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Des examens « pour rire » ou le rire, sujet d’examen... (3/3)

Publié le 27 mai 2012 par Sheumas

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Cette disposition du rire qui vise à rassembler les rieurs aux dépens d’un bouc émissaire (un dindon de farce) est examinée à la loupe par le moraliste La Bruyère. Il s’agit, pour ce connaisseur de l’âme humaine, d’isoler (comme le font aussi très bien d’autres moralistes comme La Fontaine et Molière) des groupes sociaux constitués, de petites républiques, (précieuses, bourgeois, femmes savantes, apprentis Trissotin...) et d’analyser le type de rire qui les secoue en grappes et qui les constitue en meute autour d’un noyau dur, intraitable, aux dépens d’un intrus providentiel, objet de la curée des rires. On ne trouve rien de bien dit ou de bien fait que ce qui part des siens.

   Comme les deux auteurs précédents, Axel Kahn constate la férocité du rire. Il existe toute une gamme de mises en cause des personnes par le moyen du rire. Cela génère chez « les victimes » un malaise profond : ils se sentent par là d’autant plus gravement bafoués dans leur dignité que la dérision s’accompagne d’une vacuité émotionnelle. Au-delà de l’indignité d’un tel rire qui, d’une certaine façon, abolit l’humanité du « roseau pensant », l’auteur souligne sa force « décapante », « ravageuse ». La déférence, la peur, l’attachement passionnel, voire l’adoration, ne résistent pas à l’éclat de rire... Par la grâce du rire, l’homme prend ses distances par rapport à ces forces obscures qui pourraient l’écraser.

   De la même façon, Dominique Noguez insiste sur cette nuance du rire que constitue l’humour. L’humour est une médiation qui implique de la part de celui qui l’utilise à la fois « subtilité » et « impassibilité » et qui s’accompagne d’une mise à distance de la pulsion du rire et de la chose dont on rit. L’humour est contre le rire en ce qu’il est une manœuvre pour s’en protéger. On a vu que le rire pouvait être dangereux et devenir la manifestation relativement agressive d’une sanction collective. L’auteur fait d’ailleurs référence à Bergson à propos de qui il écrit : c’est une des manières dont la société entend corriger- Bergson dit même châtier - la raideur ou l’inadaptation de ses membres. Pour échapper au « lynchage » du rire, l’humour opère à la façon d’un « paratonnerre » et empreinte la mine du « sérieux » pour rire sous cape.   


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