des corps. Une valse poétique et stylisée s’offre à nous et contraste avec la spontanéité et la justesse des comédiens.
Ce point de vue avisé nous invite à une certaine distanciation avec la réalité, elle nous suggère le rêve comme le fait si bien ce cher cinéma. On se croirait presque dans Eternal Sunshine of the Spotless Mind de Michel Gondry avec des notes d’ambiance de cinéma muet. Le tout servi avec le talent d’Alessandro Sgobbio, pianiste du spectacle, qui nous transporte encore plus loin dans cet univers allégorique et fantasmatique.
Emmanuelle Lancien peint le destin de ces personnages en tirant avec finesse et poésie les fils de ces poupées désarticulées, victimes du manque d’amour et de la vie, qu’une lueur d’espoir fait tout basculer et ouvre leurs cœurs à quelque chose de plus beau. Nous suivons ce tumulte onirique avec joie et enchantement.
NDLR : A cause d’un soucis d’hébergeur la chronique n’a pu être publiée avant la fin de la pièce, mais il était tout a fait normal d’en parler tout de même, ayant été invité à l’une des représentations.